Cinq ans après son annonce, Bayonetta 3 est fin prêt à venir distribuer des mandales sur Switch. Armé de son huitième degré et d’idées plus farfelues les unes que les autres, Platinum Games entend bien user de sa sorcellerie pour surpasser la formule millimétrée  qui a fait de la licence un incontournable du genre. Pari gagné, nous avons  a été envoûtés une fois de plus.

Ma sorcière bien-aimée

Plus d’anges ni de démons. La Sorcière bien aimée de Nintendo aurait pu se la couler douce, mais c’était sans compter sur l’arrivée d’une nouvelle menace : les Homonculus. De mystérieuses armes biologiques créées par les humains qui mettent à mal tout l’AlphaVerse. À la pointe de la mode et plus radieuse que jamais, Bayonetta va explorer son propre multivers avec tout un tas de lignes temporelles entremêlées où se cachent des versions alternatives de Cereza. PlatinumGames n’a jamais caché son intérêt relatif pour le scénario, prétexte à ses plus grandes folies, et il a encore poussé tous les potards au max. Le studio japonais ne s’est  s’est pas assagi, loin de là. 

test Bayonetta 3
AU SECOUUUUUURSS !!!

Plonger dans l’univers de Bayonetta, c’est en effet accepter d’assister à une histoire fantasmagorique qui laisse libre cours à la démence du studio. C’est prendre claque sur claque à chaque séquence où tout sera prétexte à passer en mode roue libre. Bayonetta 3, c’est des scènes improbables, de l’action rocambolesque et débridée qui dépasse toujours plus les limites d’un gigantisme déjà  vertigineux dans le second volet. C’est un feu d’artifice de mises en scènes plus folles les unes que les autres qui décrochent soit un sourire, soit la mâchoire. Un festival d’extravagance et de débauche poussé à son paroxysme du début à la fin. Bayonetta 3, c’est finalement un jeu dantesque qui fait dans la démesure sans aucun complexe pour nous emmener de surprise en surprise, avec son histoire complètement folle  et son rythme maîtrisé tout du long. 

Et l’exclusivité Switch ne serait rien sans la plus coquine de ses hôtesses qui assure ce grand spectacle. Porté par le multivers, PlatinumGames se permet toutes les folies en termes de chara-design de l’héroïne, plus classe que jamais peu importe la version ou le monde où elle se trouve. Impossible de ne pas faire une parenthèse sur la polémique qui a éclaté avant la sortie. Autant être direct, Jennifer Hale assure le remplacement avec virtuosité, nous livrant une Bayonetta d’une force et d’une fragilité renversante. Si la Sorcière avait déjà conquis votre cœur, elle vous mettra ici à genoux. Un soin transposé sur l’ensemble du casting, où Jeanne comme Viola, la nouvelle apprentie-sorcière venue tout droit des confins du multivers, n’ont pas à rougir face à toutes les contorsions de l’héroïne. Pour ne pas changer ses habitudes, le chara design du bestiaire déborde toujours autant de gigantisme.

Dancing with the devil

Une philosophie également ancrée dans le gameplay, Bayonetta 3 étant un pur cocktail d'adrénaline et de dopamine. Ses prédécesseurs avaient mis la barre très haute en s’imposant comme la référence du beat'em up japonais et il semblait difficile de surpasser la démesure, le punch et la fluidité des batailles du second opus. C’était sans compter sur sur l’exigence quasi-maniaque de PlatinumGames lorsqu’il s’agit de se surpasser. Soyons clair, le jeu repousse encore plus loin les limites en peaufinant l’un des meilleurs systèmes de combat jamais mis au point pour un titre de cette trempe. Bayonetta 3 parvient à offrir une sensation familière et fraîche à la fois grâce à un système de combat  du second volet (déjà bien perfectionné) plus raffiné, fluide, impressionnant, frénétique et virevoltant que jamais.

On retrouve donc ce fameux système de combos flexible et riche à la fois, centré autour d'esquives capable de tordre l'espace-temps, permettant toutes les folies pendant un court instant. La Sorcière a cependant trouvé un nouveau moyen redoutable pour dézinguer ses pauvres adversaires : invoquer et contrôler ses créatures à tout moment au moyen d’une jauge dédiée qui limite les abus. Les démons assurent le spectacle en nous livrant des combats encore plus gigantesques pendant que l’héroïne, vulnérable aux assauts, assure le show en dansant à moitié nue au milieu de ce foutoir. Ça ne s’invente pas. De quoi livrer des combos encore plus fous et impressionnants qu’à l’accoutumée, d’autant qu’il est possible de changer de bête, d’une simple touche, pour varier les plaisirs. 

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La Danse de la Soumission

On ne va pas se mentir, ça peut être un joyeux bordel à l’écran et les combats peuvent parfois perdre en lisibilité. Mais voir tous ces monstres plus démesurés les uns que les autres se mettent sur la tronche, c’est franchement jouissif et du pur délire comme on aime. La sorcière de l'Umbra renouvelle également ses tours de passe-passe en abandonnant ses flingues aux pieds pour basculer à la volée entre deux set d’armes obtenus au cours de ses péripéties. Tantôt plus lents mais plus dévastateurs, parfois plus vifs et frénétiques, ces nouveaux équipements apportent une toute nouvelle dynamique au jeu en permettant encore plus de dingueries. Les possibilités sont folles et ne font que croître  au fil des chapitres, où de nouvelles armes et démons viennent constamment insuffler un nouveau souffle au gameplay, avec des enchaînements et des techniques toujours plus percutantes et maboules. Ça se renouvelle constamment et dès que vous osez penser que Bayonetta peut perdre un tant soi peu de son souffle, PlatinumGames trouve la parade : un nouveau personnage jouable.  

