Pour juger d'un jeu aussi copieux que Wii Party U, il convient d'abord de se pencher sur sa matière première, à savoir les mini-jeux. Ceux-ci se distinguent toujours par leur variété, du point de vue des thèmes comme des concepts. On n'ose d'ailleurs pas imaginer où les esprits déjantés du studio ND Cube sont encore allés chercher ces idées farfelues, bien que certains mini-jeux aient des airs familiers, quand ils ne se montrent pas quasiment identiques. Pour n'en citer qu'un, la "Savane en folie" ressemble beaucoup à la course hippique du précédent opus, avec les animaux de la savane à la place des canassons. Ce recyclage est semble-t-il assumé, jusqu'à le détourner quelquefois en clins d'oeil, surtout que cette continuité permet aussi de rendre ces épreuves un tantinet plus élaborées. En l'occurrence, un zèbre ne dispose pas des mêmes aptitudes qu'un rhinocéros, ce qui suppose de gérer différemment la course suivant la bestiole choisie. Les mini-jeux demeurent toutefois d'une simplicité édifiante, un bon point pour les néophytes, mais pas forcément pour les férus d'entraînement et autres adeptes du scoring, notion presque absente de Wii Party U.

Simplicité assumée

Rares sont les mini-jeux qui nécessitent une étape d'échauffement, et encore moins une séquence de démonstration. S'ils font appel à la dextérité, à la réflexion ou à la mémoire, ils ne demandent la plupart du temps que d'appuyer sur un ou deux boutons, dont éventuellement la croix de direction. Idem pour les mouvements avec la Wiimote, qui servent tantôt à viser, tantôt à effectuer des actions basiques. Ces principes rudimentaires n'empêchent cependant pas les mini-jeux d'être efficaces dans l'ensemble, exception faite d'une toute petite poignée d'entre eux résolument ratés. A l'instar du cru Wii, le hasard joue parfois un rôle trop important, comme dans la "Politique de l'autruche", où éviter de se faire débusquer par cet oiseau n'est qu'une question de chance. Faute de pouvoir s'affranchir de ces fâcheuses expériences, on a loisir de les évaluer et d'y adjoindre des messages afin de partager son ressentiment avec les autres joueurs (voire les développeurs) via le Miiverse. Heureusement, il y a davantage de mini-jeux qui sortent du lot pour leur ingéniosité, en particulier quand ils s'appuient sur le GamePad.

Fun asymétrique

La manette à écran tactile intervient tout spécialement lors des épreuves à 1 contre tous, où le gameplay asymétrique illustre une nouvelle fois ses réjouissantes possibilités, dans le sillage de Nintendo Land ou de Game & Wario. La "Fontaine aux photos" se résume ainsi à tenter de prendre des clichés des autres joueurs à l'aide du gyroscope, alors que nos chers camarades courent autour de la fontaine et se cachent derrière les jets d'eau. De même, la "Mission bac à sable" rappelle les batailles de tanks de Wii Play, aux commande d'un gros blindé mieux armé mais plus difficile à manier que ceux des adversaires équipés de Wiimotes, double stick oblige. Dans un registre plus posé, les "Dalles piégées" consistent à poser des bombes sur une série de damiers, des pièges naturellement invisibles pour les explorateurs qui essayent de traverser. Et n'oublions pas "l'Onde de voix", dans laquelle il s'agit de projeter ses amis sur un plafond électrifié en variant l'intonation de ses cordes vocales, la preuve que ces dernières peuvent devenir une arme fatale, même quand on ne s'appelle pas Lara Fabian. Ces mini-jeux focalisés sur le GamePad restent néanmoins minoritaires par rapport à ceux qui usent exclusivement des Wiimotes (14 contre 51 pour être précis). De ce fait, on apprécie que l'outil emblématique de la Wii U ait droit à un panel de "jeux sur table".

A table !

