Yakuza Kiwami étant un remake, il reprend logiquement l'intrigue du titre qu'il recrée. En l'occurrence, le Yakuza original. Tout commence en 1995 à Tokyo. Kazuma Kiryu et son "frère"/ami d'enfance Akira Nishikiyama ont gravi les échelons dans leur clan mafieux et Kazuma s'apprête à se voir confier sa propre "famille." Mais alors que les choses se passent bien pour les deux amis, Nishiki abat un ponte yakuza qui venait de tenter de violer Yumi, jeune femme avec laquelle Kazuma et Nishiki ont grandi à l'orphelinat. Par dévotion pour son meilleur ami, qui doit également veiller sur sa soeur gravement malade, Kazuma va décider de porter le chapeau pour le meurtre. Après dix ans passés en prison à payer pour un crime qu'il n'a pas commis, Kazuma recouvre la liberté et découvre une situation et un Nishiki bien différents de ceux qu'il a laissés...

Peu de licences peuvent se targuer de raconter des histoires comme Yakuza, et plus particulièrement des histoires "réalistes" se déroulant dans le Japon moderne. Comme l'a montré l'accueil accordé par la critique et les nouveaux venus anglo-saxons à Yakuza 0, l'excellente préquelle sortie en Europe en début d'année, la popularité actuelle de la PS4 donne à la licence Yakuza une bonne occasion de se faire connaître, et reconnaître à sa juste valeur, en occident. Malheureusement, l'absence continue de traduction dans les langues européennes, dont le Français, limite nécessairement la percée de la série sur le vieux continent. Quiconque a un jour lu les commentaires d'une news en rapport avec Yakuza est tombé au moins une fois sur un débat/dialogue de sourds sur l'absence d'une traduction en Français. Mais revenons au test à proprement parler.

Quand un premier épisode devient suite de préquelle

Lors de sa sortie sur les PS2 japonaises en 2005, Yakuza était une toute nouvelle licence. Depuis, cette première aventure a eu le droit à de nombreuses suites mais aussi à une préquelle, Yakuza 0 donc. À la mise en chantier de Yakuza Kiwami, le Ryû ga Gotoku Studio a fait le choix judicieux de ne pas se contenter d'un ravalement de façade de l'épisode original. Il étoffe la narration avec, par exemple, l'aide de 30 minutes de cinématiques supplémentaires et de nouvelles quêtes annexes. Et dans certains cas, ces ajouts renvoient directement à des choses vues dans Yakuza 0. L'idée est sympathique car elle permet par exemple de prendre des nouvelles de personnages secondaires vus "17 ans" auparavant. Cela étant dit, que les joueurs qui ont manqué Yakuza 0 se rassurent. Les références à ce dernier sont expliquées de manière à ne perdre personne.

Toujours à propos des liens avec Yakuza 0, ce remake se repose sur les nouvelles bases établies dans cette préquelle. Le système de "Completion Points" (CP) qui permet de débloquer des compétences et des objets facilitant la progression en réalisant certaines actions, est par exemple repris de ce dernier. Mais ce n'est pas tout. Yakuza 0 raconte la progression de Kazuma Kiryu de jeune mafieux à légende de la pègre japonaise. Cette évolution prend en partie la forme de l'apprentissage de quatre styles de combat. Le quatrième, le style "Dragon" était réservé aux joueurs les plus obstinés. Dans Yakuza Kiwami, ces quatre styles sont utilisables d'entrée de jeu (le héros passe de l'un à l'autre à loisir), mais à leur niveau le plus faible. Comment justifier ce retour en arrière du héros en termes de compétences dans Yakuza Kiwami ? Malins, les développeurs ont pensé à tout. En effet, c'est le long séjour en prison de Kazuma qui l'a fait perdre en compétences. "Heureusement" pour lui, son brutal retour aux affaires qui va lui permettre de retrouver ses automatismes (chaque affrontement, activité ou mini-jeu permet de gagner de l'expérience qui peut être dépensée pour améliorer les capacités de Kazuma ou débloquer de nouvelles techniques de combat).

Rapport qualité-quantité-prix imbattable

Et pour ce qui est du style "Dragon," la récupération des compétences passe par le nouveau système "Majima Anywhere." Goro Majima, un des protagonistes de Yakuza 0, reprend d'une certaine manière le rôle des "Mr. Shakedown" de Yakuza 0. Tout au long de l'aventure, Majima poursuit Kazuma et peut le provoquer en duel n'importe quand (les situations sont parfois extrêmement cocasses).

