À bout de souffle avec un GOW Ascension en demi-teinte, la franchise a pris le temps de se mettre au vert pour réfléchir à la direction à prendre, se réinventer et retrouver sa grandeur ainsi que sa gloire d'antan. Une vraie rupture qui a permis à Kratos de récupérer son trône. Et avec God of War Ragnarok, il n'est pas prêt de le perdre.

Un duo qui a mûri 

God of War Ragnarok choisit comme son aîné de nous immerger d’emblée avec un plan séquence qui débute dès que l’on lance une nouvelle partie. On retrouve un Kratos massif, à la barbe très soyeuse, mais le cœur toujours empli de tristesse par la mort de sa femme et les adieux qui ont eu lieu quelques années plus tôt. Ce drame mêlé au Fimbulvetr, l’hiver qui annonce le Ragnarök et ses conditions extrêmes, semblent aussi affecter plus que jamais le demi-dieu de la guerre. Il apparaît plus à vif. Malgré sa lourde histoire qui le hante encore, il se doit d’honorer la mémoire de sa défunte et d’être là pour son fils Atreus, de l’aider à comprendre son destin et à l’accomplir. 

Test God of War Ragnarok

Si le visage de Kratos porte tous les stigmates de son sinistre passé, notre divin chauve a depuis longtemps mis de côté toute vengeance aveugle et extrême pour éduquer son rejeton à la dure avec la part d’humanité qui subsiste en lui. Il distribue des bourre-pifs à qui veut mais avec une certaine modération. Sa sagesse se manifeste dans son comportement de père avec Atreus. Il fend plus la carapace et se montre plus à l’écoute qu’auparavant, tout en étant aussi ferme que les paluches d’un spartiate quand il le faut. 

Review God of War Ragnarok

Atreus, lui, est passé de « l’enfant tête à claques »  - mais finalement attachant - à « l’ado tête à claques » en quête d’identité. L’évolution de la relation entre les deux est donc au centre de ce périple. L’influence The Last of Us n’a pas quitté cette nouvelle aventure, bien au contraire, et Santa Monica Studio réalise ici un travail remarquable. Christopher Judge (Kratos) et Sunny Suljic (Atreus) impressionnent par leur investissement et leur talent respectif, avec un jeu plus nuancé, tout comme d’autres acteurs aux rôles clés. 

God of War Ragnarok, une fresque nordique vivante 

Vous pensez avoir tout vu dans GOW (2018) au point de le hisser au rang de meilleur épisode de la série ? Détrompez-vous, vous êtes très loin du compte. Il est extrêmement difficile pour nous d’en parler sans entrer dans les détails, sans spoiler, mais c’est ce qu’on va s’évertuer à faire car on ne veut aucunement ruiner les nombreuses surprises et ne pas vous enlever le plaisir de la découverte. Alors oui, il faut nous croire sur parole : God of War Ragnarok est une fresque nordique vivante tout bonnement époustouflante qui parfait encore la dimension narrative introduite lors de la réinvention de la saga. On passe par toutes sortes d’émotions : des poils qui se hérissent pour des raisons que nous tairons, aux rires avec les frasques et punchlines poilantes du nain Brok ou de Mimir, la tête parlante. On aurait pu même presque verser une larme durant une séquence forte magnifiquement servie par une musique qui met des frissons comme tout le reste de la bande originale d'ailleurs. Il y a de la sensibilité, de la brutalité, de la joie, bref tous les ingrédients de la nouvelle formule. 

L’enjeu principal de ce volet est bien le Ragnarök, mais les développeurs en profitent pour développer davantage leurs personnages, qui ont leurs propres histoires personnelles, y compris Kratos. En tant que fan, on se délecte indéniablement des références au passé de Kratos qui sont intercalées dans le récit de façon naturelle et mettent en relief la nouvelle personnalité de notre général grecque. Même les seconds rôles sont très soignés. Le jeu étonne aussi énormément dans la manière d’aborder ses situations. Très clairement, on ne s'attendait pas à un tel virage pour certaines séquences. Tout n’est pas forcément blanc ou noir mais gris. Les protagonistes, l’histoire et tous les éléments du titre sont mis en exergue par une mise en scène éblouissante une fois de plus. Le soft nous secoue également par son ampleur et son aisance à nous asséner un uppercut sitôt, et à maintenir le cap jusqu’à la fin avec des scènes splendides. Tout y est plus brutal, viscéral, avec un rythme digne des Enfers d'Hadès. 

