Initialement sorti sur PSP fin 2010, et uniquement au Japon, le premier épisode de la série, Invite Only, avait eu droit à un remake PS Vita en novembre 2013, qui avait mis plus de deux ans à franchir nos frontières, entièrement traduit en Anglais, sous l'impulsion de Nippon Ichi Software America. Finalement arrivé dans nos contrées début 2015, le jeu m'avait alors très agréablement surpris. Le fan service y était plus qu'aguicheur, le gameplay original et l'ambiance générale plus que réussie, grâce à une direction artistique atypique et des musiques de haute volée, assez mélancoliques et comparables à ce que l'on peut trouver dans les meilleures productions de la scène indépendante du jeu vidéo. Un de mes coups de coeur de cette année là, assurément. À l'annonce de sa suite, sortie fin 2015 au pays du soleil levant, je trépignais d'impatience de pouvoir poser mes gros doigts dessus, allongé dans mon lit, sur ma petite PS Vita. Près d'un an plus tard, j'ai enfin pu me plonger à nouveau dans les profondeurs de l'enfer, tentant de réformer et purifier mon équipe de jeunes nymphettes criminelles pour les faire revenir dans le droit chemin... Moult heures de jeu après, le verdit tombe... Que vaut donc ce jeu si délicieusement politiquement incorrect ?

The Hateful Height

Criminal Girls 2 : Party Favors vous place dans la peau d'un héros portant le doux nom de "Joniwan" (On me fait signe dans l'oreillette qu'en fait, c'était uniquement dans ma partie) qui endosse le dur rôle d'un instructeur-réformateur des enfers. Pourquoi ? On ne le sais pas. Vous vous éveillez au fin fond des 9 cercles, amnésique, avec seulement quelques bribes de souvenirs d'une petite soeur (rien a voir avec Bioshock) dont le destin semble avoir été dramatique... Et à peine debout, voilà que votre supérieure, avec laquelle vous communiquez uniquement par radio, vous colle dans les pattes sept jeunes filles en fleurs, toutes accusées d'être des criminelles en devenir au moment de leur mort. Votre mission, que vous n'aurez pas le choix d'accepter ou non, si vous voulez sortir de cette situation, sera de mener ce groupe de lolitas à leur rédemption en arpentant les dangereux couloirs de cet univers emplis de "coupables", des âmes perdues qui se sont changées en dangereux et agressifs monstres à force d'errances dans les limbes. Vous ne serez que leur guide, et ce sera à elles de se battre pour espérer revoir un jour la lumière du soleil, et ce malgré toute la mauvaise volonté que leur statut de parias de la société pourra engendrer.

Si le pitch de départ est assez simpliste, le scénario va faire preuve de moult qualités au fil de votre avancée dans le jeu. En plaçant un "coupable" dans le groupe tout d'abord, inéligible à la réformation, et dont l'identité secrète va venir semer la discorde dans l'équipe. Car c'est dans les relations entre les filles, votre statut de protecteur ou non, et leurs propres évolutions personnelles que va se trouver tout le sel de cette histoire. Vos sept comparses sont, au départ de gros clichés issus du monde du manga, avec une bimbo girly, une loubarde aux formes généreuses, une princesse pimbêche, véritable "tsundere" en puissance, une "magical girl" mystérieuse et déterminée, une jeune fille timide qui parle à sa peluche, une combattante aussi redoutable que son apparence est juvénile, et la classique meneuse de groupe qui veut tout bien faire mais qui s'avère rapidement être une "yandere". Chacune aura un rôle prédéfini, entre attaquante, soigneuse, personnage de soutien ou magicienne.

Belles et rebelles

Au fil de vos pérégrinations dans ce monde impitoyable, abandonné par votre encadrement suite à un bug du programme de réformation et sa prise de contrôle par les "coupables", et au fil des rencontres avec d'autres humaines qui n'auront pas d'autre but que de vous diviser, la vraie nature de vos héroïnes se révélera. D'abord plus que réticentes, dans des séquences de type "visual novel" entièrement doublées en Japonnais, leurs relations, leur détermination, leurs objectif et le passé sombre de chacune d'entre elles va refaire surface et les faire s'interroger sur leur place dans la société, leurs erreurs, et réfléchir à une direction qui permettre de redonner sens à leurs vies. Cet aspect se montre bien plus sombre et intelligent que dans la plupart des productions sexy, et s'il n'atteint pas les sommets proposés par des visual novel tels que Virtue's Last Reward, Danganronpa ou Steins;Gate, les personnages sont bien exploités et on suit leurs pérégrinations avec grand plaisir.

