Thomas Pillon

Ciao 2016. Bye bye, et merci pour ces bons moments. Cette rotation autour du soleil aura effectivement démarré sur les chapeaux de roux puisqu'en votre compagnie. 2016, c'est donc une belle année de jeu vidéo mais aussi et surtout ma première année sur Gameblog, et ça change beaucoup de choses ! Au fil des articles et des soirées Premium, j'ai eu la chance de rencontrer bon nombre de lecteurs, et j'ai été ravi par ces nombreux échanges avec chacun d'entre vous. Je n'oublie bien évidemment pas toute la rédac' qui m'a réservé un accueil plus que chaleureux tout au long de cette année vidéo-ludique !

Bien que les obligations toujours plus nombreuses de cette foutue vie d'adulte grignotent encore et encore le cher temps libre qu'il me reste, j'ai pu vivre de formidables moments d'extase numérique. Mais avant de rentrer dans le détail des softs qui m'ont fait kiffer (ou bader), je retiendrai d'abord cette année 2016 comme une période ayant vu débarquer de profondes mutations concernant notre petit milieu : en officialisant une mise à jour matérielle de leurs plates-formes disponibles sur le marché, Sony et Microsoft ont osé briser l'historique tradition qui voulait qu'une évolution hardware n'aille de pair qu'avec un changement de génération. Tout ceci semble désormais définitivement derrière nous, et il me paraît évidemment que le marché, le fonctionnement, voire l'existence même des différentes consoles de salon s'en trouvera à jamais remis en question.

2016, c'est également l'arrivée officielle des versions définitives des premiers casques de réalité virtuelle, une évolution qui ouvre à n'en point douter un nouveau pan entier du jeu vidéo, tant il me paraît clair que la conception de titres VR ambitieux obligera à repenser complètement la manière d'appréhender une expérience interactive dans laquelle le joueur peut plus que jamais mettre à mal les rails sur lesquels on essaye de le placer. #WestWorld.

Enfin, 2016 aura aussi été l'année de la loose pour Nintendo. Nouveautés aux abonnés absents, que ce soit sur WiiU ou 3DS, le constructeur historique aura fait preuve durant ces douze mois d'une approche catastrophique de sa communication. Dans l'impossibilité d'avouer que toutes ses équipes travaillent sur une future machine dont tout ou presque avait fuité avant son annonce officielle, le géant kyotoïte se contentera de laisser péniblement crever la gueule ouverte sa brève console de salon, et tant pis pour les tristes possesseurs. A l'inverse de la décapitation, la mort par dédain est lente, et incroyablement pénible. C'est peu dire que la route à parcourir pour la future Switch risque de l'être également !

TOP 3

  1. The Witness
  2. Dishonored 2
  3. Phoenix Wright : Ace Attorney - Spirit of Justice

The Witness. Mind blown. Je l'aurai surveillé, attendu, tant espéré. C'est après sept ans de réflexion et de développement que Jonathan Blow livra enfin au monde entier son nouveau jeu, tellement attendu après le succès ô combien mérité de Braid en 2009. Et quelle claque les enfants ! Méta, profond, minutieux et tranché, The Witness est l'oeuvre déjà culte d'un maniaque obsédé par le moindre détail. Je ne pouvais que succomber.

Se présentant de prime abord comme une énigmatique déambulation dénouée de tout contexte sur une île aux couleurs vives, The Witness construit dans chacun de ses innombrables puzzles un conditionnement mental nécessaire à sa traversée. Sans jamais être guidé par le moindre brin de texte, ou sombrer dans la voix off si facilement dégainée, le joueur n'aura d'autre choix que d'observer, de comprendre cet univers et ses règles abstraites, de le faire sien pour finalement parler littéralement sa langue. The Witness est un système. Une expérience. The Witness aura fait de moi ce même maniaque, découpant encore et encore, des soirées entières, des tétrominos et des planches de toutes les couleurs pour tenter d'organiser mes pensées. Les puzzles m'accompagnaient au boulot, dans les transports, partout. Et lorsque l'on pense enfin toucher au but, le jeu vous colle une méta-baffe sortie de nulle part, et vous met à genoux : depuis le début, là, tout autour de vous, tout fait sens. Tout. Un certain état de l'art du jeu vidéo qui pose de véritables questions et vous en apprend aussi profondément sur vous-même. The Witness n'est pas le jeu de l'année, il est pour moi l'oeuvre d'une génération.

