Clair Obscur est l’une des sensations de l’année 2025, c’est désormais une certitude. Tout le monde, ou presque, l’avait pressenti lors de sa toute première présentation. De sa direction artistique créative à ses choix de gameplay racés en passant par son OST qui a déjà atterri dans un grand nombre de playlists Spotify, Clair Obscur a séduit son audience avec trois fois rien. Un sentiment qui s’est par la suite confirmé de notre côté après une première rencontre en tête à tête hyper agréable. Qu’on se le dise, c’était une petite claque. Alors quand le jeu complet m’est arrivé entre les mains, c’est avec le palpitant, mais aussi pas mal d'appréhension, que j’ai plongé la tête la première. Il y a toujours un petit a priori lorsque l’on se lance sur une œuvre complète de ce calibre. Ni AAA, ni vraiment un jeu indépendant, Clair Obscur est un entre-deux qui dégouline d’amour. Seulement parfois, les bonnes idées et le talent ne font malheureusement pas tout et les productions telles que celle-ci ont vite fait de se laisser dépasser par les évènements. Ne pas se faire déborder par ses propres ambitions, voilà tout l'enjeu de ce Clair Obscur. Malheureusement, l’Expedition 33 ne sera pas de tout repos, mais malgré les écueils, des jeux comme celui-ci on en redemande à la pelle.
Clair Obscur Expedition 33 ne fera peut-être pas d'ombre aux gros RPG déjà bien ancrés, compte tenu de son statut, mais il a de très solides arguments en sa faveur. Souvent rattrapé par sa technique en dents de scie, il oscille entre la tarte monumentale et l'œuvre maladroite. Dit comme ça, ça pourrait jeter un froid, mais je vous rassure le bilan est incroyable puisque, heureusement, on ne pestera que peu de fois, à moins vraiment de le prendre pour ce qu’il n’est pas : un concurrent direct de Final Fantasy, Persona ou autres grands RPG et JRPG du genre. Il s’en inspire, oui. Il en est un cousin ou une lettre d’amour ouverte au genre. Ça, c’est certain, mais le studio montpelliérain ne bataille pas dans la même cour, il n’en a pas vraiment cette prétention de toute manière, quoi que...
Ne pas se faire dépasser par ses propres ambitions, vous vous en souvenez ? Comment éviter cela lorsqu’on a des développeurs vétérans issus de très grosses structures au sein du studio, ou que l’on a un casting d’actrices et acteurs voix, en français comme en anglais, à faire pâlir plus d’une production AAA ? Comment ne pas perdre la tête quand les droits d’une adaptation cinématographique se sont déjà vendus alors que le jeu n’était même pas terminé. Il y aurait eu un « coup de cœur » à la simple lecture du synopsis et l’aperçu de quelques éléments artistiques. Oui, Clair Obscur Expedition 33 est un jeu ambitieux, très ambitieux et parfois un poil trop peut-être. On peut le dire, il porte allégrement bien son nom, tout en contraste, mais loin d’être monochrome.
Clair-Obscur, trouble de rature
On note vraiment une volonté de bien faire, un amour pour le dixième art qu’est le jeu vidéo, mais plus que ça encore. Son histoire, par exemple, est d’une puissance rare. Entre le conte onirique et la fable gothique, Clair Obscur nous embarque dans un univers fracturé, au sens propre du terme. Les habitants de Lumière, une ville aux airs d’un Paris d’antan post-apocalyptique, sont les rares survivants d’une terrible malédiction. Au loin, au-delà d’un océan brisé, se dresse un monolithe titanesque. À ses pieds, le visage fermé entre les genoux, une peintresse. Une immense femme pâle, les cheveux tombants sur les jambes, qui ne se lève qu’une fois chaque année pour peindre un nombre sur sa pierre maléfique condamnant par la même occasion tous ceux ayant le même âge. Un véritable génocide annuel, n’ayons pas peur des mots, qui dure depuis plusieurs dizaines d’années lorsque le jeu démarre. Nous suivons alors plusieurs personnages tentant une ultime expédition aux confins du monde dans le seul but d’arrêter cette peintresse. L’expédition 33, composée principalement d’hommes et de femmes n’ayant plus qu’une année à vivre et de quelques volontaires plus jeunes.
Clair Obscur Expedition 33 ne fait pas dans la dentelle. Sa trame nous obligera à affronter des situations particulièrement tristes et intenses, et ce, dès la scène d’ouverture. On sent dans l’écriture et la narration que tout a été fait avec soin, avec les tripes. Les personnages principaux et leurs liens sont évidemment les plus travaillés. Les seconds couteaux auront eux aussi leur mot à dire, mais on note clairement un nivellement vers le bas lorsqu’il s’agit d’explorer leur personnalité ou au contraire l’absence totale de soin à leur égard. Ce n’est pas vraiment un point noir dans le sens où le jeu gagne à ne pas trop s’éparpiller, mais lorsqu’on propose un univers aussi enivrant et passionnant, quelques à-côtés n’auraient pas été de trop. On restera donc globalement sur notre faim, quand bien même quelques options de dialogue ou des fichiers audio à trouver ça et là nous permettront d’approfondir l’univers. Un codex est également disponible pour qui veut s’y plonger davantage, mais on a connu plus consistant de ce côté-là.

