Deadly Promition. Red Seeds Profile. L'enquête à forcément laissé des traces chez tous les joueurs. Que ce soit à cause des horribles phases en voiture, ou des délicieuses conversations sur le cinéma qui les ponctuaient. L'expérience, unique et si clivante, mérite amplement son statut de culte, entre le nanar et le génie. Dix ans plus tard, il a droit à une suite, et c'est sur Nintendo Switch que ça se passe. Et une question brûle probablement toutes les lèvres : la magie opère-t-elle toujours ?

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Si vous voulez conserver toute la saveur de l'intrigue que Deadly Premonition 2 sans le moindre tout petit spoiler, sachez que franchement, c'est pas mal. Zach a le même doubleur (Jeff Kramer. le jeu bénéficie de voix anglaises de très bonne facture et de textes en français), le tout est un peu plus grand-guignolesque que le premier, bien moins dense, mais dans la même veine. Poursuivez votre lecture à partir de l'intertitre suivant et ne regardez pas trop les screenshots. Et si vous en voulez plus, comme dans une série télé, l'histoire de Deadly Premonition 2 va suivre deux temporalités différentes, au passé et au présent. En 2019, c'est l'agent spécial Aaliyah Davis qui se rend au domicile d'un certain Francis Zach Morgan, totalement décrépi depuis sa dernière enquête à Greenvale et sa retraite anticipée. C'est elle qui va mener l'interogatoire et poser les questions : un cadavre vient d'être retrouvé. Une femme coupée en morceaux, et piégée dans la glace, tel un Shiryu dans la maison de la Balance. Vieux de 14 ans, le bloc de glace avait disparu dans une affaire menée par l'agent special du F.B.I Francis York Morgan à Le Carré, une paisible bourgade de la Nouvelle Orléans, en 2005.

Mais ne comptez pas contrôler Aaliyah trop longtemps : la majeure partie du jeu va se dérouler à Le Carré, justement, via les souvenirs de Morgan lors de cet interrogatoire. Avant Greenvale, il avait déjà eu affaire avec les graines rouges, et c'est cette histoire-là qui va meubler Deadly Preminition 2. Il utilise toujours des méthodes de travail totalement délirantes avec son profilage métapsychique, et cette fois-ci, ce n'est pas dans la café mais via un oracle vaudou, qui apparaît dans toutes sortes de reflets, qu'il va suivre les pistes qui vont le mener à la résolution, toujours très efficace, de son enquête. L'occasion de croiser une galerie de personnages hauts en couleurs, mais il faut bien le dire, moins nombreux que dans le premier. La Famille Clarkson, qui règne sur la ville depuis des générations, est secouée par un meurtre rituel, et le tragique n'est jamais très loin. Mais là où le premier Deadly Premonition était très généreux en termes de contenu, ici, c'est bien plus léger. Trop peu pour développer une histoire aussi riche que son illustre aîné. Plus courte que l'enquête de Greenvale, à Le Carré les enjeux montent très vite, la conclusion est satisfaisante, reboucle certains mystères du premier épisode, et reste même ouverte à une suite. Peut-être sous forme de DLC ? Qui sait, maintenant que Deadly Premonition a eu droit à son second épisode. Mais après tout, pas sûr qu'on en redemande...

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En effet, si l'ambiance fait toujours mouche, et que le Bayou est un formidable terrain pour une enquête sur des meurtres rituels, quelques détails vont commencer à venir chatouiller notre patience. Si les discussions sur le cinéma sont toujours là, elles sont bien moins nombreuses et se répètent inlassablement. Au vu du format du jeu, plus court, on est moins bien servis. La narration est pourtant toujours très présente, le jeu est très bavard et pour le coup, on en redemande. Parlons aussi des musiques. Les quelques thèmes du premier, qui reviennent rarement, très rarement, nous font regretter le nouvel habillage sonore, un peu trop lisse. Aussi, oubliez les fastidieuses phases en voiture, et dites bonjour à votre nouveau... skateboard. Oui oui. Si on avait voulu faire pire, on n'aurait pas pu. On dit que la vérité ne sourira qu'aux braves, mais sachez que ce n'est pas fini.

Deadly Premonition 2 reprend le système de monde ouvert du premier, à la Shenmue, avec une petite ville de PNJ automates régis par une routine et des horaires. On peut faire passer le temps en dormant ou en fumant. Vous devez gérer votre emploi du temps, surtout pour ne pas louper cet objet de quête fedex principale - le jeu ne s'en cache même pas - disponible uniquement le lundi, tout en faisant attention à votre barbe et vos jauges de faim, de sommeil et de saleté, ainsi qu'aux monstres qui rodent la nuit. Si ce n'était que cela. Au cours de votre périple, vous aurez affaire à des objectifs de quêtes buggés et pas clair. Comme cette mission principale qui nous demandait de trouver X items dans le parc, sans nous dire ou se trouvait ledit parc, ni sur la carte, ni sur la boussole. Il a fallu de la chance, et ruser. Sans soluce, c'est à s'arracher les cheveux. Il faut vraiment avoir envie d'en voir le bout. Quelques quêtes annexes viendront jalonner votre parcours, ainsi que des mini-jeux à base de skate, de bowling ou de ricochets. Cela nous a pris quinze heures pour en voir le bout, avec quelques missions secondaires, perte du parc incluse, l'occasion de visiter trois donjons seulement, très linéaires, avec uniquement du combat.

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Cette suite est donc pour l'instant un retour en arrière sur à peu près tous les points, gameplay inclus. Un comble ! Quelques bonnes idées font tout de même leur apparition. Notamment les phases d'enquête, qui semblent tout droit venir de l'enfant maudit de Swery, D4 : Dark Dreams Don't Die : on observe les différentes parties de la pièce pour avancer, ce qui donne un aspect plutôt fluide à la narration. Mais c'est à peu près tout. Exit les séances de "profilage" avec vignettes à replacer comme dans le premier épisode. À la place, une séquence beaucoup plus scriptée à base de fantômes bleus rémanents, un classique de tout pseudo-jeu d'enquête qui se respecte, qui révèlent au héros tous les tenants et aboutissants de l'affaire, identité du meurtrier et des complices inclus. Je vous parlais du faible nombre de "donjons", sachez que le bestiaire n'est pas très fou lui non plus, et que le Raincoat Killer manque cruellement. Non, franchement, Deadly Premonition 2 se paye le luxe de faire plus court, et surtout d'être encore plus mal taillé qu'un jeu qui l'était déjà énormément.

L'original et sa suite resteront néanmoins égaux sur un point : la technique, tout sauf flamboyante. Ne vous y trompez pas, ce n'est pas parce que le jeu s'ouvre sur un générique à la James Bond qu'il va rompre avec les traditions de la saga, qui avait réussi à faire émerger une version Director's Cut du premier épisode sur PS3 qui était pire que l'originale sur 360. Au programme, que ce soit en docké ou en mode nomade, clairement, c'est plus beau. Les personnages sont convaincants, les arbres ressemblent à des arbres et le design global fait un peu penser a celui du regretté D4. Rassurez-vous, les problèmes sont toujours légion : bug du HUD, qui fait disparaître des boutons d'action, la synchronisation labiale est risible, les commandes de combat freezent environ... à chaque donjon (sauvegardez régulièrement), la profondeur de champ est terriblement réduite et le décor apparaît au loin comme par magie, l'aliasing est bien présent et le framerate, souvent inférieur à 30 fps, est parfois proche des 5 si on joue depuis longtemps... Il faudra vraiment avoir envie de voir le bout de l'histoire pour s'infliger tout cela.