Par le passé, Omega Force nous a prouvé que l'application de la recette "Warriors" ne fonctionnait pas à tous les coups : si le studio s'en sort plutôt pas mal avec les épisodes canoniques de sa saga, que ce soit dans les séries Dynasty, Samurai ou Orochi, dès lors que l'on s'attaque à un spin-off, la machine semble avoir tendance à se dérégler. Berserk, ou encore plus récemment le pourtant alléchant Warriors All-Stars, ne sont sont pas ce qu'on pourrait appeler des Musôs de qualité. Même l'aide de la Team Ninja sur WiiU Pour Hyrule Warriors, qui officie encore ici, n'avait pas déplacé les foules.

Fire Emblem, saga phare du T-RPG made in Nintendo, connue pour offrir une mort bien réelle aux personnages qui tombent lors des combats, n'en est pas à son coup d'essai niveau crossover elle non plus : Tokyo Mirage Session #FE, ou encore Super Smash Bros qui reprend une partie du casting sont des exemples assez marquants de ce qui peut être fait. Au vu des forces en présence, on est donc véritablement en droit de douter du résultat final, surtout que Fate/Extella, un autre séduisant hack'n'slash des studios Marvelous a fait son apparition sur Switch il y a peu. Mais n'ayons pas peur de répondre à cette interrogation un peu tôt dans ce test : cette fois-ci les développeurs ont pris soin de peaufiner leur bébé en y ajoutant des mécaniques de jeu propres aux deux séries, et c'est épatant !

Baston stratégique

Malgré tout, Fire Emblem Warriors reste à la base un Musô. Et si la perspective de balayer d'un simple revers de la main d'inoffensifs pantins ennemis par paquets de cinquante et la répétitivité que cela induit n'est pas ce qui vous excite le plus, nul doute que vous aurez un peu de mal à vous plaire ici. Sachez malgré tout qu'un soin tout particulier à été apporté aux phases de combats, avec des animations assez spectaculaires, que ce soit pour les attaques de bases ou les coups spéciaux. On reste donc avec des commandes assez classiques, avec deux boutons d'attaque (faible et fort) qu'il est possible de combiner pour accéder à une petite palette de coups de grâce dévastateurs, mais aussi un troisième pour lancer d'une simple pression une frappe ultime capable de vous débarrasser d'un boss et d'une centaine d'ennemis à la fois, au prix d'une jauge et d'un mouvement parfois longuet mais toujours impressionnant. L'esquive est aussi de la partie, ainsi qu'un mode éveil qui vous octroiera divers bonus de dégâts et d'armes, vous rendant la vie plus facile. On se déplace toujours sur une carte assez grande si on doit la traverser de part en part, et il sera toujours question de contrôler des secteurs et d'éliminer certaines cibles désignées. En somme, tout est très classique, mais l'ensemble fonctionne plutôt bien et se montre de qualité du côté Musô.

Mais ce sont vraiment les éléments importés de la série Fire Emblem qui vont aider la mayonnaise à prendre ! A commencer par un aspect tactique très important : si le challenge n'est pas des plus impressionnants en mode normal, vers la fin du jeu ou dans les difficultés supérieures, ce sera une tout autre histoire. Il conviendra donc de bien utiliser les fonctions stratégiques qu'offre Fire Emblem Warriors. D'abord, ll sera possible de contrôler plusieurs membres de son équipe, et de switcher de l'un à l'autre quelle que soit sa position sur le champ de bataille. Ensuite, on pourra décider de donner des ordres à ses petits camarades, pour les envoyer conquérir un fort à l'autre bout de la carte, ou terminer une mission secondaire pendant qu'on bat un autre ennemi, pour ensuite se rejoindre un peu plus loin, tout en contrôlant ce joli petit petit monde à tour de rôle dans les passages les plus sensibles. Cette gestion, bien souvent négligée dans le Musô plus classique, devient vite indispensable et on se prend au jeu des manoeuvres pour pour mettre à terre son ennemi le plus rapidement possible. Mais ce n'est pas tout. On retrouve aussi une autre composante essentielle de Fire Emblem, la notion de mort permanente de nos personnages, même si ici, il sera toujours possible de les ressusciter moyennant de grosses finances, ou même de désactiver cette difficulté pour les moins hardis.

Une double philosophie

Débarquant tout droit de Fire Emblem : Awakening, les duos sont aussi de la partie. Au lieu de déambuler librement (ou sous vos ordres) sur la carte, un combattant viendra soutenir le vôtre, lui donnera accès à des améliorations offensives et défensives, mais aussi à une attaque de soutien et à un coup ultime effectué à deux ! Les gains sont vraiment important pour le duo créé, mais en contrepartie, vous disposez d'une unité en moins sur le champ de bataille. Vos guerriers gagneront néanmoins de quoi remplir leurs jauges d'affinité, ce qui conférera des bonus supplémentaires et une petite cinématique à la fin. Le système à base de pierre feuille ciseau sur le type d'arme - l'épée est supérieure à la hache, qui est supérieure à la lance, qui est supérieure à l'épée - est lui aussi utilisé dans ce Fire Emblem Warriors . Ici cela se traduit bien évidemment par des dégâts supplémentaires ou en moins en fonction de l'arme de l'adversaire, mais aussi une capacité supérieure ou inférieure en termes de déséquilibrage et étourdissement de l'adversaire.