Des personnages attachants incarnés par un casting 5 étoiles qui donne tout ce qu’il a
Heureusement, ce qu’on nous met sous le nez est du caviar. Les personnages principaux, qu’on les aime ou non, ont tous une vraie personnalité, des liens qui les unissent ou les divisent. On s’y attache relativement facilement, d’autant que leurs bouilles auront vite fait d’achever les réticences des plus septiques. Parmi tous les personnages jouables, il y en aura forcément un ou une qui sortira du lot à vos yeux. On développe une certaine empathie et c’est tant mieux. Un développement plus approfondi de ces derniers aurait peut-être été un plus appréciable, quand bien même on pourra discuter avec eux régulièrement, notamment dans notre campement à l'instar de Baldur's Gate 3. Il ne souhaite pas nous perdre et préfère raconter son histoire, que l’on puisse la vivre. Il y a de quoi être désarçonné de prime abord à une époque où les jeux tendent à se perdre dans de longues tirades, des open world à n'en plus finir et tout un tas de choses secondaires parfois anecdotiques. Clair Obscur prend le contre-pied et choisit d’être plus linéaire aussi bien dans sa structure que dans sa narration.
Fort heureusement, c’est un réel plaisir à suivre, non seulement parce que son univers et son écriture passionnent, mais aussi et surtout parce que le jeu des actrices et acteurs est plus que surprenant. Tous, ou en tout cas la grande majorité, semblent totalement incarnés. Les dialogues sont naturels la plupart du temps, bien que le ton ne soit pas toujours juste avec la scène (mais je chipote là), et surtout ils sont vraiment bien mis en scène. Un détail qui fait toute la différence selon moi : lorsqu'ils se coupent la parole, ils le font VRAIMENT, sans temps mort entre les deux. Lorsqu’ils se répondent, c’est parfois au tac au tac, selon l’émotion. C’est là que l’on se rend compte qu’il y a un réel travail non seulement d’acting, mais aussi de montage et de mise en scène. Un régal.

Et que dire de ce casting dont on préfère ne pas compter les étoiles. En France, on retrouvera notamment Adeline Chetail (Zelda, Ellie dans The Last of Us), Alexandre Gillet (voix de Chris Evans, Elijah Wood ou encore Ryan Gosling), Céline Melloul (Robin dans One Piece, Aerith dans FF7 Rebirth), ou encore Bruno Magne (Durlin God of War Ragnarok), pour ne citer qu’eux. Pas une fausse note, un casting qui fait rêver. Même chose du côté de la version anglaise d’ailleurs avec, à la louche, Charlie Cox (Daredevil), Andy Serkis (Le Seigneur des Anneaux, La Planète des Singes, Black Panther), Jennifer English (Baldur’s Gate 3), Ben Starr (Final Fantasy 16), ou encore Kirsty Rider (Sandman). Inutile ici aussi de dire que ça envoie du très très lourd et le résultat est largement à la hauteur de toutes les espérances. Clair Obscur Expedition 33 est un délice à suivre, il n’y a pas à dire, on s’imagine facilement s’y perdre à l’occasion d’une série ou d’un long métrage.
Ça tombe bien, c’est sur les rails justement. En attendant, on profite de ce que le jeu nous propose. Les cinématiques sont très réussies, souvent hyper efficaces, certaines sont même absolument sublimes pour ne pas dire marquantes, et quelques passages pourront même vous prendre aux tripes. Le jeu d’acteur et la mise en scène jouent évidemment beaucoup là encore, mais la dramaturgie de plusieurs événements n’y est pas étrangère également. Je vous l’ai dit, Clair Obscur ne fait parfois pas de cadeaux, c’est une trame sombre qui sait savoir être légère, mais peut aussi se montrer violente. Un petit bémol toutefois sur les cutscenes utilisant le moteur du jeu ou lors des conversations anodines entre les personnages directement en jeu. Ici, le titre montre ses faiblesses avec une certaine raideur dans les animations du corps et du visage, une gestuelle pas franchement naturelle ou encore beaucoup trop de champ-contrechamps. C’est dans ces situations que l’on se rend compte que Clair Obscur en a sous le capot, mais n’a pas totalement les capacités de développer tout son potentiel.