Un autre aspect du titre sera lui aussi à ranger au rayon des réussites : le gameplay. Avec des scènes d'exploration assez classiques, qui vont bénéficier du soutien du scénario et vous imposer des séparations de groupe, mais aussi quelques aller-retours et autres labyrinthes assez originaux. Suivant ce qui à déjà été proposé dans le premier épisode, Criminal Girls 2 : Party Favors se montre assez convainquant sur ce point. Un autre des aspect n'évolue pas en revanche (ou très peu) : les phases de combat au tour par tour. Au fil des combats déclenchés aléatoirement en marchant sur la map, le tout à une fréquence assez démentielle, il vous sera alors proposé un système plus qu'original. Chacune des quatre nymphettes qui composent votre groupe va imposer une action, et une seule, parmi les compétences qui font partie de ses aptitudes. Et vous n'aurez pas le choix, c'est bel et bien les filles qui décident, puisque vous n'aurez droit qu'à une seule action parmi les quatre à chacun des tours !

Tokyo Decadence

Le scénario s'invite donc une fois de plus dans le gameplay, car sous couvert de leur statut de délinquantes peu coopératives, ce sera à vous de faire avec ce que vos lolitas mettent à votre disposition. Cela implique une véritable cassure dans la monotonie des combats, puisque bien souvent ces derniers ne vont pas se dérouler de la même façon ! Seule véritable petite nouveauté de ces phases, la possibilité d'encourager certaines de vos combattantes au détriment des autres. Le reste est très classique, mais efficace, avec des attaques élémentaires, des changements de statut et autres joyeusetés qui composent généralement une grande partie des RPG. Mais attention, le jeu se montre malgré tout plutôt difficile, avec de l'exploration ou vous vous retrouvez rapidement à court de mana et dans l'obligation de trouver un camp, mais aussi contre les boss ou il va falloir "farmer" un bon moment pour vous mettre à niveau, et aussi trouver la faille dans leur défense grâce à un changement d'état ou une garde de fer. Fort heureusement, les développeurs ont pensé aux joueurs qui n'ont pas forcément le temps de se consacrer à ce genre de jeux, avec un mode "novice" qui permet d'éviter ces longues et intenses sessions de "farm" d'expérience et d'argent en plaçant le joueur à niveau via une simple exploration du stage. Le jeu n'en deviendra pas facile pour autant, et il faudra sauvegarder régulièrement et faire de gros stocks d'objets de soin et de soutien !

L'autre aspect plutôt original du titre se situe dans ses mécaniques d'apprentissage de compétences des filles. Peu enclines à coopérer au départ, il va falloir faire appel à vos talents dans le domaine... Du sadomasochisme ! En effet, pour motiver les nymphettes et les pousser à collaborer, il va falloir passer par des mini-jeux allants de la fessée à la décharge électrique... Dans des positions plus qu'aguicheuses, vos prétendantes seront donc à la merci de vos mains expertes, et vont ainsi trouver le courage de se battre avec des attaques de plus en plus puissantes ! Les mini-jeux montrent plus d'intérêt, mais aussi de variété et de challenge que dans le premier épisode, qui n'était pas très réussi sur ce point là. Idem pour les images de fond et les animations, tout juste magnifiques (et ce nonobstant toute considération d'ordre érotique). Autre originalité : ces séquences sont un passage obligé : Si vous ne le faites pas , les filles n'apprennent rien de nouveau et refuseront de se battre pour vous !

Criminal Art

Au delà de cette "motivation" et de ces artwork, certes érotiques, mais très bien réalisés, le reste du titre est présenté sous forme "Super Deformed". A savoir des personnages miniatures et mignons qui évoluent dans des donjons et participent aux combats. Ces illustration sont encore une fois très réussies et participent à la réussite globale de l'univers de ce Criminal Girls 2 : Party Favors, tout comme les dessins "normaux" des filles qui apparaissent lors des phases de visual novel. Dans le choix de ses niveaux, le jeu se montre aussi original, avec quelques reprises du premier comme le stage de l'école, mais quelques originalités comme ce monde pastel si nippon, rempli de peluches et de macarons ! Le tout est toujours soutenu par une musique de qualité, bien souvent mélancolique et à la hauteur de l'ambiance et du malaise qui se dégage de cette épopée en enfer. Ne vous attendez donc pas à une démo technique de la part du jeu, mais plutôt à une expérience au doux parfum nostalgique des RPG à l'ancienne, malgré des visuels 2D très fins et réussis.

Sans révolutionner le concept du premier épisode, Criminal Girls 2 continue donc sur sa lancée et propose au joueur de prolonger le plaisir offert l'an dernier avec un nouveau casting riche en couleurs et un character design qui m'a semblé plus inspiré.