Et cela semble commencer plutôt mal puisque l'on assiste à des funérailles, celles du personnage principal. Il est bel et bien mort, allongé sur son bûcher, semblant attendre que le contact d'une torche se charge de sa dépouille physique. De sa solide carcasse et de sa longue barbe blanche, il ne restera bientôt plus que des cendres. Ils sont nombreux à assister à ses adieux au monde des mortels. Mais combien savent qu'il s'agit en réalité du début d'un nouveau voyage ? Car cet homme sans nom, va bien "vivre" quelque chose tout au long d'Arise : A Simple Story : les événements les plus marquants de son existence.

Je vous parle d'un temps...

Le passage vers l'au-delà a l'air somme toute des plus agréables. Abandonné sur un sommet enneigé, le héros est invité à entrer en contact avec une dizaines d'orbes lumineux qui lui feront parcourir autant de souvenirs. Les premières enjambées le voient traverser de paisibles plaines chatoyantes. C'est l'enfance. Pas plus gros qu'un insecte, il doit faire bondir, grimper, et faire preuve d'un peu d'esprit pour avancer comme il le souhaite. Chaque environnement arpenté représentant un moment important de son histoire, jusqu'à ses derniers jours, se laisse manipuler. À l'aide du stick droit (ou en confiant la tâche à une deuxième personne, très bonne idée pour partager un moment privilégié), il est possible d'agir sur une séquence temporelle durant laquelle les éléments se meuvent.

Ce tripotage du temps permet d'influer sur le niveau d'un point d'eau ou d'un tas de neige pour atteindre des hauteurs, sur le vol d'une abeille à laquelle s'accrocher à l'aide d'un grappin (également utile pour créer des ponts), sur le parcours d'un pétale, sur l'orientation d'une fleur, la progression d'un incendie ou la remise en place d'un rocher catapulté par un éboulement : voilà quelques exemples de casse-tête avec lesquels il faut composer tout au long de cette aventure. La stase complète intervient assez vite pour apporter là encore de nouvelles solutions à des situations jamais compliquées. La simplicité, mise en avant par le sous-titre du jeu, est appliquée au niveau du gameplay de ce titre en 3D mixant exploration (avec des esquisses à dénicher), plate-forme et réflexion. Et tout à fait adéquate, avec des renouvellements fréquents. Si ce n'était pour des commandes ne répondant pas efficacement, en particulier sur des sauts approximatifs et pas toujours évidents à estimer, la faute à des points de vue fixes empêchant une bonne lecture, tout le serait, simple.

Une vie moins ordinaire

Faisant fi de ces défauts potentiellement décourageants, le joueur obstiné n'aura aucun mal à constater qu'Arise : A Simple Story est du même bois que les Journey, GRIS, Brothers : A Tale of Two Sons ou encore RiME. Il partage avec eux une direction artistique marquée, une réalisation minimaliste et sans fioritures, ainsi qu'une narration environnementale des plus éloquentes. Avec autant d'habileté, ce conte sans paroles d'environ quatre heures parvient à procurer des émotions de manière très authentique.

C'est l'histoire d'une vie certes imaginaire, représentée de manière surréaliste, mais dont on se sent proche. Les joies et les peines, les doutes et les bonheurs... Les sentiments qui défilent dans une parade visuelle onirique parfaitement découpée, que la bande-son plaintive signée David Garcia (à l'oeuvre sur RiMe, cité plus haut, et Hellblade), encore très inspiré, sublime, nous imprègnent littéralement. Jusqu'au geste final de son protagoniste, clou d'un spectacle émouvant qui, à la manière du premier quart d'heure de Là-Haut, lui aussi résumé d'un destin bien vécu, forcera peut-être à sortir les mouchoirs.