Clair Obscur est extrêmement généreux
Ce sera la même chose côté gameplay, puisqu’à vouloir viser la lune, le jeu frôle la perte de contrôle. Il s’en sort de justesse pour la simple et bonne raison que rien n’est laissé au hasard et qu’il y a une vraie volonté de diversifier le gameplay, malgré la redondance du tour par tour. On peut même parler de petite révolution en un sens.
On l’a vu lors des présentations et durant notre première prise en main, Clair Obscur opte pour des affrontements stratégiques au tour par tour saupoudrés d’un gros zeste d’action en temps réel. En jeu, cela se traduit par des tours d’action agrémentés de QTE à placer avec le bon timing pour effectuer des tirs de précision ou des coups critiques, puis d’un tour de défense où l’on pourra éviter de prendre des dégâts en parant, en esquivant ou encore en sautant. Simple, mais terriblement efficace et savamment mis en place. Là où l’on pourrait croire que d’appuyer sur la même touche à des timings précis pourrait être une autre forme de redondance qui serait venue faire une surcouche sur la routine du tour par tour, il n’en est rien. Au contraire, c’est le piquant qui viendra rehausser la recette, nous obligeant à être sur le qui-vive constamment.
Impossible de marteler sa touche pour enchaîner les actions et passer les combats sans même regarder l’écran. On l’a tous fait sur les anciens Final Fantasy mais ici, ce serait synonyme de Game Over. Clair Obscur est plutôt exigeant par essence. En choisissant le mode Normal, il faudra bien prendre en main son gameplay et ses mécaniques pour notamment éviter de subir des dégâts et savoir quand et où frapper les ennemis. Certains auront en effet des points faibles à exploiter, comme des parties du corps à détruire en temps réel avec un tir. En Difficile, on peut même parler de souls-like au tour par tour. Le challenge est clairement au rendez-vous et c’est aussi ce qui fait tout le sel des combats.

Impossible de s’amuser à encaisser toutes les attaques, quand bien même on dépenserait tous nos points de statistique en défense et en points de vie. Nos personnages ont tous leurs forces et leurs faiblesses, une tonne de compétences diverses et de l’équipement dédié permettant là aussi de varier les plaisirs. Au départ, on se retrouvera à prendre les équipements les plus puissants sans trop regarder à l’optimisation, mais il faudra s’y mettre tôt ou tard suivant le mode de difficulté choisi.
L’armement, unique à chaque personnage, a toujours quelques statistiques maîtresses lui permettant de briller. C’est ici que les premiers pas de votre stratégie prendront forme puisqu’en fonction de ces stats vous pourrez dépenser vos points d’attribut, glanés en montant de niveau, afin d’améliorer votre puissance offensive et défensive. Ça orientera ainsi forcément votre personnage, faisant de lui un support, un combattant ou encore un tank pourquoi pas. De là, entre en jeu les compétences que l’on débloque également en montant de niveau. Il y en a plusieurs dizaines pour chaque personnage, toutes fonctionnant en symbiose parfaite avec les mécaniques de chaque héros, ce qui vous permet d’orienter votre stratégie comme bon vous semble. Enfin, des capacités passives pourront et devront être équipées : les Pictos. Ces pouvoirs offrent des bonus extrêmement importants et même capitaux pour certaines stratégies.
La petite subtilité ici c’est qu’il est possible de faire monter de niveau les Pictos en faisant des combats lorsqu'ils sont équipés. Une fois au maximum de leurs capacités, leurs bonus passifs peuvent être équipés par les autres personnages, sans avoir besoin d’assigner l'objet. Il y a évidemment un coût à cette technique qui se paye avec des points de Lumina, une ressource que l’on gagne encore en montant de niveau ou via des objets.

