L’avantage d’éditeurs ou de studios qui existent depuis plusieurs dizaines d’années tient dans un catalogue étoffé. Panel dont certains éléments ont connu une gloire certaine dans le passé, parlant à toute une frange de joueurs déjà presque conquise par avance. Produire un remaster minimise donc d’une part les risques et permet qui plus est de perpétuer le cycle par le fait de faire découvrir de vieux classiques à un nouveau public dans des conditions en théorie optimales. En ramenant Tales of Symphonia sur le devant de la scène, Bandai Namco propose l’un des meilleurs épisodes de la série, titre marquant pour de nombreux joueurs. Car oui, ce RPG possède des qualités qui font défaut à pas mal de représentants récents du genre. Plutôt bien rythmé, il enchaîne les révélations sans jamais oublier de laisser de la place à ses personnages, attachants et créant une dynamique de groupe enthousiasmante. Notamment grâce aux petits dialogues non doublés, que l’on peut choisir, ou non, de visionner. De quoi donner du corps aux divers drames et captiver sur le long terme. De même, par son côté orienté action, son système de combat dynamise les phases d’exploration, évoluant au fil de l’aventure par le rajout régulier de possibilités. Mais il s’avère important de garder en tête que tout cela reste dans le passé, en 2004, quasiment 20 ans en amont. Et autant dire que depuis, à la fois le J-RPG et la série Tales ont connu des évolutions majeures, et de sacrées remises en question.

Faiblard moderne

On ne peut que célébrer ce qu’a apporté Tales of Symphonia à l’époque et ce qu’il conserve encore aujourd’hui en termes de modernité. Mais là où certains font l’effort de remettre au goût du jour des éléments de game design pris comme évidents aujourd’hui, tout du moins confortables, Bandai Namco n’a pas jugé bon d’apporter la même attention sur ce remaster. C’est une expérience dans son jus dont il est question ici, avec les limites que ce choix impose, en particulier au niveau du gameplay. La dimension simili jeu de baston qui paraissait riche et variée à l’époque se montre aujourd’hui bien fade à la vision du peu d’attaques différentes et des enchaînements limités. D’autant que l’obligation de rester enfermé dans une ligne droite sans possibilité de cavaler sur la zone de jeu en entier donne la sensation d’une rigidité pesante. Certes, cela peut paraître injuste face à d’autres reprises de classiques comme Final Fantasy X ou encore Chrono Cross qui ne s'embarrassent pas non plus de retravailler leurs systèmes de combat, mais il s’agit de tour par tour, bien moins soumis à l’impact des années. Les modifications opérées depuis s’avèrent autrement plus discrètes que dans le domaine du combat “actif”, surtout après les derniers épisodes en date de la série Tales Of, laissant une grande liberté de mouvement et de conception de combos. De fait, ce Tales of Symphonia Remastered crie sa vétusté, que rien ne vient contrecarrer. Pas un mode accélérant les rixes, pas de mouvements inédits, pas de nouvelles actions qui viendraient donner un coup de fouet, rien.

Au saut du lift

Le problème ne se cantonne d’ailleurs pas à ce domaine, le jeu n’ayant subi aucune autre modification qu’un lissage global. Amélioration par ailleurs pas vraiment heureuse, tant les textures dans le décor se montrent parfois baveuses, quand elles ne sont pas juste étirées sans grande conviction. La paresse de cette version remaniée s’étend donc jusque dans l’absence totale d’options de confort globales pourtant habituelles. N’espérez pas avoir la possibilité de sauvegarder où bon vous semble ou même de bénéficier de menus améliorés, n’imaginez pas non plus pouvoir réécouter la bande-son de Motoi Sakuraba avec un meilleur rendu sonore. Tout hurle son appartenance à la première décennie 2000 et dessert complètement un RPG qualitatif qui n’avait pas demandé un tel traitement. Qu’on s’entende bien, Tales of Symphonia Remastered reste une aventure agréable à l’écriture encore parfois d’une radicalité inattendue, mais le manque de tout ancrage dans des logiques actuelles en font une relique sur laquelle il reste difficile de prendre du plaisir. D’autant plus si l’on ajoute à ce tableau, la conservation d’anachronismes, à l’image de ces chargements de 2-3 secondes entre la fin d’un combat et le retour à la carte du monde. Tout du moins sur la version PlayStation 4. Car l’édition Switch apparaît comme sacrificielle, tant elle souffre de stigmates supplémentaires, comme un framerate parfois catastrophique ou encore une collection de bugs visuels. De quoi causer une certaine inquiétude concernant les futurs remasters des deux Baten Kaitos s’ils subissent le même traitement. Ou tout du moins absence de traitement.