She was a punk, she did ballet...

Pour compenser, Bayonetta 3 peut s’appuyer sur une nouvelle héroïne au look punk et à la prise en main sensiblement différente de la brunette à lunettes. Viola se bat en effet à l’aide d’un katana, de fléchettes magiques et d’un seul démon : Chouchou. Une autre façon de jouer sans s’éloigner des fondamentaux, qui force tout de même à changer ses habitudes. Un temps d’adaptation sera clairement nécessaire avant de s’habituer au gameplay de l’apprentie-sorcière qui a décidé de ne pas complètement se calquer sur son mentor. Contrairement à elle, Viola peut combattre en même temps que son familier mais à mains nues. La créature fait sa vie, tandis que l’on peut enchaîner des attaques moins puissantes pour faire grimper le compteur de combos. 

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Viola, une autre facette du gameplay

La différence majeure, c’est que la capacité d’envoûtement ne s’enclenche pas de la même manière. Plus frontale, la tête brûlée demandera de faire une parade parfaite avec un timing plus serré qu’une esquive. Une différence parfois difficile à apprivoiser lors de certains combats, mais qui livre des affrontements plus techniques changeant la façon d’aborder le gameplay. Des nouveautés agréables qui sont cependant contrebalancées par le nouveau système d’équipement changeable à la volée, abandonné pour ce personnage, et qui réserve tout de même quelques surprises bien frénétiques, mais pas au niveau de son aînée. 

La liste des combos, toujours plus large, la finesse et la profondeur du gameplay, ont forcément de quoi donner le vertige, mais la licence a toujours mis un point d’honneur à combler les attentes de toutes et de tous. Du débutant qui bourrine en enchaînant les calottes et coups de talons à l’aveugle pour apprivoiser les mécaniques, aux joueurs plus rodés qui ne demandent qu’à exprimer leur skill et enchaîner les techniques les plus insoupçonnées et dévastatrices pour faire péter les meilleurs scores, Bayonetta 3 se montre particulièrement jouissif peu importe le profil.

The Witch and the Switch

Bayonetta 3 ne démérite pas cependant lorsqu’il s’éloigne du terrain beat them all. On retrouve toujours ses phases complètement barrées où l’on surfe sur des bâtiments, où il faut éviter des immeubles entiers, des créatures et autres joyeusetés improbables, des moments de vol à la limite du shoot them up ultra grisant qui mettent à contribution l’esquive, et quelques autres surprises inimaginables qu’on taira. Il y en a bien quelques unes plus faiblardes, moins précises que les autres et qui pourront faire pester sans jamais frustrer parce que tout est mis en œuvre pour ne pas entacher l’expérience.  PlatinumGames maîtrise toujours autant l’art de la mise en scène insensée et spectaculaire qui permet au rythme du jeu de ne jamais être pris en défaut même dans ses temps morts et ses phases d’exploration où l’on ne se sent jamais délaissé. On se plaît à se perdre dans ses environnements jolis, variés et plus ouverts que le second opus. Nos balades sont toujours récompensées d’un collectible, un puzzle, un objet pour améliorer nos sorcières, un défi annexe plus corsé ou même des petits animaux qui peuvent déboucher sur une autre surprise.

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C’est sans doute le maître-mot de Bayonetta 3 : la surprise. Jamais on n’a l’occasion de s'interroger sur la redondance des situations tant chaque combat peut réserver son lot d'inattendus. Quand bien même vous pensez avoir terminé, voilà que le jeu vous propose d’autres choses à vous mettre sous la dent au cas où la quasi-vingtaine d’heures nécessaire pour terminer l’histoire principale ne vous a pas rassasié. Sur le plan technique aussi, le jeu surprend par moments. Rarement le framerate à 60 fps n’est mis à défaut, même lorsqu’il y a une débauche d’effets et de monstres aux tailles improbables sous nos yeux. En revanche, graphiquement c’est une autre paire de manches, surtout en mode docké où l’aliasing et le clipping sont omniprésents et où certaines cinématiques bordéliques peuvent même, exceptionnellement, finir en bouillie de pixels. 

En nomade, Bayonetta 3 s’en sort mieux grâce à des textures plus nettes, des décors qui bavent moins. C’est en revanche parfois au détriment d’une lisibilité plus compliquée tant ça peut être l’orgie à l’écran. D’autant que la caméra a parfois tendance à se faire la malle quand trop de créatures immenses sont dans la même arène. Oui, les graphismes manquent de finesse, c'est parfois bien moche, les zones urbaines ne sont pas jolies par moments et on sent que la Switch est poussée dans ses retranchements. Elle a cependant juste ce qu’il faut pour nous éblouir tant le jeu et sa direction artistique toujours aussi singulière bluffent par tellement d’autres aspects qu’on oublie vite ces vilains défauts.

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