Non, ce n’est pas fini le gameplay a encore des chose à vous montrer
Oui, c’est extrêmement généreux et ça fait beaucoup de paramètres à digérer d’entrée de jeu, d’autant plus qu'après, chaque personnage a un gameplay différent. Lune par exemple, est une mage qui utilise différents éléments et peut charger des runes à chaque utilisation de compétence. Ces essences peuvent ensuite être consommées par d'autres capacités lui permettant alors d’activer des effets uniques. Il faut donc faire de combos et il en existe une quantité folle. Même chose pour Maëlle avec son système de Posture ou encore Gustave. Je ne parlerai pas volontairement des personnages qui n’ont été que peu présentés comme Verso ou encore Sciel, mais vous avez l’idée.
De cette grande générosité découle un gameplay plus profond qu’il n’y paraît, avec la possibilité de développer de réelles stratégies. Certains affrontements de boss corsés pourront même nécessiter de s’organiser et de réfléchir à la construction d’une équipe complémentaire dans les plus hauts niveaux de difficulté. Bien entendu, tout le monde trouvera midi à sa porte puisqu'en l’état si réfléchir à une stratégie et construire des builds ne vous plait pas, il suffira d’abaisser un tantinet la difficulté pour vous en sortir sans trop de mal, même s’il faudra toujours faire attention. Pour ma part je vous conseille vraiment de faire le jeu en normal, voire en difficile même, pour profiter pleinement de tout ce qu’il propose.
Le revers de la médaille c’est que ce trop-plein d’infos rend les menus peu digestes. Difficile de s’y retrouver, surtout lorsque l’on commence à avoir plusieurs personnages à gérer en même temps. Le style graphique très marqué et le manque de visibilité du curseur qui met les menus sélectionnés en surbrillance n’aide pas à s’y retrouver. Vraiment, ce peut être une plaie de naviguer entre les points d’attributs, les compétences et surtout les Pictos et autres Lumina. Heureusement que le jeu en vaut la chandelle, sinon ce serait beaucoup trop. Par contre pendant les combats, c’est parfait. Les actions sont lisibles, le style graphique fait encore une fois des merveilles et rappelle d’ailleurs le récent Metaphor, des créateurs de Persona 5, une vraie réussite.

Des combats intéressants avec une vraie dimension stratégique
Quoi qu’il en soit et ce, peu importe la difficulté choisie, les combats sont très intéressants et particulièrement dynamiques. La mise en scène y est une fois de plus pour beaucoup, avec une caméra qui donne beaucoup de style et rend tous les coups percutants. La bande-son nous embarque également dans son univers avec panache, et le sound design vient finir le tout en accompagnant habilement les effets visuels parfois impressionnants des compétences. À plus d’un titre, les combats de Clair Obscur sont une grande réussite et peuvent même être carrément passionnants et grisants. Par contre, il ne faut pas avoir peur de l’échec, tant il est parfois facile de mourir sur une esquive ratée ou un coup critique qui ne passe pas. Si la plupart des ennemis communs, le menu fretin, trépassera rapidement, les boss ou créatures élites poseront davantage de problèmes. Le nombre de combats à enchaîner entre deux points de contrôle peut aussi vous mettre à mal. Veiller à ses ressources telles que les potions de soins ou de résurrection est aussi primordial que le reste.
À noter que Clair Obscur empreinte un peu aux Souls en permettant de recharger les consommables et les points de vie aux checkpoint, moyennant toutefois la réapparition de tous les ennemis de la zone. C’est aussi là-bas que l’on pourra augmenter les statistiques de nos personnages, ou apprendre des compétences, bien que la gestion se fasse quant à elle à la volée. La seule ombre au tableau de cette richesse est peut-être le manque d’équipement finalement. Hormis l’arme et les compétences, il n’y a rien de plus à se mettre sous la dent. Pas d’armures ou de breloques à dénicher, rien. Les seules choses que l’on pourra faire porter à nos héros sont des cosmétiques, tantôt réussis, tantôt douteux, qui seront visibles durant les cinématiques et font office de trésors à dénicher ça et là, souvent aux côtés des Pictos, qui sont quant à eux généralement indispensables.

