En 2006 sortait le désormais iconique Test Drive Unlimited, un jeu de course sans équivalent propulsant les joueurs aux commandes des voitures (puis motos) les plus luxueuses du moment. Le tour de force de l’époque résidait alors dans sa map gigantesque, une reproduction à l'échelle 1/1 de l'île paradisiaque d'Oahu en plein cœur de l’archipel d'Hawaï. En quelque sorte précurseur du jeu de course en open world, le titre aura été une source d’inspiration évidente pour les productions qui lui succéderont. 17 ans plus tard le studio Ivory Tower, composé en partie par des anciens d’Eden Games (Test Drive justement…), nous propose le dernier-né de la famille The Crew avec Motorfest. Et devinez quoi, The Crew Motorfest débarque sur les terres de l'île d'Oahu avec sa cargaison de véhicules en tous genres. La boucle est bouclée.

Le digne héritier d’un genre

Cette introduction un peu particulière au test de The Crew Motorfest a un but précis : bien faire comprendre que la licence d’Ubisoft ne se pose pas ici en vulgaire copie, voire plagiat de Forza Horizon, comme ont pu le marteler certaines mauvaises langues depuis son annonce. Il fallait à un moment donné évoquer la concurrence alors autant le faire de suite. Oui The Crew, et encore plus Motorfest, s’inspire sur de nombreux points de Forza Horizon 3 et 5 tout en y apportant sa propre patte, de la même manière que les jeux du giron Microsoft se sont inspirés de Test Drive Unlimited. La concurrence, je ne vais rien vous apprendre, n’est pas nouvelle dans notre média et tant mieux ! Les grands gagnants dans l’histoire ce sont bel et bien nous, les joueurs. Une masterclass donne des idées à un autre studio qui repoussera les limites et ainsi de suite, en apportant toujours de nouvelles améliorations, un élément bien entendu indispensable. Sans ce processus, le jeu vidéo au global n’aurait pas cette qualité qu’il propose aujourd’hui, et ce ne sont pas Lara Croft et Nathan Drake qui pourront me contredire.

The Crew Motorfest test
Préparez-vous au voyage

Gimme Fuel, gimme fire, gimme that which I desire !

The Crew 1 et 2 se sont d’emblée démarqués avec leur map titanesque des États-Unis, mais aussi par la variété des véhicules pilotables, grosso modo tout ce qui a un moteur et des roues, ou presque. Motorfest ne déroge pas à la règle avec sa palanquée de plus de 600 véhicules au lancement (voitures, motos, quads, bateaux, avions…) à laquelle vous pourrez choisir à tout moment d’importer ou non l’intégralité de votre garage durement glané sur The Crew 2. A titre purement personnel, je ne saurais que vous conseiller de démarrer cette nouvelle aventure sur une base totalement vierge de manière à conserver cette satisfaction de progression, quitte à récupérer votre ancienne collection quelques dizaines d’heures de jeu plus tard.

Pour mettre en scène ces engins, The Crew Motorfest opte pour une toute nouvelle approche basée sur un système de playlists (15 au lancement) qui constitue en quelque sorte la campagne principale. Tous ceux ayant déjà tâté la bêta en connaissent le fonctionnement, chacune d’elle propose un thème précis et bien distinct décliné en une succession d’épreuves avec par exemple une sélection dédiée à un constructeur ou un préparateur particulier, des courses sur le thème des 2 roues, sur le drift ou bien encore les véhicules tout terrain. Certains influenceurs célèbres dans le milieu de la mécanique seront aussi de la partie, mais je préfère ne pas trop en divulguer pour vous laisser profiter de la découverte de ces dernières. Quoi qu’il en soit, sachez que l’ensemble se veut particulièrement varié, proposant carrément des “jeux dans le jeu”. Tantôt vous jouez à un jeu de moto, puis à un jeu de course voiture sur piste avant de passer à de la ballade en forêt ou du bateau en bord de mer… Plus que jamais, une des grandes forces de The Crew réside dans sa polyvalence que l’on ne retrouve nulle part ailleurs.

Chacune de ces playlists profite d’un mini scénario, certes qui ne casse pas trois pattes à un canard mais qui aura tout de même le mérite de vous apprendre quelques petites anecdotes intéressantes. Autre point fort, leur identité visuelle. Au-delà de l’aspect purement technique, certaines d’entre elles se démarquent par une direction artistique unique, à l’image de la playlist “Made in Japan” qui nous plonge dans un univers aux teintes hyper marquées, composées presque uniquement de bleu et de rose. Là encore, la sensation de jouer à des jeux différents selon nos sessions est un énorme kiff. On en vient rapidement à se dire que The Crew Motorfest tient là une durée de vie potentiellement énorme. S’il vous faudra une vingtaine d’heures pour voir le bout de l’intégralité des playlists, on ne peut qu’imaginer le contenu supplémentaire à venir par la suite, et ce uniquement pour ce mode.  

