À l'instar d'une production vidéoludique, autrement dit d'un composite d'éléments interactifs, L'Atelier du Jeu Vidéo présente deux facettes, d'une part celle visible via laquelle on joue, et d'autre part l'envers du décor où s'organisent les choses. Ces coulisses peuvent apparaître ici à tout moment d'un simple appui sur un bouton ou sur la dalle tactile, et vice-versa, de même que se modifie l'orientation de cet environnement en trois dimensions, vu ainsi latéralement ou verticalement. Il s'agit de "l'écran de programmation" qui abrite un ensemble de blocs reliés entre eux, les bien nommés Nodons (un terme découlant de "noeud"). Des protagonistes dont le look et le caractère reflètent avec beaucoup d'humour les fonctions, regroupées en quatre familles : les entrées, les milieux, les sorties, et les objets. Si cette introduction semble difficile à comprendre, c'est justement parce que l'art de programmer reste fondamentalement complexe, malgré tous les efforts pour le rendre le plus accessible possible.

Des Nodons partout, pour tout

En témoignent les leçons par lesquelles débute L'Atelier du Jeu Vidéo, réparties entre plusieurs types de jeux (plate-forme, puzzle, tir, course ou réflexion) qui se façonnent étape par étape, grâce aux conseils avisés des volubiles Bob et Alice. Cette approche un tantinet laborieuse, mais souvent drôle et fort didactique se révèle efficace, surtout avec les points de contrôle distillés au fil de la progression, des énigmes visant à vérifier l'assimilation des principes (plus retors si affinités). L'interface tactile en mode portable, mieux pensée et adaptée que les commandes aux sticks sur le téléviseur (souris USB suggérée dans ce cas), se montre formidablement intuitive, en particulier pour naviguer, zoomer, déplacer ou associer les Nodons. Leurs identités nettement marquées contribuent encore à la lisibilité des opérations, toutefois cela n'empêche pas de se retrouver face à des enchevêtrements massifs guère plus intelligibles que des lignes de code, a fortiori pour ceux qui ne rangent pas consciencieusement.

Aux coins carrés

Une habitude à prendre pour les programmeurs néophytes, et la contrepartie d'un si large éventail de possibilités. La quasi intégralité des fonctionnalités de la console est en effet exploitée, jusqu'aux détecteurs de mouvements et à la caméra infrarouge. Idem quant à la diversité des Nodons, au point d'en donner le tournis. Citons notamment l'éditeur de textures, de musiques, sans oublier le changement de jeu, qui permet d'en lier entre eux pour concevoir des projets de grande envergure, éventuellement multi joueur ! Néanmoins, L'Atelier comporte certaines restrictions, à commencer par les baisses de fréquence d'affichage lorsque moult mécanismes tournent simultanément, et ce même sans flirter avec les limites de nombres d'éléments, d'attaches, ou d'espace déjà fixées. En outre, les perspectives d'animation, en 2D comme en 3D, s'avèrent lacunaires. Enfin, le système de partage, pourtant essentiel, se cantonne à l'échange de codes. Il n'y a donc aucun portail en ligne pour lister, classer ou sélectionner les oeuvres, Nintendo misant à l'évidence sur le bouche à oreille et les réseaux sociaux, histoire de s'affranchir d'un coûteux travail de modération (les contenus inappropriés peuvent cependant être signalés). L'illustration de la philosophie de cet outil de création, à la fois modeste et ambitieux.