A priori, The Wonderful 101 n'a pas franchement des airs d'héritier spirituel de Viewtiful Joe, ne serait-ce qu'en raison de sa présentation en 3D isométrique. On est loin (dans tous les sens du terme) du rendu délicieusement léché de ce dernier, en dépit de couleurs saturées et d'une bonne dose de blur qui ne suffit d'ailleurs pas à masquer l'aliasing, ni la pauvreté de certaines textures. Est-ce la condition pour que ce trépidant jeu d'action n'ait pas à souffrir de toussotements de frame-rate ? L'ensemble demeure en tout cas très agréable à l'oeil, The Wonderful 101 affirmant un style assez singulier à mesure que les décors s'étoffent au fil de l'aventure. Cela rappellerait presque la série Thunderbirds revisitée à la sauce tokusatsu, surtout que l'humour ambiant ne se prive pas de forcer le(s) trait(s). Entre les particularités culturelles lourdement soulignées des personnages (dont un français, sacrevert !) à travers les dialogues, et les séquences de transformation que l'on croirait tirées de X-Or ou Bioman, cette invasion extraterrestre prend une allure granguignolesque. C'est évidemment là que l'influence de Viewtiful Joe commence à se faire sentir, qu'il s'agisse du pitch ou de sa dérision assumée. Comme on pouvait le deviner, le scénario n'a pour vocation que de justifier les escapades aux quatre coins de la planète des "Wonderful 100", ou plutôt "101" depuis l'arrivée de Red, la jeune recrue talentueuse que l'on incarne. Les Centinels - comprenez la gente des Super Héros - constituent en effet le principal rempart face à l'offensive des Geathjerks, une armada composée de créatures à la fois cybernétiques et organiques. Encore faut-il réunir les troupes, quitte à enrôler de simples civils pour gonfler les rangs en attendant, car dans The Wonderful 101, on se bat rarement seul.

Plentiful

Il s'agit ainsi de contrôler une horde de Super Héros, qui suivent docilement le meneur choisi. Dès que l'on croise des autochtones en détresse, il suffit de tracer un cercle autour d'eux par le biais du stick droit ou de l'écran tactile pour qu'ils se transforment en Super Héros le temps d'une mission. Une fois que l'armée comporte 100 têtes, les autres rescapés anonymes sont envoyés immédiatement à l'abri. Les Wonderful retrouvés parmi la population restent en revanche au sein du bataillon, puisque l'on se doit d'avoir un minimum d'hommes (et de femmes) pour lutter efficacement contre les envahisseur. D'un appui sur le bouton X, nos ouailles se ruent sur l'ennemi le plus proche et tentent de submerger les plus massifs, afin de les immobiliser. Le pouvoir essentiel des Wonderful reste néanmoins "l'Unimorphisation", exécutée au ralenti grâce à la Wonder Ligne, lointaine descendante du Pinceau Céleste d'Okami semble-t-il. Suivant la forme que l'on dessine là encore avec le stylet ou le stick droit, les Wonderful s'amalgament pour former une arme, comme un poing, une épée ou un revolver. Leur puissance dépend de la taille du symbole, de sorte que l'on a tout intérêt à disposer d'un maximum de soldats, en plus d'une Morpho Jauge bien pleine. Naturellement, il convient aussi de choisir son arme en fonction de la nature de l'adversité, certaines bestioles n'étant sensibles qu'à un type d'attaque spécifique. Seuls les principaux protagonistes sont dotés de tels talents, qui ont par ailleurs des usages moins belliqueux, notamment celui d'outils pour activer divers mécanismes (nous en reparlerons plus tard). Leurs compères se contentent donc d'augmenter la force de frappe de l'armée par leur présence et la bonification des caractéristiques qu'ils apportent en prenant du galon, et du niveau.