Chaque victoire du héros face au "Mad Dog of Shimano" lui permet de récupérer une technique ou capacité. Au fond, le système de "Majima Anywhere" correspond presque à une longue quête annexe qui dure tout le long du jeu. Pour parler des combats en eux-mêmes, Yakuza Kiwami reprend le gameplay à la Beat 'em All de Yakuza 0 sur lequel a été ajouté "l'Essence of Kiwami," un type de "Heat Action" inédit qui peut être activé lors de certains combats de boss (et une fois les compétences nécessaires obtenues).

Pour en revenir aux quêtes et autres activités annexes, il y a, Yakuza oblige, de quoi s'occuper pendant très longtemps. En parallèle à l'histoire principale et à "Majima Anywhere," le titre de SEGA contient près de 80 quêtes annexes racontant des histoires extrêmement différentes. Tour à tour tristes, ridicules, sérieuses ou encore grotesques, ces quêtes annexes mettent en scène des personnages extrêmement différents les uns des autres, de manière à représenter tout ce qui peut se passer de bizarre, sordide ou drôle dans un quartier chaud comme Kamurochô. Quartier qui, rappelons-le, est très largement inspiré du véritable Kabukichô de Tokyo, et qui n'est jamais à court d'illuminés. En plus de tout ça, Yakuza Kiwami donne accès à moult mini-jeux que les fans de Yakuza connaissent bien (casino, cages de Baseball, bowling, bar à hôtesses, restaurants, etc.) ainsi qu'à des activités reprise ou dérivée de Yakuza 0 comme les courses de petites voitures ou "MesuKing Battle Bug Beauties," un mélange entre les catfights de Yakuza 0 (améliorés ici) et le vrai jeu d'arcade/de cartes à collectionner de SEGA Mushiking.

Début d'une histoire et fin d'un moteur

Yakuza Kiwami tourne à l'aide du même moteur que Yakuza 0 et, à l'instar de ce dernier, est sorti à la fois sur PS3 et PS4 au Japon (en Europe, seules les versions PS4 de ces deux titres sont disponibles). L'avantage de l'utilisation de ce moteur, c'est qu'il n'est pas trop gourmand sur PS4 et permet donc de faire tourner le jeu de manière à la fois nette et fluide (1080p/60 images par seconde, avec de très rares ralentissements).

Grâce à cela, les joueurs peuvent profiter du niveau de détail des environnements. Comme dans Yakuza 0, l'immersion dans Kamurochô est totale et il est possible de se surprendre à "perdre" du temps à regarder les différents commerces en activant la vue à la première personne. Et comme le titre original tournait sur PS2, le bond technique entre Yakuza et Yakuza Kiwami est conséquent. Cela étant dit, votre serviteur accueillera également avec plaisir le moteur "Dragon Engine" utilisé dans Yakuza 6 car il est toujours bon de savoir évoluer avec son temps... et car la modélisation de certains PNJ commence à montrer son âge.

Pour ce qui est de l'ambiance sonore, difficile de trouver quelque chose à redire à Yakuza Kiwami. Les comédiens historiques ont rejoué leurs dialogues (ce qui semble logique vu l'âge des enregistrements originaux et l'ajout de scènes supplémentaires) et la bande-originale est toujours d'une grande qualité. En parallèle à ces remarques sur la réalisation du jeu, il paraît également important de noter l'actualisation bienvenue du système de sauvegarde. Si les traditionnelles cabines téléphoniques sont toujours là, le joueur a également la possibilité de sauvegarder n'importe quand lorsqu'il n'est pas en mission, en passant par le menu de pause du jeu. À chaque test d'un jeu Yakuza, votre serviteur reste avec la même sensation aigre-douce. D'un côté, il y a la satisfaction et le plaisir d'avoir joué à un titre d'une grande qualité. Et de l'autre, la tristesse de savoir que seule une toute petite partie du public va en profiter elle aussi. Si le Japon vous intrigue/vous passionne, et que vous n'êtes pas totalement anglophobes, vous auriez tort de ne pas jouer à Yakuza Kiwami.