Grand Theft Auto IV

  • Lancé en avril 2008 sur PS3 et Xbox 360, puis sur PC en décembre
  • 25 millions d'exemplaires écoulés

Le pitch : En quittant la Serbie pour voguer vers Liberty City, Niko Bellic croyait pouvoir laisser son sombre passé derrière lui et reprendre sa vie à zéro. Mais sitôt débarqué en ville, le rêve américain que lui promettait son facétieux cousin s'estompe, et ses vieux cauchemars ne tardent pas à ressurgir...

"Dense", ce mot résume parfaitement l'incroyable somme d'éléments qui constituent GTA IV, à commencer par Liberty City. Si cette réinterprétation de New York n'est pas aussi vaste que l'État de San Andreas, ses rues débordent littéralement de vie. Les gens vaquent à leurs occupations, s'arrêtent pour lire le journal ou papoter longuement entre eux, parmi les vendeurs de sandwichs et les musiciens de rue. Le caractère cosmopolite de la mégapole transparaît dans les identités marquées des différents quartiers, aisément reconnaissables grâce à une reproduction fidèle de leurs atmosphères à grand renfort de détails. Cette richesse culturelle s'exprime aussi par le biais des monuments, des bars et des cabarets où se jouent de véritables spectacles. De même les radios ne se contentent pas d'offrir une programmation musicale largement plus fournie, au point que l'on entend rarement deux fois le même morceau. Ainsi les interventions des DJ se font plus nombreuses, trois des dix neuf stations étant vouées à des talk-shows aux connotations très politiques, sans oublier les pastiches de publicités, toujours plus habiles dans l'art de tourner en dérision le consumérisme. Impossible d'échapper à cette propagande qui tapisse les murs de la ville, même en rentrant dans l'une des planques. En effet, les appartements sont désormais équipés de téléviseurs diffusant des émissions étonnamment longues et bien sûr pleines d'ironie. Dernière illustration de ce fourmillement, un Internet qui comporte une quantité ahurissante de sites aussi drôles que généreux en informations. Certains sont même fonctionnels, comme le portail de rencontres Love-Meet ou la messagerie, deux piliers de la vie sociale de Niko.

Whiz Mobile

Plus que jamais, on tend vers l'existence virtuelle, une évolution symbolisée par son téléphone cellulaire. Celui-ci permet de recevoir des appels et des SMS liés aux missions, de transmettre des photos, mais également de contacter ses copines ou ses compères pour leur proposer une sortie. Ces moments conviviaux donnent l'occasion de partager les nouveaux loisirs que sont le bowling et les fléchettes, ou simplement d'aller boire un verre, dans l'optique de resserrer leurs liens avec Niko et de profiter de certains avantages (des réductions dans les magasins par exemple). Seuls hics, ces relations deviennent vite envahissantes, puisqu'elles se détériorent si l'on refuse les invitations récurrentes de ce cercle d'amis, tandis que les éventuelles virées en état d'ivresse qu'elles suscitent le cas échéant ne plaisent pas forcément à la police, entre autres. A défaut de l'armée, remplacée par les forces de sécurité du NOOSE (l'équivalent du SWAT), les flics peuvent désormais compter sur le fichage des malfaiteurs accessible depuis l'ordinateur de bord, intégré d'ailleurs aux missions Vigilante. En outre, le système de traque se veut plus cohérent. Il prend ainsi la forme d'une zone circulaire plus ou moins grande selon le niveau de recherche, et dont on doit s'extraire pour se faire oublier. Bien que ce principe paraissent plus permissif que par le passé, il n'est pas toujours évident de survivre. Les véhicules ont beau être équipés de GPS qui facilitent la navigation, ils ne constituent plus du tout un rempart face aux balles, les vitres ne tardant pas à voler en éclats. De plus, le modèle physique plus élaboré du comportement routier et la relative lourdeur qui l'accompagne empêchent d'adopter un mode de pilotage aussi arcade que dans les opus précédents.

