Parfois, la destinée d'un jeu peut se jouer à pas grand chose. John Tobias, un des créatifs d'origine de la saga, avait déjà le Mortal Kombat que l'on connaît bien en tête. Mais ses boss voulaient autre chose. Un jeu avec Jean-Claude Jean Damme. Ce n'est que quand ce dernier à refusé d'apparaître dans leur projet baston que Tobias et Ed Boon ont commencé le vrai travail. Aujourd'hui, Johnny Cage, avatar pixelisée de JCVD, est l'incarnation de tout le kitsch que la série continue d'étaler dans ce onzième épisode. On y a passé un certain moment, et ce n'est pas triste.

Immortal Combat

La destinée de Mortal Kombat n'est pas liée qu'au destin de notre cher JCVD puisque bien plus tard, quand les légendaires séries Z sont sorties sur les écrans, Raiden était alors incarné par une autre légende francophone des 90s', Christophe Lambert. Et on retrouve le dieu du tonnerre encore une fois au centre du scénario de MK11, puisque ce dernier laisse ses alliés en bien fâcheuse posture depuis déjà quelques épisodes. Certains connaissent un bien funeste destin tels des héros déchus, mais un nouvel ennemi va faire son apparition : Kronika. Il semblerait bien que ce soit elle qui, en manipulant le temps à sa guise, continue de garder le monde en état de conflit permanent. Dans un geste destructif, elle lance un reboot du temps, qui fait apparaître les vieilles versions de nos héros, approximativement période Super Nintendo, dans le scénario post MKX où résident les héros que l'on suit depuis quelques temps.

Des gentils deviennent vilains et vice-versa, les matchs miroir sont légion, le fan service est à son paroxysme et l'on prend un vrai plaisir à suivre les pérégrinations baroques de nos héros durant la poignée d'heures qu'il faudra pour parcourir la campagne solo. On ne rechigne pas à la tâche, l'histoire nous proposant de nombreuses scènes d'action assez stylées et dans l'esprit de la série. Les niveaux sont assez classes, certains se rappelant à notre bon souvenir, et aussi avec une mention spéciale pour les bateaux qui naviguent sur des vagues dignes d'Hokusai. À noter, quelques incohérences pas méchantes et probablement volontaires, où l'on ignore des règles pourtant établies un peu plus tôt... NeatherRealm a plus ou moins lancé la mode du mode histoire cinématique avec MK vs DC et MK9, et là où la concurrence a du mal, MK11 garde une nette longueur d'avance dans le domaine.

Mortal Combo

Question gameplay, Mortal Kombat, c'est une autre école et une autre voie du jeu de baston que celle empruntée par les Capcom, SNK ou autre Arc Sys. C'est aussi un feeling différent, "à l'américaine" comme le dirait si bien notre cher Trazom. Les bases sont les mêmes, mais clairement, on est sur autre chose. Quatre boutons d'attaque, avec des directions pour changer le type de coup, et des combos bien spécifiques à trouver et à travailler. On retrouve aussi une chope, une garde, un bouton pour changer de posture. Dans MK11, on ne choisit plus une variante de personnage comme dans le jeu précédent, mais on construit soi-même une partie des coups spéciaux de son avatar : 25 environ sont disponibles, et on devrait bien évidemment en voir arriver d'autres, probablement issus de licences de la pop culture. Des jauges de vigueur offensive et défensive font leur apparition, et se montrent assez déterminantes. En attaque, on peut buffer ses coups, changer leur trajectoire pour enchaîner sur un combo, et en défense, on peut par exemple éviter un K.O. de Chip damage (Cheap ?) si l'on a suffisamment de posture. Oui, c'est le Sekiro en moi qui parle. Les attaques Fatal Blow, qui se déclenchent avec moins de 30% de vie, sont toujours de la partie, une fois par match, et sont encore ultra spectaculaires et gores, avec des passages en rayon X où l'on voit l'anatomie de nos héros se déchirer violemment. Tout aussi délicieux et dégoûtant, le coup broyant, lui aussi une fois par match, peut se déclencher sous certaines conditions, là encore avec un bref passage façon radiographie qui fait bien mal. Pour ne pas le piffer accidentellement, on peut régler l'input sur un appui long.

