Suite à une brève intro dans le présent, nous voilà rapidement catapultés en Angleterre, en 1868. Une fois n'est pas coutume, vous incarnerez dans ce nouvel opus non pas un mais deux personnages, les jumeaux Jacob et Evie Fry. Vous ne les verrez pas devenir des Assassins, puisqu'ils sont dès le début de l'aventure rompus à l'utilisation de la lame secrète. Leur père, Maître Assassin de son état, est décédé depuis peu mais a eu le temps de bien former ses deux rejetons (fille et garçon), aux caractères très différents. Si Evie suit à la lettre le credo et les enseignements sages de son défunt père, Jacob lui, qui était semble-t-il plutôt en conflit avec son paternel, n'hésite jamais à suivre son instinct et à agir avant de réfléchir. Leur relation est l'un des points forts de ce nouvel épisode d'Assassin's Creed, car sous des atours un brin clichés au début, à force de mises en situations et de dialogues plutôt bien écrits, on apprend à connaître et à s'attacher à ces deux protagonistes. À noter que l'antagoniste n'est pas mal non plus d'ailleurs... La fort charismatique Crawford Starrick est le chef local de l'Ordre des Templiers et il règne sans partage sur Londres en contrôlant tous les pans de l'économie.

Gangs of London

Nos deux assassins, qui vivent en dehors de Londres, décident donc sur un coup de tête de partir libérer la capitale du joug des Templiers. L'objectif est clair, mais les motivations de Jacob et Evie étant souvent différentes, ils auront chacun des missions scénaristiques propres. Si Jacob excellera dans le sale boulot, celui de chasser et tuer les Templiers, Evie se concentrera plutôt sur la recherche de fragments d'Eden. Les missions annexes, elles, seront accessibles à l'un ou l'autre des personnages, selon votre préférence. Car vous pourrez à tout moment passer de l'un à l'autre, et chacun aura son arbre de compétences bien à lui afin de les développer et ainsi les équiper différemment.

La structure même du jeu et son découpage en missions est globalement le même que dans Unity, avec en plus des quêtes principales, des quêtes annexes diverses et variées (y compris celles incluant des personnages historiques comme Charles Dickens et Charles Darwin), mais il introduit également la fameuse guerre des gangs. L'idée de base reste cependant la même qu'avant, à savoir "libérer" successivement des morceaux de la ville en assassinant un Templier ou en libérant des enfants qu'on force à travailler dans des usines. Toutes ces missions sont malheureusement aussi nombreuses que répétitives. Vous aurez l'impression très rapidement de reproduire à chaque fois la même chose, et étant donné qu'il faut libérer 3 quartiers de la ville avant d'accéder aux deux dernier chapitres du jeu, on vous recommande chaudement de les exécuter au fur et à mesure... C'est moins douloureux ! D'autant que vous pouvez les panacher avec des missions annexes plus variées et plus intéressantes, notamment les enquêtes de Dickens qui viennent prolonger celles initiées par Unity.

Approches d'Assassin

Mais pour en revenir aux missions principales, là encore elles reprennent la formule Unity en concluant chaque "Séquence" (les chapitres du jeu) par une mission "Assassinat" plus complexe que les autres, et proposant différentes approches d'infiltration. Certaines d'entre-elles sont vraiment fun à jouer, un peu comme dans un Hitman, mais je dois avouer que la plupart du temps je les ai trouvées moins inspirées que celles de l'épisode parisien. L'impression de "skin d'Unity", qu'on avait eu à la vue des différentes bandes annonces diffusées depuis des mois, se confirme donc un peu.

Personnellement, j'attendais que sur les bonnes bases de ces missions Assassinat d'Unity, ce nouvel épisode aille cette fois plus loin, en multipliant les approches pour nous donner encore plus de liberté, en les rendant plus systémiques et moins "scriptées". Au final elles ne font rien de plus... Je dirai même qu'elle font moins bien.

Autre élément important à noter : c'est le premier Assassin depuis le deuxième volet à ne proposer purement et simplement aucun mode multi, qu'il soit compétitif ou coopératif. Et pourtant, on aurait adoré retrouver les missions jouables à 4 d'Assassin's Creed Unity, qui apportaient quelque chose de nouveau d'assez génial en termes de sensations.

Déplacements augmentés

Mais Assassin's Creed Syndicate n'est pas une copie carbone pour autant. S'il manque un peu de personnalité, il propose évidemment des nouveautés dont il faut parler ici plus en détails. Il offre en effet une amélioration très sensible au bracelet d'Assassin : le grappin. Ce dernier permet non seulement d'aller directement en haut d'un immeuble sans l'escalader, mais aussi de fixer une tyrolienne d'un bâtiment à l'autre (ces derniers étant plus espacés qu'à l'accoutumée). Le changement est majeur et facilite grandement les déplacements dans une ville ouverte, plus grande que jamais. De plus, en mission il permet de s'infiltrer par le haut beaucoup plus facilement. Cela confère un sentiment de surpuissance bienvenu, mais malheureusement ça rend le jeu beaucoup plus facile que dans Unity, qui avait trouvé un équilibre vraiment agréable. Il en va d'ailleurs de même avec la nouvelle "vue d'aigle", désormais illimitée et qui permet de "locker" les ennemis pour qu'ils apparaissent en permanence, ainsi qu'avec le système de combat, rendu plus stylé mais aussi plus facile et moins intéressant que celui du titre de l'année dernière.

