Depuis son apparition pas si lointaine sur Game Boy Color, Shantae incarne l'une des dernières représentantes du jeu de plateforme saupoudré d'une pincée de RPG, en bonne vieille 2D. Ce lifting intégral en haute définition la rend évidemment plus belle que jamais, à commencer par les décors qui mêlent harmonieusement les éléments en bitmap et en polygones, notamment au travers de multiples parallaxes vectoriels. Le moteur graphique d'Inti Creates n'atteint toutefois pas la finesse exubérante de l'UbiArt Framework par exemple, tandis que l'ensemble manque un tantinet de caractère pictural, en dépit du look affirmé des personnages aux traits résolument plus cartoon. Il y a néanmoins de quoi écarquiller les yeux devant ce déluge de détails, d'effets somptueux et autres jeux de lumière. D'autant que notre danseuse du ventre se déhanche de manière infiniment plus sensuelle, la fluidité enivrante de l'animation n'étant en aucun cas prise en défaut, y compris face aux gigantesques Boss, plus spectaculaires qu'originaux question patterns d'ailleurs.

Régionalisation

Cette remarque s'applique également à l'intrigue, similaire aux habitudes, en somme délicieusement absurde. Les variations et les répétitions scénaristiques ont ainsi des accents comiques, du moins quand ils ne sont pas gâchés par la traduction en français, plombée de coquilles en attendant une probable mise à jour. Heureusement, les protagonistes se montrent assez bavards pour indiquer la marche à suivre de façon intelligible, une progression encore facilitée par le découpage de l'aventure en niveaux. En guise de profond changement de direction lié au mode de financement participatif, Half-Genie Hero n'hérite donc pas d'un monde inter communicant, dans le sillage du virage initié par Pirate's Curse. Son unité ne repose dorénavant que sur une carte décorative où se juxtaposent les différentes destinations, visitées à dos d'oiseau. Naturellement, une telle structure s'inscrit dans un schéma épisodique qui simplifie par la même occasion le level design, mais cela évite de se perdre au sein de dédales sur plusieurs plans comme au temps jadis.

Dancer power

Paradoxalement, ce cloisonnement n'amenuise guère l'exploration, elle se révèle juste plus confinée. Les stages regorgent en effet de coffres plus ou moins cachés, qui nécessitent (et renferment souvent) des pouvoirs. Si l'ampleur de Sequin Land s'avère un peu réduite, celle des aptitudes de Shantae a été élargi en parallèle. Au delà d'une gamme de sorts légèrement renforcée, sa panoplie de transformations constitue de loin la plus étoffée de la saga. Dans les deux cas, on constate un certain recyclage, avec d'un côté les boules de feu, les éclairs ainsi que les boules à pointes, et de l'autre le singe, l'éléphant, l'araignée ou la sirène. Cependant une bonne partie de la garde robe est toute neuve, et ravive littéralement la magie du gameplay, au point de ne pas trop regretter le panache de l'arsenal de pirate. Mieux, nombre de ces déguisements disposent d'évolutions, telles que la balle ouistiti, ou le sonar de la chauve-souris. Dommage que quelques danses aient des airs superflus, voire de doublons, à l'image de la dryade productrice d'oranges ou du crabe qui n'a d'intérêt que sa petitesse.

L'art du va-et-vient

En outre, beaucoup de ces capacités ne servent qu'à résoudre des énigmes fermement balisées. Autrement dit, chaque niveau comporte son lot de zones inaccessibles jusqu'à l'acquisition du talent adéquat. Ce principe certes traditionnel, mais un chouïa trop visible, n'en demeure pas moins efficace, car il entraîne mécaniquement moult allers et retours pas forcément redondants, grâce à des modifications substantielles dans les stages. De plus, la relative liberté laissée dans l'ordre d'obtention des power-ups optionnels et la pléthore d'objets à collectionner (en particulier ceux qui influent sur la conclusion et les clés du musée d'illustrations) atténuent la linéarité du périple, globalement plus court qu'à l'accoutumée - moitié moins en l'occurrence - même en marquant des pauses pour écouter tranquillement les musiques de Jake Kaufman, débordantes de verve à défaut de réelle inspiration. Reste la perspective de redécouvrir l'histoire par le biais d'autres héros grâce aux futurs DLC, bien que l'on doute que leurs épopées et caractéristiques distinctes suffisent à transfigurer cet opus, d'ores et déjà charmant, sans atteindre pour le moment le génie de la trilogie passée.