Dishonored 2. Ayant été charmé de bout en bout par les aventures sanglantes (puis discrètes) de Corvo en 2012, inutile de préciser que je piaffais d'impatience à l'idée de poser mes mains sur Dishonored 2. Et quel régal ! Conservant toutes les bases de l'épisode précédent, Arkane Studio est parvenu à enrichir une formule déjà délicieuse en soi. En proposant un impressionnant nombre de variantes, il affiche sans peine une profondeur dont on se délectera au gré des runs : entre le choix initial du personnage qui conditionne intuitu personæ certains pouvoirs, les approches létales ou d'infiltré, l'acceptation des pouvoirs de l'Outsider et les modes de difficultés, Dishonored 2 distribue les pains sans compter. La cité de Karnaca offre de splendides environnements, portés par une direction artistique encore une fois de haute volée. Et que dire de la mécanique offerte par la Timepiece dans le septième chapitre si ce n'est qu'elle achèvera de vous décrocher la mâchoire. Et à l'heure d'infinis open worlds produits à la chaîne, Dishonored 2 nous rappelle qu'un FPS solo peut encore être découpé en niveaux, et écraser la concurrence.

Phoenix Wright : Ace Attorney - Spirit of Justice. Une année voyant (re)débarquer Phoenix, Maya, Apollo, Athena et leurs aventures juridico-fantastico-loufoques dans ma vie est toujours un excellent millésime. 2016 ne fera donc pas exception. Trois longues années après un cinquième épisode qui me laissait songeur quant à l'éventuel avenir de la série, Capcom nous régale d'un volet tibéto-inspiré toujours aussi délicieux. Questionnant la bêtise de la religion quand elle vampirise et gangrène la société des hommes, Spirit of Justice sort enfin l'ami Phoenix de sa zone de confort occidentale pour les terres imaginaires de Khura'in, prétexte à de nombreuses affaires mêlant à nouveau fantastique et rocambolesque.


Les nouveautés sont malheureusement peu nombreuses, mais la formule portée par une mise en scène dominant tous les épisodes passés fonctionne tellement bien que l'on veut bien tout lui pardonner. Cette série si chère à mon coeur aura réussi l'exploit à me faire retarder mon entrée dans l'attendu Final Fantasy XV d'une semaine. Une semaine bordel ! Il reste aujourd'hui si peu de titres qui réussissent avec trois fois rien à me mettre en transe dans le confort de mon canapé : un retournement de situation sorti de nulle part, le thème Cornered qui se lance, l'adrénaline qui monte, et c'est mon cerveau tout entier qui entre alors en ébullition. Un régal. Un kiff comme on en voit rarement. Et ce sourire, franc, entier, vissé jusqu'aux oreilles qui ne me quittera pas de la soirée. A l'heure où l'on annonce sans rougir les éternels Shenmue III ou Final Fantasy VII Remake, je me prends à rêver de voir un jour débarquer Dai Gyakuten Saiban chez nous... Chacun son combat.


FLOP 3

  1. Mighty No. 9
  2. StarFox Zero
  3. Dragon Quest VII

Mighty No 9. Je l'aurai attendu, l'espérée relève de MegaMan. Que d'heures passées à blaster du sprite sur des musiques endiablées ! Malheureusement, le projet Kickstarter hors norme de Keiji Inafune n'aura pas su exploiter ses millions de dollars correctement. Laid, bancal, tiède, frustrant : Mighty No. 9 rate à peu près tout ce qu'il a mollement tenté d'entreprendre. Et voici que s'envole alors l'espoir de revoir une série de la trempe du Blue Bomber, chienne de vie...

