Voilà quelques semaines, Metal Gear Solid V : Ground Zeroes a littéralement divisé les joueurs. Alors qu'une partie d'entre eux accusait avec virulence le nouveau format économique du jeu, l'autre versant le défendait avec tout autant d'ardeur.

Pour rappel, Ground Zeroes présente le prologue du futur Metal Gear Solid V : The Phantom Pain ; il coûte 20€ en téléchargement sur PlayStation 3 et Xbox 360, et 30€ sur les machines next-gen. Sans entrer dans un débat stérile sur la durée de vie, je qualifierais l'expérience du jeu de "limitée" : une campagne solo assez courte et cinq missions secondaires. Si j'ai choisi de terminer mon P'tit Papier sur ce MGS, c'est parce que le titre a cristallisé il y a peu un démêlé autour de son identité : s'agit-il véritablement d'un jeu, d'une démo, d'une arnaque ?

Pour ma part, je le considère comme un standalone. De fait, ce nouveau Metal Gear entre parfaitement dans notre classification des DLC : format économique contestable, disponibilité simultanée en dur et en dématérialisé, univers connecté à une saga établie, le jeu pouvant toutefois être pratiqué de façon autonome. Mais alors que les standalone proposent en général des aventures longues, Ground Zeroes se distingue de ses homologues par une expérience plutôt courte. Autre petite excentricité du titre consiste finalement dans sa publication en amont d'un épisode complet - nous n'en avons pas moins vu avec Dead Rising que la chose n'était pas inédite. J'en profite aussi pour citer les différents prologues et autres versions "concept" de Gran Turismo ayant adopté par le passé un modus operandi similaire.


Hideo Kojima fait partie, comme David Cage, de ces créateurs de jeu vidéo dont les prises de position captivent l'attention. Immanquablement, chaque nouveau jeu ou déclaration de l'un comme l'autre donne lieu à des discussions sensibles.

Animés par une colère pour le moins étrange, nous nous escarmouchons les uns contre les autres sur des futilités pour in fine oublier de débattre de ce qui est important : les jeux en question, à qui sont-ils destinés ? À qui s'adresse ce standalone ? De mon point de vue, il paraît évident que ce prologue de MGS V se destine aux fidèles de la première heure. À ce titre, Ground Zeroes se rattache d'autant plus à la famille des DLC. Nous l'avons vu tout du long de cet article, rares sont les contenus téléchargeables qui ne se limitent pas à viser le public des inconditionnels. Malheureusement, Ground Zeroes tombe un peu dans ce piège. Ce standalone est réservé aux adorateurs de la saga, car seuls ces derniers pourront y déceler les multiples clins d'oeil, en saisir le sens et trouver par là même une légitimité à ce Ground Zeroes - alors que...

Outre un prix de vente que j'estime trop élevé, ce qui me chagrine le plus avec Ground Zeroes, ce n'est pas tant la qualité du DLC que son approche biaisée d'un Metal Gear Solid. C'est en effet en tant que MGS que ce dernier m'a déçu. En premier lieu, soulignons la vacuité du scénario de Ground Zeroes. L'amertume que j'ai ressentie est d'autant plus grande que 95 % de l'intrigue racontée dans les cinématiques m'avaient été dévoilés à travers les bandes-annonces promotionnelles. De facto, aucune révélation ni aucun retournement de situation ne sont venus pimenter l'aventure. Par ailleurs, l'absence de boss est particulièrement dommageable. La présence d'un antagoniste charismatique ayant toujours été le pivot d'une bonne expérience metalgearo-solidienne, ce manque dessert Ground Zeroes. Ces deux sérieuses lacunes contribuent à la platitude de la psychologie des personnages : une faiblesse étonnante qui trahit les composantes fondamentales de la saga en transformant ce Metal Gear Solid en simple faire-valoir du vrai cinquième épisode à venir.


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Notre article du jour nous mènerait presque à réfléchir à ce qu'est réellement un jeu vidéo. Un DLC en est-il un à part entière ? Au vu de titres comme The Ballad of Gay Tony, The Lost and Damned ou Ground Zeroes, je serais tenté de répondre par l'affirmative. La question est néanmoins tout autre lorsque nous nous penchons sur le véritable intérêt que peuvent présenter les DLC pour les joueurs. Si nous partons du postulat que ces produits n'ont d'autre finalité que la rentabilisation du jeu principal, l'intérêt d'un DLC paraît fatalement limité. Encore une fois, c'est la famille des standalone qui se démarque ici en offrant l'expérience la plus satisfaisante.

Depuis l'avènement des consoles connectées, nous subissons par vagues hebdomadaires les offres de DLC des éditeurs. Rares pourtant sont les contenus téléchargeables qui mériteraient ne serait-ce qu'une seconde de notre attention ou le moindre de nos euros. Face à ce raz-de-marée d'insignifiance, le refus d'acheter quoi que ce soit peut traduire une certaine forme de revendication : la généralisation d'un tel choix constituerait un moyen efficace d'endiguer cette tendance. Pourtant, les années s'écoulent sans que les DLC disparaissent. Cela signifierait-il qu'ils satisfont la majorité d'entre nous ? Probablement. Je pense que l'explication est double en fonction du point de vue adopté : pour les joueurs, il est difficile de ne pas céder aux sirènes de la tentation, malgré une politique de prix contestable des éditeurs ; alors que pour ces derniers, la recherche de nouvelles sources de revenus est devenue une priorité, fût-ce au mépris de l'intégrité des oeuvres publiées.