Peu bavard de nature, Kirby n'a jamais été très volubile en termes de narration, et rappelle d'emblée la simplicité de son propos avec Star Allies : Une pluie de coeurs sombres s'abat sur le Dream Land, les sempiternels vilains devenant encore plus méchants sous leur mystérieuse influence, issue de la clarté non moins obscure des étoiles. Pas besoin d'en raconter davantage sur ce scénario, introduit par l'une des rares cinématiques, HAL Laboratory se voulant ici résolument pragmatique. Cette approche se traduit par une direction artistique aux lignes claires, sans artifices, mis à part quelques effets de lumière et un soupçon de flou à l'arrière ou l'avant plan. D'où un rendu étincelant qui évoque les épisodes d'antan, à l'instar des musiques guillerettes à souhait. Sa filiation s'exprime également au travers du gameplay, puisque notre héros transformiste hérite de la possibilité de combiner les pouvoirs à l'image de Crystal Shards, et ce grâce aux renforts de compagnons comme dans Kirby's Adventure Wii. Si ce n'est qu'en l'occurrence, ses camarades se recrutent parmi les ennemis, une fois ralliés à sa cause via l'envoi d'un "coeur-ami" rempli d'affection.

Amabilités, voire plus si affinités

Autrement dit, Kirby peut toujours les absorber pour récupérer leurs aptitudes, mais ils servent alternativement de soldats spécialisés, dont d'autres joueurs ont loisir de prendre le contrôle à tout moment. Au delà d'une force de frappe plus massive, cette union permet d'associer certains pouvoirs, afin d'ajouter des propriétés élémentaires aux armes ou diverses fonctions souvent destructrices, sans limite de durée dorénavant. L'intérêt essentiel de ce travail collégial réside toutefois dans la résolution d'énigmes, synonymes de pièces de puzzles qui viennent progressivement compléter de jolis tableaux, ou d'interrupteurs pour accéder aux niveaux optionnels. L'intelligence artificielle se montre efficace durant ces opérations, parfois même trop quand nos troupes se débarrassent prestement d'une éventuelle recrue avant d'avoir l'opportunité de l'amadouer. Cette aide n'en reste pas moins précieuse, les manoeuvres coordonnées avec des ouailles en chair et en os se révélant tantôt délicates, tantôt confuses, jusqu'à perdre de vue son personnage en plein grabuge, quelquefois ponctué de ralentissements. Heureusement le challenge s'avère encore plus doux, voire mou, que d'habitude.

Garder ses ennemis près de soi

Une formule qui va dans le sens de la philosophie conviviale de Star Allies, de manière à ce que l'épopée se déroule dans la joie et la bonne humeur. En outre certains passages nécessitent un nombre minimum de membres, tels que les sympathiques sections coopératives avec des équipiers séparés, et les différents mélanges groupés inspirés de Mass Attack afin de former un pont, une roue ou un astronef lors de brillantes phases de tir. Revers de la médaille, l'élaboration du level-design en pâtit, avec une structure drastiquement linéaire, d'autant que les pouvoirs requis pour appréhender une situation sont placés quasi systématiquement à proximité. L'architecture "metroidvaniesque" d'Amazing Mirror appartient décidément au passé, la facette la plus développée de l'univers de Star Allies résidant dans la carte des mondes, sur laquelle on déambule assez librement. Dommage qu'il n'y ait pas grand chose à y faire, hormis quelques étoiles à glaner et les visites aux Palais des Rêves. Ce lieu n'est dédié qu'à l'appel à la rescousse de célébrités de la saga, un casting voué d'ailleurs à s'étoffer par le biais de mises à jour dans l'optique de profiter de leurs talents particuliers.

Une palette de pouvoirs rutilants

Car de la même façon que le mode Histoire ne dévoile ses desseins étonnamment malsains que sur le tard, avec un final à rallonge une nouvelle fois divin, les vertus de Star Allies se cachent dans l'assimilation des pouvoirs, notamment les inédits. En sus de l'éphémère festival, ceux permanents sont le bâton, l'araignée, et l'artiste en guise de clin d'oeil nostalgique. Leurs capacités s'inscrivent judicieusement dans la vision multijoueur de ce volet, qu'il s'agisse d'activer un mécanisme à distance, de faire rebondir ses compères sur la toile ou de les revigorer en dépeignant des friandises. L'un jouera ainsi le rôle de soigneur, l'autre de guerrier polyvalent, sans parler d'offensives à l'unisson aux allures de chevauchée fantastique ! Comparativement, les autres pouvoirs d'ami ont un aspect artificiel en raison de leur utilité cantonnée, à défaut d'être tous combinables entre eux dans le sillage du cru N64, ou de disposer de perspectives d'évolutions de la trempe des parchemins des Souris Attaquent. La synergie potentiellement surpuissante produite suivant la composition des escouades, superflue pour la campagne principale, s'étale donc surtout par le biais des modes annexes.

Menus mini jeux

"Tous avec ??? ! Star Allies Go !" et "l'Ultime Dilemme" consistent en de traditionnelles épreuves chronométrées, sous forme de stages réarrangés ou d'enchaînements de Boss. De véritables défis pour les amateurs de speedrun, quoique l'absence de partage des scores en ligne restreigne regrettablement leur dimension compétitive. Le panel des mini jeux se réduit à "l'As de la Hache" et la "Frappe Sidérale", qui se résument respectivement à couper des troncs d'arbre rondin par rondin (en évitant les bestioles parasites) et à jouer au baseball avec des astéroïdes pour sauver la planète. Malgré les trois niveaux de difficulté, ces activités font figure de gadgets, idem pour les bonus engendrés en cours de parties par les amiibo (plus généreux s'ils proviennent de la famille Kirby). En somme, Star Allies ne s'appesantit guère sur les à-côtés pour réussir sa mission débordante d'amour - tout spécialement à l'égard des ses fans - mais en manque manifeste d'idées. Espérons que ce bilan au demeurant émouvant augure un renouveau pour la boule de guimauve, qui a un grand coeur évidemment, mais tend à nous laisser le coeur gros, faute de se réinventer en profondeur...