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Certaines playlists ont un style visuel bien marqué

Par contre vous êtes prévenus : The Crew Motorfest est bavard, très bavard. A un tel point que par moments il m’était impossible d’entendre le moteur de mon véhicule pour savoir quand changer de rapport. Et pensez à baisser le volume des musiques pour la même raison, bien qu’elles soient plutôt bien adaptées au jeu. Les développeurs ont fait un travail tellement remarquable sur la partie sonore des bolides qu’il serait dommage de ne pas en profiter pleinement. La reproduction des sons moteurs est un pur délice auquel la série ne nous avait pas habitué jusqu’à présent. Les voitures électriques m’ont même carrément bluffé avec leurs sons certes exagérés mais donnant l’impression de participer à une course de pods dans Star Wars épisode 1. Vraiment de l’excellent travail, arcade ,mais totalement assumé.

Comme dirait Etienne le bolideur, ça pousse !

Puisque nous parlons arcade, vous ne serez pas surpris d’apprendre que The Crew Motorfest en conserve l’ADN. Le gameplay de ce nouvel opus me faisait peur tant je n’avais pas apprécié celui de son prédécesseur, que je trouvais vide de sensations. Les équipes d’Ivory Tower ont écouté leur communauté et proposent désormais une physique totalement remaniée. Enfin les véhicules ont une masse et un grip que l’on ressens, terminé les caisses à savon creuses sans saveur tant le retour d’informations à la manette était imperceptible. Inutile de chercher ici une once de simulation, mais The Crew parvient enfin à se démarquer de manière convaincante avec son pilotage facile à prendre en mains et plaisant. Les amateurs de vue cockpit seront aux anges avec un point de vue à la première personne toujours aussi réussi quel que soit le type de véhicules choisi.

Le détail des animations, la rotation du volant à 900 degrés, notre avatar posant son coude sur le bord de la portière lors des ballades en mode détente… l’immersion est bien présente.  Et que dire du drift, qui devient enfin jouable ?! Il faudra cependant farmer quelques pièces d’équipement pour améliorer votre voiture et surtout passer par la case réglages pour obtenir la meilleure expérience qui soit. Mention spéciale également pour les motos que j’ai trouvées bien plus agréables et plaisantes à piloter. En revanche, les phases à bord d’avions et de bateaux m’ont paru toujours aussi ennuyantes, fort heureusement elles sont beaucoup moins présentes que par le passé. La voie des airs se révèle surtout pratique pour les déplacements rapides sur la map avec la possibilité de switcher à la volée entre voiture, bateau et avion d'une simple pression de touche.

Une autre grosse surprise à été la prise en main au volant. Là encore, vu mon expérience désastreuse sur le précédent opus, je n’avais aucune attente. Grosse erreur ! Les possesseurs de volant, shifter et frein à main pourront s’en donner à cœur joie avec un très bon ressenti. Le retour de force est enfin présent et transmet efficacement les informations du terrain, bien que les vibrations un poil trop prononcées nécessiteront un petit passage par le menu des options.

The Crew Motorfest test
Le pilotage est enfin plaisant, à la manette comme au volant

T’es comme le H de Hawaï

Comme je vous le disais précédemment, la map de The Crew fait partie de son identité depuis ses débuts, et celle de ce troisième opus risque au premier abord d’en décevoir certains de par sa taille. Oubliez les dimensions absolument gigantesques des deux premiers jeux qui proposaient un condensé de l’intégralité des États-Unis sur une seule et même carte de 5000 km², nous sommes ici face à une aire de jeu bien plus modeste. Pour vous donner un ordre de comparaison, là où la carte des anciens jeux demandait environ 1h pour être parcourue de son extrémité Est à Ouest, l'île d'Oahu n’en demandera que 20 minutes pour en faire le tour en longeant le littoral. Absolument pas de quoi crier au vol pour autant, je vous rassure. Oui on y perd une part de ce côté voyage vertigineux des anciens titres, mais on y gagne bien plus au final. Il faut bien l’admettre, les 5000 km² imposaient d’immenses concessions techniques sans parler des nombreux espaces totalement vides et sans réels points d'intérêt que l’on parcourait.

L'île hawaïenne est dense et variée et ne laisse à aucun moment cette impression de néant. Mer turquoise bordée de plages de sable fin paradisiaques, petites routes de campagnes longeant des zones rurales colorées et passant par des territoires boisés, agglomérations traversées par de grands axes routiers et régions bien plus hostiles avec un relief prononcé et même une zone volcanique perdue au milieu d’une jungle… tout cela n’est qu’une ébauche des possibilités qui vous seront offertes. On comprend bien mieux ce choix d’avoir voulu revenir à nouveau sur ces terres après les avoir parcourues. Où que vous alliez, vous trouverez tout le temps quelque chose à faire et ce même en dehors des courses. Trésor contenant du loot et de l’argent, défis multiples, radars, points d’expérience à glaner via vos actions de pilotage et j'en passe. Rien de révolutionnaire dans ce genre de productions, mais toujours efficace pour nous garder éveillé.

Il faut cependant noter un cruel manque de vie général, un des rares points de régression si ce n'est l'unique. Les piétons, professionnels de l'esquive, ont totalement déserté les rues, et ne vous attendez pas non plus à croiser une quelconque forme de vie animale lors de vos escapades rurales. Il y aura la route, les voitures et vous. Point. Sans être dramatique, il faut reconnaître que cela nuit à l'immersion générale de la map qui se contente d'être un magnifique décor.