Ils sont pour la plupart jouables en solo mais se pratiquent idéalement en duo, chaque joueur se plaçant d'un côté du GamePad, positionné à plat. Aussi restreints soient les contrôles - on se sert essentiellement du stick, parfois associé à une gâchette, ou seulement de l'écran tactile - la formule fonctionne à merveille, toutes proportions gardées. Il y a même un sympathique côté vintage dans le baby-foot de poche, de même qu'avec le baseball présenté à la façon des tables cocktail dans les salles d'arcade, ou le parcours d'obstacles très proche du mythique Tricky Bille qu'ont connu les trentenaires durant leur enfance. En outre, certains de ces jeux de table se révèlent plus cossus, en s'étalant sur plusieurs niveaux et une durée plus longue. C'est notamment le cas de "Puzzle" et de "Paires animalières", des exercices qui misent également sur la coopération. Wii Party U encourage donc un peu plus l'entraide que son prédécesseur, même si le nombre de mini-jeux qui s'inscrivent dans cette philosophie reste modeste. Les parties sont encore placées sous le signe de la compétition et de la bonne humeur, en témoignent les jeux de salon. Ce mode renfermait déjà les mini-jeux les plus originaux dans le premier épisode, et Wii Party U lui emboîte logiquement le pas grâce au GamePad.

Sofa party

Certains se veulent assez physiques, comme la "Bataille de boutons" dans laquelle il faut maintenir simultanément un nombre grandissant de boutons, jusqu'à risquer une entorse du doigt. On frôle même les collisions si on exécute les figures de "Danse avec les Mii" avec trop de zèle, ou que l'on transvase trop rapidement de l'eau virtuelle entre le GamePad et le téléviseur dans le "Rallye du ruisseau". D'autant que la détection des mouvements n'est pas toujours irréprochable, une raison de plus d'apprécier le rythme relativement plus calme de la "Place cache-cache". Cette dernière consiste à retrouver le joueur muni du GamePad au sein d'un grand espace, à partir des indications qu'il transmet en regardant autour de lui. Vraiment malin, à l'image de "Talent caché" où les joueurs dessinent tour à tour un objet, si ce n'est que l'un d'entre eux reçoit un sujet différent, une pomme de terre à la place d'une éponge par exemple. Aux autres de deviner qui a hérité de l'intrus ! Ce dérivé de Pictionary constitue une excellente alternative aux jeux de société classiques, idem pour "Tête à couacs" et ses grimaces immortalisées avec la caméra, que nos chers compagnons doivent ensuite interpréter pour les lier aux expressions correspondantes.

Tous pour un, chacun pour soi

Cet aspect convivial s'exprimait particulièrement dans le mode "jeux de société" de Wii Party, au point d'en devenir le plat de résistance à long terme. Or, on ne change pas une équipe qui gagne, comme le souligne littéralement "Esprit d'équipe", une version sportive des "Trios de Mii" du premier épisode sur Wii. Même constat pour "Bouledozer" et "Carnaval Mii", respectivement très similaires à la "Roue de la chance" et au "Bingo" du précédent opus, si ce n'est la présence de pièces de costumes en guise de numéros et l'usage du Gamepad en guise de pense-bête dans ce dernier. La fameuse manette demeure en effet cantonnée au rôle de support, tel un écran secondaire pas très pratique à manipuler en parallèle des Wiimotes, avec ou sans socle. Sa fonction de lanceur de dé n'est guère plus convaincante, y compris quand elle prend plusieurs formes dans "l'Ile du Gamepad", calquée pour sa part sur "l'Ile aux défis" à l'exception de défis tactiles supplémentaires. Et le remplacement de "Globe Trotter" par les "Dés à grande vitesse", plus rapides mais fatalement moins dépaysants ne fait que renforcer cette impression de déjà vu. Plus que le hasard très douteux (pour ne pas dire la triche) qui accompagne les parties de manière à resserrer les écarts - une tendance héritée des Mario Party entre autres - on regrette que Wii Party U n'affiche pas suffisamment d'inventivité dans ces jeux de société, un mode pourtant fondamental. Par conséquent, cet épisode Wii U ne pourra pas rivaliser avec une vedette des soirées en famille du calibre de Nintendo Land, voire des WiiSports en leur temps (qui arrivent bientôt en HD sur Wii U). Mais s'il ne bénéficie ni d'une profondeur comparable, ni de la même flamme novatrice, Wii Party U s'avère tout de même très amusant dans son genre, grâce à sa simplicité et sa variété. D'ailleurs, n'était-ce pas là sa seule ambition, aussi modeste soit-elle ?