Mais revenons-en à nos déplacements. Car si le grappin est au final un ajout agréable - voire carrément jouissif dans certaines situations - il peine à convaincre pleinement tant il est capricieux. Il faut en effet viser un point et attendre que l'icône apparaisse pour pouvoir l'envoyer... comme dans les Batman Arkham, sauf qu'ici l'icône en question apparaît correctement une fois sur trois, à tel point qu'on se retrouve à manipuler nerveusement la caméra comme un fou à longueur de temps. Impossible également de s'accrocher à des éléments en mouvement, ni de l'utiliser en combat de manière originale. Bref, voilà une nouveauté intéressante mais loin d'être totalement convaincante.

Je dirais d'ailleurs la même chose des calèches, que l'on peut "emprunter" à l'envi comme dans GTA. Ces dernières permettent de rallier les différents points de la ville rapidement, ce qui est un vrai bonheur avec une telle surface de jeu, mais leur maniabilité est tout simplement... ridicule ? On finit par s'habituer, certes, mais on dirait qu'elles pèsent quelques grammes et qu'elles roulent sur de la glace. Et puis les chevaux... en adamantium qui explosent tous les poteaux et arbres sur leur passage... ça en fiche un sacré coup à l'immersion. Les calèches proposent en revanche des éléments intéressants dans le gameplay, elles. Dans le sens ou vous pourrez par exemple monter sur le toit en marche et sauter sur une autre calèche voisine, y cacher des cadavres, etc.

Enlèvements énervants

Autre nouveauté : les enlèvements. Il est en effet possible de se pointer discrètement derrière un garde pour lui faire une sympathique clé de bras, bloquer ce dernier dans son dos et le menacer de votre lame en prime. Il sera alors à votre merci et, aussi bizarre que cela puisse paraître, vous permettra de vous infiltrer sans vous planquer, en passant tranquillement devant tous les gardes sans éveiller leurs soupçons... Bizarre, non ? Ca offre des possibilités de gameplay sympa, nouvelles, mais encore une fois c'est assez bizarre côté immersion. Autre point assez agaçant : cette nouveauté doit être utilisée dans la grande majorité des missions, ce qui finit par lasser. Les développeurs en ont usé et abusé, ce qui est assez dommage à mon avis.

Atmosphère, atmosphère...

En revanche, ce qu'on ne peut pas enlever à Ubisoft sur ce coup, encore une fois serait-on tenté de dire, c'est son immense talent à créer des mondes ouverts aussi beaux qu'enivrants. Cette reproduction du Londres de la fin du XIXème siècle est tout simplement somptueuse, et s'y balader est un plaisir de chaque instant. On reconnaît évidemment au premier coup d'oeil tous les monuments de la capitale anglaise, tandis qu'on plonge littéralement dans son passé ultra industriel avec au loin les cheminées des usines, avec des tonnes de bateaux et péniches transportant marchandises et matières premières sur la Tamise (traitée comme un quartier à part entière dan le jeu)... Tout cela en appréciant les costumes d'époque et toute l'atmosphère qui se dégage dans ce brouhaha constant de calèches, de vendeurs de journaux et autres badauds de passage. Bon, en revanche on croise toujous les mêmes têtes... Il faudrait sérieusement prévoir plus de modèles de personnages la prochaine fois. Mention spéciale pour la bande originale enfin, car elle contribue magnifiquement à créer cette atmosphère si spéciale et si agréable.

Côté réalisation, Syndicate est évidemment scruté de toutes parts pour ses potentiels bugs, qui ne manqueront pas de se retrouver dans des milliers de vidéos et autres gifs animés. Nous avons été victimes de certains d'entre eux, notamment des personnages bloqués dans le décor, d'autres qui ne trouvent pas leur passage, mais aussi des balais et autres outils qui flottent au vent... Pour autant, de notre expérience en tout cas, ils n'ont pas été si nombreux et très rarement bloquants (une fois sur environ 30 à 40 heures de jeu). Le moteur a par ailleurs été soulagé de nombreux passants par rapport à Unity, certainement pour favoriser un affichage pas parfait pour autant, puisque le jeu souffre un peu de popping. Honnêtement, sur le point de la réalisation il y a certes des progrès à faire, mais on retiendra surtout au final la beauté globale du jeu et sa direction artistique plus que convaincante.

Pour le reste, à vous de voir si votre amour pour cette saga suffit à vous faire craquer pour un épisode tout juste "satisfaisant" selon nous.