The Crew Motorfest test
L'île d'Oahu est plus petite mais suffisamment variée et détaillée

Un Motorfestin pour les yeux

Car oui, The Crew Motorfest est beau. Là encore les développeurs ont su se surpasser et surtout tirer profit des performances des machines actuelles tout en bénéficiant de la puissance de calcul supérieure offerte grâce à la map plus contenue. Les États-Unis, c'était impressionnant, mais c'était aussi et surtout un piège technique. Dès sa sortie, The Crew 2 était visuellement dépassé. C’est aujourd’hui du passé avec un tout nouveau moteur graphique franchement convaincant. Sans être au même degré de perfection que les ténors du genre, The Crew Motorfest s’en sort haut la main avec une identité visuelle marquée combinant efficacement textures colorées, contrastes prononcés et effets de lumières réussis. Si en plus vous possédez un écran HDR, alors attendez-vous à en prendre plein les yeux lors des couchers de soleil offrant des panoramas somptueux.

Ubisoft maîtrise la gestion des éclairages, mais paradoxalement use et abuse de certains effets comme les reflets. C’est bien simple, les routes seront à 90% du temps mouillées, même par grand soleil. Un subterfuge bien trop visible et un poil facile, mais force est de reconnaître que le résultat fonctionne. Tout n’est pourtant pas irréprochable sur ce paradis ensoleillé, en témoignent quelques textures assez pauvres à certains endroits, des éléments pouvant apparaître subitement au loin et surtout…des rétroviseurs absolument pas fonctionnels en vue subjective ! On pensait enfin en être débarrassé en 2023, et bien c’est raté. Là aussi l’immersion en prend un coup. Entre nous, ces détails seront heureusement assez vite oubliés une fois lancé à toute allure aux commandes de votre véhicule. Tout du moins à toute vitesse selon votre compteur, car il est vrai que cette dernière n’est pas particulièrement raccord avec l’impression perçue. Surtout valable en voiture, vous aurez l’impression de rouler à 150 kmh quand votre aiguille en affichera 250. Pour en finir avec la partie technique, il est à noter que The Crew Motorfest est bloqué à 60 images par seconde et ce même sur les versions PC. L’explication donnée est simple, cela permet d’uniformiser les performances et donc de placer tous les joueurs sur un pied d’égalité lors des joutes en ligne, le titre profitant du cross-play entre l'ensemble des plates-formes.

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Une moto GP, une autoroute, un short et un T-shirt...

Bande organisée

Le multijoueur est évidemment l’une des composantes essentielles de Motorfest nécessitant une connexion permanente pour être joué. Aucune surprise sur ce point, The Crew ayant toujours été une licence reposant sur des bases MMORPG. Les codes du genre y sont toujours présents avec du loot d’équipement classé par rareté à récupérer pour améliorer ses montures et des points d’xp à cumuler pour obtenir des récompenses et augmenter ses stats via des Points de Légende. Nous parlions tout à l’heure des playlists pour le solo, mais le contenu de The Crew Motorfest est bien plus large que cela. Vous retrouverez par exemple le Custom Show, véritable salon d’exposition/hub social au sein duquel vous pourrez vous balader librement en compagnie d’autres joueurs pour y admirer leurs plus belles créations. Le menu des activités vous proposera également de rejoindre à tout moment des sessions sur 2 modes exclusivement multi à 28 joueurs en simultané. La Grand Race vous jette dans une course endiablée sur un long tracé vous faisant alterner entre 3 types de véhicules. C’est le bordel, ça tape dans tous les sens, mais c’est franchement fun. Et un mode battle royale nommé Démolition Royale vous fera affronter avec vos acolytes d’autres équipes. Bien plus intéressant qu’il n’y paraît, ce mode vous demandera de la communication et de la coordination pour espérer vaincre.

En parallèle à tout cela viennent enfin se greffer les saisons et leurs summits, qui font bien évidemment leur grand retour. Le lancement du jeu donne ainsi le coup d’envoi de la saison 1, apportant avec elle pour ce mois de septembre une playlist sur le thème American Muscle. Chaque semaine du mois est associée à une sous-catégorie avec de la piste, de la voiture vintage, du off-road, du circuit… le tout composé de diverses épreuves et défis avec récompenses exclusives à la clé. Le mois d’octobre sera quant à lui dédié au Japon et novembre aux véhicules européens. Ce contenu end game assure d’ores et déjà une longévité exceptionnelle à The Crew Motorfest qui, encore plus que ses prédécesseurs, possède une excellente base pour vivre pendant des années. Il n’y a aucun doute sur le fait qu’Ubisoft va choyer son titre et les joueurs avec une tonne de nouvelles playlists, véhicules, modes de jeu et autres dlc venant agrandir l'aire de jeu. Si vous accrochez à l’expérience, ce qui est fort probable, alors vous serez embarqué pour très longtemps.

The Crew Motorfest test
Le Custom Show, hub multi que vous visiterez avec d'autres joueurs