Powerful

Avec tout ça, on prendrait facilement les Wonderful pour une bande de Pikmins affublés de déguisements moulants. La gestion des troupes n'a cependant pas du tout la même importance, car seul le meneur subit des dégâts qui se répercutent sur la Vita Jauge. Ses camarades sont juste assommés, un état dans lequel ils restent un petit laps de temps, à moins d'être réanimés par le passage du leader. En d'autres termes, les Wonderful sont immortels, y compris quand ils tombent dans un précipice. Malgré la nuée formée par les personnages, ils avancent tous comme un seul homme. Et pour cause, dans la mesure où The Wonderful 101 appartient avant tout à la lignée des beat'em all, à la différence près que les héros sont ici bien plus nombreux que les ennemis. La dextérité et le doigté n'y demeurent pas moins des vertus fondamentales, qui plus est au regard du désordre qui règne dans l'arène, des petits problèmes de lisibilité que la fonction zoom de la caméra ne suffit pas à résoudre complètement. Comment pourrait-il en être autrement, au regard du formidable feu d'artifice qu'occasionnent les combats ? Leur teneur conduit rapidement à se fendre de combos, voire de "Multiunimorphisations" pour se débarrasser illico des adversaires les plus coriaces. Une maîtrise parfaite de la Wonder Ligne est alors requise, idéalement avec le GamePad. Si l'on peut alternativement jouer avec la manette Wii U Pro ou le duo Wiimote / manette Classique Pro, la tablette s'impose en effet comme le meilleur compromis. Certaines Unimorphisations s'effectuent ainsi plus aisément avec le stick, et d'autres à l'aide du stylet, si bien que l'on apprécie d'avoir constamment les deux sous la main. D'autant que les performances sont évaluées à la fin de chaque niveau, avec une statuette faite d'un matériau allant du plastique au pure platine selon la qualité de la prestation.

Platinumful

Encore une manifestation de l'inspiration de Viewtiful Joe que partage également sa tantine Bayonetta. En plus du fouet manipulé férocement par l'une des héroïnes, The Wonderful 101 hérite de Boss monumentaux, vaincus à grands coups de QTE. Et pour une fois, on en redemande. Non pas que leur mise en scène fasse pâlir de honte un Asura's Wrath, mais ces séquences brillent pas leur variété, une remarque qui s'applique aussi au déroulement de l'épopée. En variant les situations, PlatinumGames parvient à éviter la lassitude si souvent suscitée par la nature répétitive du genre. Il s'agit tantôt de phases de rail shooter, tantôt de shoot'em up à l'instar de Joe en son temps, sans oublier les petites trouvailles liées au double affichage. L'écran du Gamepad ne sert pas qu'à visualiser le radar, il arrive parfois que l'on doive y jeter un oeil pour savoir ce qui se passe à l'intérieur d'un building, en vue rapprochée, histoire d'actionner un interrupteur. Ce n'est là qu'un exemple des énigmes qui ponctuent les opérations, puisque des Unimorphisations se destinent plus particulièrement à l'exploration de cet univers moins linéaire qu'il n'y paraît, à l'image de l'échelle ou du deltaplane. Les environnements renferment de nombreux trésors : Entre les missions secrètes, les informations cachées, les héros et leurs figurines à dénicher, The Wonderful 101 jouit d'un solide capital rejouabilité. Surtout qu'il ne repose pas que sur la collectionnite, car les Cosmopièces amassées permettent de s'offrir des Unimorphisations, des techniques et des modules supplémentaires, en sus des précieuses victuailles. A l'exception des capacités indispensables que sont le Ressort et la Gelée (respectivement vouées à l'esquive et à la contre attaque), les tarifs s'avèrent assez élevés, mais cet équipement profite à l'ensemble des troupes. Ces évolutions permet de découvrir progressivement les possibilités du gameplay, aussi aiguisé qu'escompté. Des subtilités que l'on a également loisir d'approfondir avec les Opérations Spéciales en solo ou à plusieurs, somme toute anecdotiques en comparaison du mode histoire, mais qui confirment que l'union fait la force.