En tout cas l'aventure débute sous un magnifique ciel ocre, illuminé par les rayons du lointain Soleil d'Or. Un horizon que Matt contemple aux côtés de son père Vlad, l'un des Guerriers de Val qui avaient sauvé le monde à l'époque du premier opus, en brisant le sceau de l'Alchimie. Grand bien lui en a fait, puisque l'on peine à distinguer la moindre ride sur son visage, malgré la trentaine d'années écoulées depuis. La libération d'une telle énergie a par contre profondément transformé Weyard. En parallèle de leur développement accéléré, ces contrées ont subit de nombreuses catastrophes. Et c'est justement l'un de ces sombres vortex qui va mener Matt et ses camarades à suivre les pas de leurs aïeuls... Voilà d'ailleurs une intrigue qui ne sort pas franchement des chemins battus, même s'il convient de saluer l'effort scénaristique consenti par Camelot. Plutôt que de faire table rase du passé en se contentant de reprendre quelques éléments de la mythologie - une méthode rudement pratique pour exploiter une franchise jusqu'à la moelle - Camelot a bâti cette histoire sur les vestiges de la précédente. Revers de la médaille, il a fallu inscrire l'épopée dans une fresque à l'échelle plus massive, et pas forcément évidente à comprendre du coup. Ce n'est pourtant pas faute d'explications, chaque personnage, lieu et terme du jargon Golden Sun étant répertorié au sein d'une encyclopédie (on presse sur R dès qu'un mot inconnu apparaît). Le vice a été poussé jusqu'à raconter le déroulement des épisodes Game Boy Advance à grand renfort de détails (et d'imagination parfois).

Un héritage en or "massif"

Le malaise provient surtout du fait que l'on a du mal à situer les péripéties de nos héros par rapport à la grandeur de leur destin. Ah la destinée, tel est le mot approprié pour justifier les choix illusoires dont est ponctuée l'aventure, car cette itération a hélas également hérité de ce travers de la saga. En dépit de quatre degrés d'expressions allant de l'approbation enthousiaste au vif refus, la portée des décisions s'arrêtent à la réaction immédiate des interlocuteurs. Ils se manifestent par le biais d'un antédiluvien émoticone, puis le scénario reprend son cours, imperturbablement. Si l'on y ajoute le (quasi)mutisme du héros principal, il s'avère une fois de plus difficile de se sentir réellement concerné. Ce manque d'implication n'empêche cependant pas Golden Sun : Obscure Aurore de nous captiver, simplement en s'appuyant sur les qualités fondamentales de la série. Le dirigisme des toutes premières heures laisse ainsi progressivement la place à davantage d'exploration, qui plus est à partir de la seconde moitié de la quête. Non pas que l'univers soit immense, ni que l'on ait la possibilité de se balader partout. Il subsiste néanmoins une certaine liberté dans ces pérégrinations, souvent synonymes d'invitations à dénicher des objets rares, des invocations ou des Djinns. Et mieux vaut ne pas les ignorer ! Quelques unes de ces créatures s'avèrent en effet définitivement perdues après certains caps, trop timidement signalés peut-être. Certes il s'agit d'une excellente motivation pour rempiler, mais les joueurs pressés y verront un vilain tour, d'autant que ces éléments optionnels sont associés aux énigmes les plus ardues.

Rien de nouveau sous le soleil, ou presque...

Encore qu'à ce sujet, la majorité des puzzles se montrent assez faciles, ce qui n'enlève rien à leur ingéniosité, particulièrement dans les donjons. L'ombre de Zelda plane décidément sur ces brillants mécanismes, presque tous basés sur la Psynergie. Une partie de ces capacités ont été légèrement modifiées, tandis que d'autres sont inédites, afin d'engendrer des casse-tête flambant neufs. Et la Psynergie garde sa double vocation, intimement liée aux Djinns. Nos fameuses bestioles définissent ainsi à la fois la classe des personnages et leur arsenal de magies. Le principe de gestion des Djinns à double tranchant n'a pas non plus changé d'un iota. Utiliser leurs pouvoirs, voire effectuer une invocation revient à priver le porteur d'un très substantiel bonus sur ses aptitudes, en attendant que les Djinns reviennent à lui. Enfin les armes s'accompagnent à nouveau de techniques spéciales, de sorte que les affrontements font toujours des étincelles. Courts et relativement peu fréquents, les combats aléatoires resplendissent d'efficacité. En prime leur légendaire nervosité n'est aucunement troublée par l'intrusion des polygones, à l'image d'une réalisation de toute beauté qui fait honneur à la finesse des décors en 2D d'antan. Dommage que seulement une poignée de Boss ne demandent d'user de tout l'éventail stratégique offert par les hostilités. Aurait-on cédé à la facilité chez Camelot ? Le recyclage des thèmes de la bande son, d'excellente facture au demeurant, semblerait le confirmer. Une hypothèse vigoureusement écartée dès lors que l'on considère la structure globale de cet opus, finalement très proche du tout premier Golden Sun. Rassurez-vous, Obscure Aurore a droit à une véritable conclusion, même si elle laisse penser que ce nom n'a pas été choisi par hasard...

Indubitablement Camelot a reproduit à la lettre la formule éprouvée des épisodes GBA, et avec elle, son approche narrative vieillotte. Excepté la brillante transposition de cet univers en trois dimensions, les réelles évolutions ne se bousculent pas au portillon. Tout juste retient-on de petits ajustements pour la plupart fort appréciables, mais qui ne parviennent pas à contrebalancer le manque de personnalité émanant de la saga depuis ses débuts. Cette timidité de la part du studio a toutefois du bon, puisque l'on retrouve l'ensemble des qualités de Golden Sun, INTACTES ! Autrement dit un RPG au doux parfum du temps jadis doté de combats étincelants, d'énigmes bien fichues et d'une armée de Djinns ô combien utiles à collectionner. Le tout au sein d'une réalisation éblouissante compte tenu du support. Il ne reste plus à Camelot qu'à y insuffler davantage de caractère pour arriver jusqu'au Saint Graal...