L'aspect RPG du titre n'est pas en reste et propose une bonne dose de préparation avec moult armes à collectionner et forger, mais aussi une emblemerie, ou vous pourrez améliorer les capacités et spéciales de vos héros, en échange des nombreux loots que vous allez récolter sur le champ de bataille. Le système de classes est lui aussi présent, avec la possibilité de promouvoir un de ses héros avec un gain statistique spectaculaire, mais aussi, l'apparition d'une nouvelle tenue dans la garde-robe du personnage concerné. Avec tous ces aspects empruntés à Fire Emblem, qu'ils soient du côté tactique ou du côté RPG avec ses nombreuses mécaniques complexes, et de solides bases en ce qui concerne le Musô, il faut bien avouer que le mariage est réussi. On prend un vrai plaisir à participer à ces joutes mi-bourrines mi-tactiques. Malgré une grande répétitivité dans les mécaniques de combat, cet aspect ajoute une vraie plus-value.

First, they meet. Then, they meet and they fight.

Si la jouabilité est donc au top, qu'en est-il des modes dans lesquels vous allez pouvoir les employer ? Le gros morceau reste bien sur le scénario, ou vous ferez la connaissance de Rowan et Lianna, deux jumeaux respectivement prince et princesse du royaume d'Aytolis, contraints de s'enfuir après l'invasion du château familial par de mystérieux monstres venants d'un autre monde. Mais fort heureusement, d'autres héros, venant eux aussi d'univers lointains, vont s'engouffrer dans la brèche et venir vous prêter main forte. Après avoir choisi qui incarner, c'est parti pour de nombreuses heures de rixes endiablées, où l'histoire se décrit à travers des phases de roman visuel et des cinématiques de série Z où le fan service est roi, une spécialité maison chez TK. Le tout dispose d'un horrible doublage anglais, mais les voix japonaises sont téléchargeables en échange de 2,5Go sur votre carte mémoire. On affrontera des hordes d'adversaires tantôt humains, tantôt monstrueux, en jouant nombre de nos héros préférés surtout tirés de Fates, Awakening et Shadow Dragon. Ces derniers débarquent souvent comme un cheveu sur la soupe, et se révèlent bien souvent des adversaires avant de se ranger à vos côtés, tels de véritables tsunedere ! Le casting de personnages jouables et certes assez fourni, avec 25 combattants, mais ce chiffre paraît assez faible, surtout quand on sait qu'un season pass comprenant 9 nouveaux personnages, des costumes et de nouvelles missions est d'ores et déjà disponible sur l'eShop de la Switch, pour 20 euros. L'addition est donc plutôt salée pour celui qui achète son jeu neuf aujourd'hui et souhaite bénéficier de l'expérience Fire Emblem Warriors complète... Néanmoins les combattants disponibles au départ sont des têtes d'affiche, tous plaisants à jouer et avec leur propre style. Les héros à cheval se révèlent assez cool à contrôler, mais on ne pourra pas en dire autant des unités volantes, imprécises au possible.

Et une fois ce mode histoire bouclé, vous aurez accès au mode Chroniques, encore une fois hybride entre un Musô et un T-RPG, ou vous pourrez revivre les plus grandes batailles des jeux Fire Emblem avec un enrobage tactique plus que délicieux, puisque fortement inspiré par ceux des RPG. Vous y déplacerez vos héros sur les mêmes cartes qu'à l'origine, avec les mêmes graphismes, en enchaînant les batailles sous forme de Musô pour avancer dans le scénario. De quoi vous occuper de nombreuses heures en plus du mode Histoire ! Avec en plus de tout ça une galerie à débloquer, il y a de quoi ne pas voir le temps passer. Et cerise sur la gâteau, grâce aux fonctionnalités de la Switch, le tout est entièrement jouable en coop locale - le jeu n'a pas de mode en ligne - sur la télé ou en mode tablette avec les deux Joy-Con, mais à condition d'avoir de très bon yeux ! Ne me reste plus qu'à vous parler chiffons avec un peu de technique. Comme dans tout Musô, les décors sont dignes de la PS2, mais les modèles 3D sont quand à eux plutôt jolis et bénéficient d'un design qui satisfera les fans de la série née en 1990. On pourra choisir de les afficher dans une résolution plus élevée ou au contraire, choisir des graphismes moins fins en échange d'un framerate montant jusqu'à 60 images par seconde. L'initiative est louable, et chacun pourra faire son choix. Comme vous avez pu le constater, ce Musô est plein de bonne intentions, et Tecmo Koei devrait s'inspirer de ce qui est fait ici pour l'avenir de sa licence...