Le héros - ou l'héroïne, puisque l'on vous donne le choix - de The Pedestrian, vous le connaissez bien. Vous avez dû le voir des milliers de fois sans lui prêter la moindre attention. Juste pris notes de ses fonctions en temps utile. Il vous informe de la présence de toilettes, se pare de son plus beau vert pour vous dire quand traverser, vous prévient de la présence d'humains susceptibles de franchir la chaussée... Ce petit bonhomme uniforme a peut-être une vie cachée que l'on ignore, tel un jouet de Toy Story. Pourquoi ne serait-il pas lui aussi au coeur d'une grande aventure ? Voilà le point de départ de ce titre très, très à part.

If you make sure you're connected ♫

The Pedestrian prend la forme d'un jeu mélangeant plate-forme et réflexion. Sur fond d'environnements urbains qu'on assimile comme new-yorkais, tant à cause de décors qui rappellent certains quartiers de la Grande Pomme que de la prédominance de sonorités jazz dans une bande-son aussi discrète qu'apaisante, votre étrange avatar circule sur des panneaux en 2D avec la ferme intention de toujours continuer à avancer. Quelle est sa destination ? On l'ignore. Mais ce que l'on sait, c'est qu'il a besoin de notre aide. Car très vite, des obstacles lui barrent la route, comme des lasers ou des scies circulaires. Pire, l'arrangement des différents affichettes et autres écrans qu'il traverse nécessite des connexions qui ne sont pas forcément établies, et l'accès à des objets hors de portée. C'est alors à vous, observateur extérieur, d'entrer en jeu.

Il suffira d'un signe ♫

Une pression sur la touche assignée et vous visualisez la situation dans son ensemble, pendant que celui que l'on appellera "le piéton" se trouve figé. Les premières réorganisations sont simples : joindre deux échelles par-ci et deux portes par-là pour connecter des panneaux, avant de revenir au contrôle direct et avancer. Puis l'on porte ou déplace certains objets en cherchant à les mener à bon port. À mesure que l'on progresse, et avec beaucoup de malice, de nouvelles mécaniques s'intègrent, renouvelant l'intérêt, prenant ses distances avec une éventuelle sensation de "déjà-vu", et signifiant plus de complexité dans les puzzles.

Nous nous garderons de tout vous décrire et nous contenterons de dire que le choix, assumé, de l'absence de mots pour ne laisser s'exprimer que des indications éloquentes pour le plus grand nombre, bénéficie totalement au concept et à l'idée qu'il faut, à la manière de The Witness, bien observer, prendre son temps pour que l'évidence saute aux yeux. Passer par l'échec n'a rien de honteux et aide au contraire à mieux cerner le chemin à emprunter. Jamais la difficulté, croissante, ne se trouve déséquilibrée ou prise en faute, sauf peut-être dans la toute dernière section, aussi étonnante que différente et pour laquelle un petit coup de pouce n'aurait pas été de trop. Mais rien de gravissime. Juste des minutes potentiellement "perdues" sur une expédition pouvant aller de trois à dix heures de jeu, si votre cerveau a déjà surchauffé.

Ouvre-moi la porte ♫

Visuellement léché, charmant même, et baignant dans une atmosphère d'une grande délicatesse, The Pedestrian se vit en ligne droite. On parcourt ses rues embouteillées, campus, zones industrielles et autres toits éclairés de néons, une grappe de niveaux par ambiance, sans chance de rebrousser chemin. Sachant que quelques secrets, mineurs, ont été disséminés, c'est un peu dommage de ne pas laisser l'occasion d'y retourner, ou d'oublier. Mais il ne s'agit encore une fois que d'un détail. Car de toute manière, une fois embarqué dans cette étrange odyssée, on ne peut que tomber dans le panneau. Et aimer ça.