Le détail qui tue

Il en va de même pour le contrôle de Niko, susceptible de traverser le pare-brise en cas d'accident et incapable de faire instantanément demi-tour lorsqu'il court. Le bon côté de la chose, c'est qu'il hérite d'un florilège de mouvements supplémentaires, notamment lorsqu'il tente de voler une voiture, en restant quelquefois accroché derrière. Certaines sont fermées, ce qui suppose de casser la fenêtre et de bricoler le démarreur plus ou moins longtemps en fonction de leur catégorie. Et quand le bolide est occupé, le propriétaire ne se laisse pas forcément faire, de sorte que Niko doit s'en débarrasser de manière plus ou moins brutale. Les plus hardis engagent même la bagarre, parfois soutenus par des passants, alors que d'autres préfèrent prendre la fuite. Comme le combat au corps à corps plus pêchu sanctionne lourdement les castagneurs du dimanche, mieux vaut dégainer une arme avant que la situation ne dégénère à l'encontre de Niko. Heureusement, la méthode de tir a été refondue suivant une approche plus moderne, incluant enfin un véritable mécanique de couverture. L'ensemble de ces avancées mettent en exergue les vertus de l'animation procédurale associée aux différentes routines d'intelligence artificielle, qui engendrent un spectacle phénoménalement crédible. Une véritable démonstration, dans la mesure où l'action se déroule dans un univers dynamique en perpétuel changement, du fait des nombreuses variables auxquelles il est soumis. Ce réalisme rend toutefois la violence nettement plus crue en parallèle, un phénomène particulièrement perceptible lors des séquences d'exécution.

Le libre choix

A plusieurs reprises, Niko a le choix d'épargner ou non sa victime, avec des incidences parfois majeures sur l'histoire, notamment à la fin, ou naturellement sur l'éventualité de recroiser ces personnages parmi les rencontres aléatoires. Ces décisions peuvent donc peser lourd, gravité que l'on retrouve dans le ton de Niko. Malgré la nature enjouée de son cousin Roman et l'excentricité de quelques personnages, cette nouvelle aventure résolument sombre dans le milieu criminel ne prête pas franchement à rire. Les contacts rapprochés avec la mafia Russe y sont pour beaucoup, cependant l'explication réside dans le jeu des acteurs et sa restitution fatalement plus convaincante en haute définition, à moins bien sûr de tomber dans la caricature. Or dans le sillage de Bully, c'est justement une narration plus fine, plus personnelle que les frères Houser veulent signer, avec Niko en guise de porte-voix. Son cynisme ramène à la dure réalité, à l'instar de la menace terroriste invoquée pour couper la circulation sur les ponts au début du jeu. Par conséquent le côté délirant de GTA se trouve plutôt dans la dimension multi joueur, fût-elle également plus scénarisée qu'auparavant. La plupart des modes s'inscrivent dans le prolongement des opus PSP, néanmoins ils se révèlent plus ambitieux au niveau coopératif, leur vocation étant d'ériger les fondements du Social Club de Rockstar. Alors que Cops'n Crooks revient aux racines de la saga en jouant aux gendarmes et aux voleurs, Bomb Da Base demande un vrai travail d'organisation pour saboter un bateau. Enfin les modes Free et Party reflètent probablement le mieux la vision de Sam Houser, puisqu'il consistent à se balader dans cet univers ouvert sans objectif défini, et à y inviter ses amis, de façon à partager l'expérience du monde ouvert, tout simplement. Dès lors à chacun de choisir s'il préfère le calme, ou le chaos (surtout que la police est absente des sessions de Party).

L'anecdote : En se rapprochant de la Statue du Bonheur avec un hélicoptère, on peut contempler le faciès de la Statue du Bonheur, qui ressemble étrangement à celui d'Hillary Clinton. Sans doute une façon pour Rockstar de la remercier pour sa bienveillance à leur égard, en témoignent les mots inscrits sur sa tablette qui expriment une certaine désillusion quant à cette terre d'opportunités que représentent théoriquement les Etats-Unis.