Pour le système de combo, on reste en terrain connu, il faut bien connaître ses gammes et les réciter avec un timing impeccable, le tout avec une certaine rigidité dans les déplacements en comparaison à BlazBlue ou à Dragon Ball FighterZ. Pour s'aider, on dispose d'un système d'annulation d'animations pour lancer un coup spécial, qui s'effectue avec deux directions successives et un bouton, et améliorables contre de la vigueur pour continuer encore plus son combo. Le système reste intraitable et les inputs se font à la frame : impossible de bourriner trois fois une touche avant de passer à la suivante pendant l'animation. Du coup, il faut scrupuleusement respecter l'ordre et le timing de son combo. Question défense, le jeu n'est pas en reste . Malgré le placement sur "R2", chose à laquelle certains ne pourront jamais se faire, les options sont nombreuses, avec une gestion de la hauteur, de nombreuses possibilités de contre assez risquées, des parades parfaites et des contre-attaques ultra punitives. On interagit toujours de façon assez fun avec le décor, et bien évidemment, les ultra gores fatalités sont de la partie. Malgré sa rigidité certaine qui peut déplaire, Mortal Kombat 11 est un modèle de technicité, avec de très nombreuses subtilités que nous n'avons pas évoquées dans ce test, et il faudra suer pour arriver à maîtriser ses arcanes. Une réussite assurément, même si les portes ne s'ouvriront qu'aux plus valeureux.

Je vais te la jouer à la frame bien moyenâgeuse

Pour profiter des joies de MK11, en plus du solide mode histoire cinématique dont je vous parlais tantôt, vous aurez accès à pas mal de choses. Un mode entraînement, mais aussi un tutoriel ultra complet, avec des cours sur les bases, mais aussi sur les entrailles du jeu de combat, avec des enseignements sur les stratégies, une initiation aux frames, à la décomposition des coups et à leur timing en nombres d'images par seconde, à base de couleurs sur les personnages comme dans les guides. On trouvera aussi des sabliers qui inculquent le timing de certains combos, et des explications sur ce qu'on rate et ce qu'on réussit dans une leçon. On nous prend vraiment par la main, le jeu est littéralement désossé et on nous montre tout l'intérieur, un peu comme dans une fatalité bien "dédjeulasse". Et s'il est vrai qu'on ne nous révèle que les bases et qu'il faudra aller chercher le reste par soi-même, c'est là un bel effort qui mérite d'être souligné et qui permet de vraiment comprendre au-delà des rudiments nécessaires pour réussir dans l'univers impitoyable de Mortal Kombat. En termes d'accessibilité, sur ce point, on est au niveau du dernier Guilty Gear Xrd.

Pour se défouler, on retrouvera aussi des tours de combat, de plus en plus hautes, voire infinies, et des tours temporaires aux récompenses variées, dont des épilogues de mode arcade. On y affronte des ennemis dans des conditions fortement défavorables, avec des assistances de héros en réserve, des armes ou des altérations de statut. Mais heureusement, on peut, nous aussi, en utilisant des objets consommables gagnés dans les différents modes de jeu, améliorer son perso avec des effets dévastateurs. Il est possible également d'affronter de surpuissants boss avec d'autres joueurs en équipe, chacun son tour, les autres utilisant des pouvoirs pour aider le combattant. On a aussi accès à des matches en local, et même une fonction tournoi, mais aussi et bien évidemment, des modes en ligne. Le netcode est fiable, et on retrouve des matches classés, amicaux, la possibilité de créer des salons et un mode "roi de la colline". Un versus asynchrone où l'on envoie l'I.A. se battre contre celle d'autres joueurs est aussi de la partie. D'ailleurs, si on a la flemme, on peut aussi laisser la console prendre le contrôle dans à-peu-près tous les modes, gagner de l'argent pour nous, et même des trophées ! La Crypte fait bien évidemment le voyage dans MK11, et cette fois-ci, c'est sous forme de TPS que l'on va aller ouvrir des coffres par milliers pour débloquer des skins, des artworks et de nouvelles fatalités. La partie customisation esthétique est assez poussée, mais il faudra un sacré investissement pour tout débloquer ! Bref, MK11 est assez complet et il y a de quoi faire.

Rétine fatalisée !

Un bon gameplay, une bonne histoire et pas mal de modes de jeu, Mortal Kombat rend pour l'instant une très bonne copie. Et ce n'est pas la technique qui viendra ternir le bilan. En effet, le jeu de NetherRealm s'avère très beau, un vrai cran au-dessus que ce que pouvait offrir Injustice 2 en son temps. Les modèles 3D des personnages sont fins, tout comme les textures utilisées, les cheveux n'ont pas l'effet Playmobil. Le tout est sublimé par des effets de lumière ou de matière réussis. De plus, les décors ne sont pas en reste, sont très dépaysants, et le tout tourne avec une fluidité exemplaire - 60 FPS - sur les modèles "premium" de nos consoles "nouvelle génération". Sur Switch, il faudra attendre pour le savoir.

Enfin, pour terminer sur d'autres notes positives, on signalera une utilisation judicieuse du haut-parleur de la manette PS4, qui émet un son quand nos jauges de vigueur sont chargées, ou vides, même si c'est bien souvent trop tard. MK mobile devrait quant à lui permettre de débloquer quelques bonus pour la version console - et inversement - comme des costumes ou des consommables. Et, rien n'est moins sûr, on devrait bientôt voir apparaître une borne d'arcade Mortal Kombat, identique à celle d'Injustice, avec des cartes à colleKtionner ? Oups, pardon, on avait bien tenu jusque-là pourtant...