L'exploration est peu gratifiante, mais l'univers est incroyable à découvrir
L’exploration laissera alors un goût quelque peu amer puisqu'elle sera finalement avare en récompenses. Il y aura bien des objets à récupérer et ils seront très utiles, mais dans la mesure où ils seront peu variés, une certaine redondance s’installe. C’est d’autant plus vrai que les niveaux ne sont pas toujours très passionnants à fouiller dans les moindres recoins. Le jeu est globalement linéaire et mis à part pour venir affronter des boss extrêmement retors lors de la première rencontre, et dénicher des secrets, il n’y a pas vraiment de raison de revenir explorer un environnement déjà visité. De même que l’absence de mini-carte se fait vite ressentir. C’est une volonté du studio et on prend le jeu tel qu’il est, mais malheureusement, lorsque les galeries d’une grotte, ou les sentiers d’un océan suspendu se ressemblent, difficile de s’y retrouver.
Clair Obscur aurait clairement gagné à nous offrir une petite carte pour se repérer, quitte à ce que cette dernière ne se dévoile qu'en avançant petit à petit. Ça aurait même pu nous pousser à revenir découvrir les zones d’ombres. C’est d’autant plus dommage que la direction artistique est absolument divine. Rares sont les jeux à être aussi créatifs. Certains environnements sont si surréalistes qu’ils sont difficiles à décrire, comme cet océan incroyable déjà traversé lors de ma première prise en main. Une zone qui ne brille peut-être pas par son level design des plus classiques, mais qui reste marquant de par sa proposition artistique. Il y a plusieurs régions comme ça, qui viendront faire vibrer la fibre artistique de qui y est sensible. Là-dessus c’est un sans faute et c’est même incroyable. Clair Obscur Expedition 33 transpire la créativité, l’ingéniosité et l’amour de l’art dans son ensemble. On le ressent, mais surtout plus que tout on le voit. Que ce soient les environnements aussi intrigants et envoûtants que parfois dérangeants, ou le design des monstres que l’on affrontera, c’est du génie artistique. Là encore, chacun y trouvera son compte. Tout le monde ne sera pas aussi impressionné que j’ai pu l’être, mais le travail est palpable que l’on aime ou non.

Artistiquement absolument sublime, techniquement perfectible parfois
Seulement voilà, là aussi, le jeu en fait des caisses et frôle une fois de plus le carambolage. Graphiquement, techniquement, c’est en dents de scie. On a parfois des panoramas à s'en péter la mâchoire avec des effets de lumière absolument sublimes. Si la composition de ces tableaux est intouchable, il y a parfois, voire souvent, un abus de la luminosité, de la saturation des couleurs ou encore du flou et de l’aberration chromatique. Un trop plein, qui peut aussi être une volonté de rendre l’univers abstrait, parfois absurde, mais pour l'œil, ce n’est pas hyper agréable, voire pas du tout et il n’y a pas vraiment de réglage pour atténuer tout ça.
On touchera tout juste au gamma et à quelques effets, mais rien qui ne viendra corriger le tir. C’est vraiment la patte artistique qui viendra embellir le tout, puisque même le level design est plutôt classique. Ce n’est pas là-dessus que Clair Obscur va nous vendre du rêve. C’est assez linéaire, parfois même exiguë, et ce n’est pas toujours passionnant à explorer dès que l’effet « waouh » a disparu. Heureusement, le fait est que l’on sera souvent poussé à la contemplation. L’horizon, le ciel, les sculptures… peu importe, il y aura toujours quelque chose qui viendra nous caresser les mirettes. Mais si l’on revient les pieds sur terre deux minutes, on se rend compte que Clair Obscur tire la langue sur toute sa partie technique.

La modélisation est peut-être réussie, le design est peut-être incroyable, il n'empêche que certaines textures ne sont pas très justes. Les animations lors de l’exploration également où un étrange effet de flottement côtoie une petite raideur qui nous renvoie des années en arrière. Le AA n’est jamais bien loin, il nous rappelle constamment à l'ordre au détour d’un dialogue, ou d’un sprint lors de l’exploration. De quoi bouder son plaisir ? Certainement pas. Il serait criminel de réduire Clair Obscur qu'à ses quelques petits problèmes en occultant tout le reste de la proposition.
Clair Obscur Expedition 33 est une pépite, une lettre d'amour au jeu video
C’est le genre de jeu qui nous rappelle qu’on ne peut pas traiter et analyser une œuvre froidement puisqu’elle viendra forcément nous toucher. Clair Obscur n’a rien d’un titre commercial, c’est une proposition extrêmement généreuse qui est parfois brute de décoffrage et en fait certainement trop, mais arrive malgré tout à tenir la route tant l’ensemble est incroyable, à défaut d’être parfaitement équilibré. Il se donne toujours à fond, que ce soit dans sa trame prenante, dans sa bulle, son univers extrêmement artistique, à la fois intrigant et terrifiant, mélangeant les genres et les inspirations. Un jeu fait avec le cœur, les tripes, loin des cahiers des charges à rallonge. Ou alors le subterfuge est incroyable.