Un univers qui laisse bouche bée

Admirable dans son récit et les personnages qu’il dépeint, God of War Ragnarok l’est aussi dans l’orchestration de la mythologie nordique. Rien n’est laissé au hasard, et surtout pas l’éclat des environnements. Cette suite multiplie les décors somptueux que ce soit techniquement ou artistiquement. Ce n’est peut-être pas la claque PS5 attendue - des améliorations sont possibles - mais ça reste bel et bien une baffe et l’un des plus beaux jeux sur le marché. On s’est d’ailleurs arrêté plus d’une fois pour contempler les paysages. Des panoramas qu’on a visité de bon cœur comme souhaité par les développeurs. Les nouveaux royaumes à l’image de celui des nains, Svartalfheim, incite en effet à l’exploration pour plusieurs raisons. Pour profiter du voyage déjà, mais également parce que Santa Monica Studio a renforcé toute cette notion.

Car désormais, Kratos va sortir les armes mais pas que pour casser des bouches. La Hache Leviathan comme les Lames du Chaos se transforment en outils pour résoudre des puzzles environnementaux grâce à leurs propriétés. Le givre pour la première, le feu ardent pour la seconde. Rassurez-vous, aucun des casse-têtes ne vous bloquera la route et ils reposent tous sur de la simple observation pour trouver son chemin. Ces passages sont par conséquent un minimum gratifiants sans être frustrants. Geler de l’eau permettra par exemple d’ouvrir un itinéraire, lancer la Hache sur une pierre de nuit sera parfois nécessaire pour activer des interrupteurs, déployer une lame sur un point en surbrillance nous propulsera sur des hauteurs etc.

L’autre raison est de faire évoluer les personnages en se procurant des Artefacts, des objets de cartes au trésor ou en remplissant des tâches comme parer un nombre d’ennemis etc. Les missions annexes « Services » peuvent étendre le lore du jeu et des personnages qui nous accompagnent. Sans viser le 100%, on conseille d’au moins venir à bout de ces quêtes pour ne pas rater des choses en lien direct avec l’histoire principale. 

God of War Ragnarok et ses combats encore plus jouissifs

God of War Ragnarok en impose également lors de ses combats d'une puissance fantastique qui gagnent en nervosité. Là encore, la marge de progression entre les deux jeux est évidente. La vue à l’épaule et la lourdeur de Kratos sont bien présentes, mais Santa Monica Studio a définitivement fusionné l’ancienne et la nouvelle formule de la franchise. Et ça se ressent au premier coup de hache ou de lame dans les gencives de nos ennemis. Les affrontements sont nettement plus dynamiques que ce soit dans les déplacements ou au niveau de la réactivité lorsqu’on frappe avec conviction nos pauvres proies. On peut malmener plus que jamais nos adversaires dans tous les sens, jouer avec eux, avant de les finir. Cette suite est aussi plus verticale qu’avant, puisque comme dit plus haut, les Lames du Chaos peuvent être employées pour grimper partout et ainsi prendre à revers nos cibles. 

« La Mort venue du ciel », une nouvelle attaque, a été ajoutée en ce sens. Un ennemi en contrebas ? Il suffit de se précipiter et de se jeter dans le vide pour taper le gibier qui nous attend. Le système de combat est clairement jubilatoire et les rixes se finissent souvent avec des têtes décapitées, des corps arrachés en deux et autres finish bien violents. Oui, le gore est de retour ! Sans verser dans la démesure (quoique…) des anciens jeux, God of War Ragnarok parvient à faire dans l’excès avec des rivaux à taille humaine. La mise en scène grandiose fait le reste et nous donne l’illusion de combats titanesques. 

