Il y a des réveils plus difficiles que d'autres. Ceux du lundi matin, ceux des lendemains de fête, des bouches pâteuses et des tourbillons de regret. Et il y a celui du Barde, qui démarre sa journée pourtant plein d'entrain, non sans immédiatement découvrir que, comme l'annonce Traz depuis si longtemps, la fin du monde est arrivée. Confronté à la nonchalance d'un être surnaturel qui lui rappelle que l'apocalypse imminente n'est finalement que la fin d'un monde tel que nous le connaissons, et qu'un autre prendra la suite, Le Barde s'alarme de la situation, et décide de prendre le destin du monde en main, sans se faire traiter de con : en chanson.

Sans mon Barde, quel Barde

Heureusement, tout n'est pas perdu, puisque Le Barde découvre qu'il suffit d'entonner un certain chant pour sauver le monde sa perte certaine. Par un heureux hasard, le gusse fagoté comme Robin des Bois possède un organe qui fait sa fierté, puisqu'il ne s'exprime que par le chant. Nous voici donc lancés à l'aventure, pour retrouver la trace de cet air légendaire, qui conduira ledit Barde à travers de nombreuses contrées, à la rencontre de personnages littéralement hauts en couleurs. Et si le ton vous paraît étrangement emprunt de légèreté, c'est parce que Wandersong joue sans rougir la carte du feel good : avec ses décors pastels en superposition, sa musique zenifiante et ses dialogues naïfs, l'aventure que propose Greg Lobanov réussit à installer une ambiance très positive, sans ficelles apparentes.

Restreint dans ses contrôles, il faut envisager Wandersong comme une sympathique balade musicale dans laquelle se glissent des phases de gameplay assez légères de jeu de plate-forme et de puzzle game. La simplification se retrouve dans les contrôles : un bouton pour sauter, un autre pour interagir, et le stick droit qui permettra de donner de la voix. C'est évidemment cette dernière mécanique qui à Wandersong son charme et son originalité, et permettre au sympathique Barde de sauver le monde grâce au seul pouvoir de la musique. Et d'un peu de chance.

Gamme à mâcher

Découpé en huit notes comme autant de diagonales, le chant peut (et doit) être utilisé en toute circonstances, car les notes que vous entonnerez auront un impact immédiat sur l'environnement. Votre serviteur ne vous emportera pas avec lui dans un débat sur la relativité de la justesse en musique et les habitudes prises par les oreilles occidentales concernant la gamme majeure, mais la mécanique s'accorde véritablement bien avec toutes les orchestrations proposées, et elles sont nombreuses. Répéter le chant d'un oiseau vous en fera un allié, s'adresser aux plantes ou aux courants d'air permettra de les diriger, et pour peu que vous soyez du genre à traîner la nuit dans les cimeterres, vous pourrez même communiquer avec les morts. Le pouvoir de la musique on vous dit.

Malheureusement, le stick de la Switch n'est pas des plus évidents à manipuler avec justesse en mode portable, que nous ne pouvons que vous conseiller, car Wandersong est à faire au casque pour l'apprécier pleinement. C'est d'autant plus dommage que certaines énigmes nécessitent un brin de justesse et de rapidité pour pouvoir être validées, mais l'absence totale de punition laisse les nerfs au repos. Sans découpage en niveaux ou de possibilité de revenir en arrière, le jeu se parcourt comme un conte, un seul chapitre à la fois, histoire de ne pas voir la lassitude s'installer.

Bonsoir Maubeuge

Mais que l'on ne s'y trompe pas : sous ses airs de joyeux drille un brin apocalyptique, Wandersong n'est pas à réserver aux plus jeunes. Malgré une difficulté très restreinte, il faudra prendre le temps de vraiment tailler le bout de gras avec les différents autochtones pour trouver votre prochain objectif. Chaque zone vous évite l'éparpillement, mais le joueur distrait pourra chercher un trigger pendant un bon moment s'il n'a pas au préalable déclenché le bon dialogue. Heureusement, la galerie de personnages qui compose cet univers aura toujours quelque chose à vous raconter : Wandersong arrive à creuser son background au travers des dialogues même optionnels, sans pourtant donner la sensation d'y aller au forceps.

Alors oui, forcément, ça jacasse, ça temporise parfois, au risque de perdre en route les joueurs impatients qui pensaient avoir affaire à un platformer plus classique, utilisant la musique comme un prétexte. Il n'en est rien : Wandersong joue sans complexe la carte de l'épuration et de la simplicité, ce qui nous oblige à une certaine mise en garde quant à son contenu, qui laissera perplexe un public peu réceptif à son message zenifiant qui s'apparente parfois plus à une aventure interactive qu'à un jeu en bonne et due forme.