En parlant de somme, le héros en pique souvent un. Il s'appelle Bob et il est narcoleptique. Comprenez qu'il a une fâcheuse tendance à s'endormir à n'importe quel moment. Et n'importe où. Durant ses rêves, il erre tel un robot dans un monde qui semble puiser sa source dans les cerveaux fiévreux de Dali, Escher, Lynch, les Monty Python et n'est pas sans faire penser à celui d'un jeu période Amiga/Atari St intitulé Weird Dreams. Les lieux ressemblent à des tableaux surréalistes, un peu fous, cernés par le vide, surplombés d'un oeil réprobateur, où les perspectives semblent faussées, où des coquillages et des tiroirs dont sortent des cravates tapissent les murs, ou un train-baleine fonce à toute berzingue... Aussi étrange qu'inquiétant. Surtout que notre bon Bob pourrait y rester prisonnier pour toujours si son subconscient, un étrange quadrupède ayant conservé son visage, ne veillait pas au grain.

Et inconscient et subconscient...

L'idée de ce puzzle game en 3D isométrique à l'univers singulier et ravissant est d'incarner ce subconscient pour qu'il guide "son" corps, condamné à aller droit devant lui et à tourner à 90° dans le sens des aiguilles d'une montre en cas d'obstacle, vers un lieu sûr, son lit. Pour contrôler son cheminement, il devra, la plupart du temps, placer des pommes géantes qui joueront leur rôle de barrage. A quoi s'ajouteront parfois des poissons pouvant faire office de pont entre deux rives, avec la subtilité des illusions d'optique à prendre en compte. Les pièges pouvant faire varier la route sont nombreux, entre des chiens ou des réveils effectuant leur ronde, des bouches (pleines de rouge à lèvres) d'aération soufflant bien fort ou encore des peintures faisant office de téléporteurs. Bob peut même tomber dans le vide... mais rien de pénalisant. Il réapparaît immédiatement là où sa course avait commencé.

...Et deux conscients et subconscient

Ce sont d'abord trente niveaux, répartis en deux mondes quand même assez identiques visuellement, qui se présentent et nous amènent à nous gratter légèrement la tête. Mais peut-être pas assez. Le déclic, ce moment où la solution surgit dans notre esprit, ne prend jamais beaucoup de temps, ne provoque jamais l'extase. Peut-être parce qu'on ne se sent jamais vraiment puni. Et que cela reste assez simple. Il faut attendre le mode Cauchemar, qui reprend le même principe en y ajoutant l'obligation de collecter une ou plusieurs clé, pour réellement se creuser la tête. Plus encore, cela se joue parfois dans un timing serré. Il faut bouger très vite pour placer le bon objet au bon moment, le reprendre et vite le replacer ailleurs. Chose qu'il est très pénible de réaliser précisément à la souris. Une manette est conseillée, pas pour rien.

En définitive, le jeu de Bedtime Digital Games n'a pas de quoi nous faire roupiller. Plutôt agréable et bien conçu, il bénéficie d'un prix qui ne constitue en aucun cas un frein : 5,49 euros - 4,66 jusqu'au 13 août -, même si l'on reste clairement sur sa fin une fois les 60 niveaux parcourus. On serait bien resté plus longtemps dans ce cauchemar qui, s'il manque parfois de sel, a quelques idées à faire valoir.