Cet épisode insère également une mécanique dite de « Capacités signatures d’armes » pour infuser nos instruments de mort avec de la glace ou du feu. Avant, on pouvait par exemple charger une attaque Lames du Chaos en faisant tournoyer l’une d’elles, mais c’était une compétence à part entière. Là, c’est disponible directement en maintenant la touche qui permet de rappeler la Hache. Outre le spectacle pyrotechnique, cela augmente les dégâts réalisés. La palette défensive de Kratos est aussi plus développée avec différents types de boucliers dont le Gardien, repris du dernier jeu, afin de pourfendre la garde adverse. À cela s’ajoute l’Intrépide qui récompense les parades risquées, l’Offensif pour charger ses ennemis et l'Étoile brisée pour repousser les adversaires avec un coup puissant. Et Atreus ? Il reste là à regarder son papounet cogner des bêtes plus grosses que lui ? Non, il prendra encore des initiatives automatiquement ou si on le sollicite. Ses flèches soniques et sagillaires fournissent des effets supplémentaires à nos assauts. Une attaque de feu ? La flèche sagillaire provoquera une explosion élémentaire. 

Les attaques runiques (L1 + Rond) sont là mais la Rage de spartiate a évolué avec trois types d’actions : Fureur (pour blesser en récupérant un peu de santé), Bravoure (uniquement pour se soigner) et Courroux (pour des dommages considérables). Autant d’ajouts/de remaniements qui rendent les combats plus profonds, stratégiques et encore une fois, dynamiques. Quant au bestiaire assez critiqué dans le précédent volet, ce n'est plus qu'un lointain souvenir. Les ennemis sont très variés de base et on en croise toujours de nouveaux, du menu fretin comme des mid-boss et boss, qui font mal, très mal.

C'est un fait, et on le voit dès les premiers combats, GOW Ragnarok est plus exigeant avec une difficulté plus relevée, même en normal. Le jeu attend du joueur qu'il exploite l'étendue des possibilités de gameplay et qu'il ne martèle pas simplement une attaque identique en boucle. Frustrant ? Non parce qu'il y a un équilibre avec de nombreux checkpoints. En revanche, et on insiste là dessus, sur les modes de difficulté les plus hauts, ce sera peut-être une autre histoire... Les rixes sont aussi plus immersives avec les fonctionnalités de la DualSense. Ce n'est pas la meilleure implémentation qui nous ait été donné de voir mais cela procurer des sensations plus raffinées.

Don’t be sorry, be better

On aurait encore des choses à dire sur les nouveautés… mais chut ! Un rapide point s'impose tout de même sur toute la dimension action-RPG de God of War Ragnarok. On a ainsi un mélange de rebrandring et de nouveautés. Les reliques qui octroient des pouvoirs spéciaux comme la régénération partielle de la vie sont devenues des talismans. L’arbre de compétences est divisé en trois catégories qui sont Technique, À distance et Corps à corps. Comme précédemment, on peut débloquer des capacités en dépensant de l’expérience. Les Stats de Force, Défense, Pouvoir Runique, Vitalité et Chance s’améliorent avec des équipements d’armures (protection de torse, des avant-bras et de la taille) ou des accessoires d’armes. Des enchantements contribuent aussi à amplifier certains aspects comme les dégâts de toutes attaques à distance. La nouveauté se situe plutôt du côté des modificateurs de compétences. Des modules qui agissent sur les aptitudes. 

Dans God of War Ragnarok, plus on utilise un coup, plus celui-ci peut se renforcer jusqu’à débloquer un emplacement pour y greffer un modificateur de compétence tel qu'« Élément » qui intensifie les dégâts d’effets de feu ou de glace, « Momentum » qui augmente la charge de givre et d’immolation etc. Des suppléments qui font le job et assurent surtout continuellement le spectacle. Si Kratos et Atreus peuvent s'améliorer, Santa Monica Studio également. Les développeurs ont par conséquent voulu rendre une copie proche de la perfection qui puisse être approchée par le plus grand nombre. Et ils ont imité leurs petits copains de Naughty Dog avec The Last of Us 2 sur la question de l'accessibilité. Avec plus de 60 options qui traitent divers problèmes liés à la vision, à l'audition, aux capacités motrices et aux fonctions cognitives, Ragnarok est un modèle du genre pour les personnes handicapées.