La promesse de s'adresser aux fans pour relancer l'une des plus belles pépites dont Capcom semble se tamponner le coquillard avait pourtant de quoi faire rêver. Pire, il débarquait à un moment où les remakes, revivals et autres remasters ne semblent plus lasser personne, un boulevard lui était ouvert. Malheur à celui qui concédera quelques heures à arpenter les sombres niveaux de cet ersatz microbien de MegaMan : il n'y trouvera que tristesse et décadence. L'argent ne fait pas le Bomber...

StarFox Zero. Après avoir longuement hésité à réserver cette second place à la WiiU toute entière vu le nombre absolument famélique de jeux sortis cette année sur la console mort-née, j'ai finalement choisi d'orienter mon dévolu sur ce titre ô combien attendu. Presque vingt ans que l'on n'avait pas eu le droit à un épisode canonique, et dix ans sans véritable nouvel opus tout court, c'est dire si le retour de Fox McCloud et sa clique anthropomorphe avait suscité mon intérêt. Hélas, trois fois hélas, malgré la délégation du projet confié au brillant studio Platinum Games (qui est quand même responsable du divin The Wonderful 101 sorti sur la même machine), le résultat sera un immense gâchis.

Quelle mouche a donc piqué les deux équipes de développement ?! Non content de faire ressembler son titre à un jeu qui aurait sans peine tourné sur DreamCast, StarFox Zero part en vrille sans même que ce vieux Peppy l'ai suggéré. Pourquoi ? Pourquoi diable après vingt ans d'absence choisir de faire de ce titre une sorte de copié/collé à peine rafraîchit de StarFox 64 ? C'est à n'y rien comprendre. En remake non-affirmé, StarFox Zero ne fait que louper éternellement le coche, c'est à peine si Nintendo n'a pas réutilisé les dialogues enregistrés en 1997 ! Voguant de déceptions en déceptions malgré une prise en main plaisante et originale, nos valeureuses boules de poils cosmiques ne semblent n'être plus que l'ombre d'eux-mêmes, comme si leur place était déjà de finir dans la vitrine d'un taxidermiste zélé...

Dragon Quest VII. Une fois encore, que d'attentes ! N'ayant pas eu la malchance de poser mes petites mains d'adolescent boutonneux au moment de sa sortie en import sur PlayStation, je me réjouissais d'avance de pouvoir découvrir le seul épisode canonique qui m'avait jusqu'alors résisté. En véritable adorateur de Dragon Quest V et VIII, je voulais à tout prix arpenter les paysages de cet épisode tant décrié, symbole de l'incapacité d'Enix d'épouser de nouvelles techniques de développement, quand l'ennemi éternel jubilait devant le succès international de sa trilogie de Final Fantasy sur PlayStation.

Que retiendrai-je finalement de ce septième épisode ? Si on lui pardonne son âge en prenant la peine de le recontextualiser, il n'en demeure pas moins un archétypal relou qui débarquerait un brin éméché en milieu de soirée pour casser l'ambiance, monopolisant l'attention en brassant du vent. Inutilement long, le jeu se perd en scénettes inutiles ou la candeur des personnages n'a d'égal que leur raideur. Abscons au possible, il se paye en plus le luxe de reposer sur un imbuvable principe qui veut que vous n'avancerez pas d'un poil dans l'aventure si vous n'avez pas parlé au bon villageois/ennemi/vache/stéréotype au bon moment. A multiplier les allers-retours inutiles, les non-sens inexplicables, les classes interminables à monter et les lourdeurs d'écriture, Dragon Quest VII aura réussi à me faire sortir carrément frustré de son périple. Un comble pour moi qui apprécie tellement cette saga emblématique ! Espérons que le portage du huitième épisode efface bien vite ce souvenir douloureux...