N.B. : l'essentiel du test a été réalisé sur une version 360. Test sans spoilers.

Alors que l'effet de surprise de l'original aurait pu amoindrir la perception de l'excellence du second (tant Arkham Asylum était déjà extraordinaire), il n'en est finalement rien. Tout en respectant au pied de la lettre les forces de Batman AA, Arkham City va plus loin dans presque tous les domaines. Plus ouvert, mieux scénarisé, plus varié, il est à l'image d'une poupée gigogne ou d'un oignon, bourré de surprises à chaque couche qu'on traverse. Essayons d'en faire le tour sans trop en dévoiler...

Justesse de ton, scénario béton, bijou de narration

Arkham Asylum fermé, tout un quartier de Gotham est devenu une plus vaste prison pour ses détenus : Arkham City. A vrai dire, il s'agit plus d'une zone de non-droit à la New York 1997, entourée de hauts murs de béton et de miradors. Bien entendu, tout cela n'est pas du goût de tout le monde, à commencer par celui de Bruce Wayne qui part en campagne pour faire fermer ce programme, dirigé par un certain Hugo Strange sous la bénédiction étonnante du maire Quincy Sharp. Mais évidemment, il ne suffit pas, bien souvent, de faire des beaux discours en costard pour que les choses avancent, et Bruce Wayne devra bien vite céder la place à Batman pour résoudre un mystère aux multiples facettes et sauver une fois de plus Gotham d'un très mauvais pas. Au menu, une course-poursuite sur fond de maladie-mystère avec le Joker, bien entendu, mais aussi d'autres acteurs importants de l'univers comme Double-Face et le Pingouin, les distractions de l'Homme-Mystère, des nouveaux alliés (à commencer par une Catwoman jouable), et une jolie tonne de surprises. Le tout enveloppé dans un scénario beaucoup plus réussi que celui du précédent, et porté par un récit à la narration encore plus maîtrisée, usant de changements de perspective, d'astuces de mise en scène brillantes, et de cliffhangers insoutenables parfaitement rythmés. Seul bémol : les phases d'enquête sont toujours un peu "légères". Il m'a parfois fallu décrocher de l'écran pour manger, soulager ma vessie, ou encore porter un peu d'attention aux personnes m'entourant, mais ça n'a pas été facile. D'autant que fichtre ! Il y en a des choses à faire dans cet Arkham City ouvert et retors.

Peur sur la ville

La principale nouveauté par rapport au précédent volet, celle qui coupe le souffle lorsqu'on la mesure pour la première fois, peu de temps après la brillante séquence d'ouverture du jeu, c'est bien entendu ce large quartier urbain en plein Gotham qui sert de prison pour les dégénérés criminels, et de terrain de jeu pour le Chevalier Noir et par conséquent le joueur. S'il y a des bâtiments et quelques recoins inaccessibles au départ, on peut dès les premiers instants commencer à planer, explorer, et profiter de l'étendue étonnante du level design. On remarque de suite le kilo de points d'interrogation verts planqués un peu partout et invitant à s'éloigner du chemin principal, tout en observant que, visiblement, il n'y a pas deux rues pareilles et des recoins redécorés aux couleurs des barons du crime qui luttent déjà pour la succession locale, alors que la suprématie du Joker semble sur le point de s'éteindre puisque l'ennemi héréditaire de Batman serait, paraît-il, sur le point de mourir des suites d'une mystérieuse maladie... Sans aller jusqu'à l'étendue magistrale que peuvent offrir des GTA, RDR et autres Assassin's Creed, Batman passe tout de même en mode ouvert, donc, tout en restant toujours parfaitement fluide, et diablement travaillé visuellement. Ce formidable sentiment de liberté s'appuie en outre sur un ensemble de missions secondaires et de secrets à découvrir un peu partout, qui représentent aisément une bonne moitié du contenu du jeu, à part égale avec la campagne principale.

Alliances improbables, personnages mystérieux

Si les énigmes de l'Homme Mystère et ses trophées consciencieusement éparpillés partout et parfois très complexes à récupérer sont accessibles dès le début, les différentes missions secondaires ne se débloqueront, elles, qu'au fur et à mesure. Sur la douzaine proposée, certaines sont courtes, d'autres de plus longue haleine, et elles récompensent généralement le joueur de scènes et rencontres inédites (et parfois brillantes), et souvent de gadgets améliorés (on apprécie tout particulièrement le Grapple-Boost qui permet de s'élancer en vol grâce au grappin). D'autres tâches secondaires peuvent occuper le joueur au milieu d'Arkham City : détruire les caméras de surveillance, ou les ballons du Joker par exemple. Les raisons de ne pas suivre aveuglément la trame principale d'objectif en objectif sont donc multiples, et ne serait-ce qu'explorer la ville, se balader de toit en ruelle, découvrir ici une saynète inattendue ou simplement castagner du vilain sur un tronçon de route abandonnée ne lasse pas. Le plaisir, qu'on soit dans la peau de Batman ou de Catwoman, est tel, que les concepteurs ont heureusement permis de poursuivre toutes ces activités après la fin de jeu.

Un plaisir de jeu authentique

On retrouve donc également tout ce qui faisait la valeur du précédent, avec ses gadgets, et de nouveaux. D'ailleurs, si on n'a pas fait le premier, difficile d'appréhender l'immense étendue des mouvements, combos, utilisations de gadgets et principes d'énigmes qui fourmillent dans cette suite, même si les devs ont eu l'intelligence de rassembler dans les menus toutes ces informations, en permettant d'activer certains tutoriaux, en forme d'indications à l'écran apparaissant pendant le jeu aux moments propices pour utiliser tel ou tel mouvement. Le combat s'est encore amélioré (il était pourtant de très loin l'un des plus jouissifs jamais développés), en gagnant encore en variété (et les mouvements et animations de Catwoman changent le style agréablement). Tous les gadgets sont utilisables de manière fluide au milieu des échanges de coups, et les adversaires sont plus nombreux, plus variés, et plus agressifs, rendant plus difficile la construction de combos variées et parfaites (pour gagner plus d'XP, ou juste pour la beauté). Mais le ballet des mouvements trouve bien entendu toute sa dimension avec beaucoup d'adversaires, variés, armés ou non. Pour cela, les défis sont bien sûr de retour, proposant un challenge souvent corsé. Il y a les défis classés, avec 12 cartes de combat et 12 cartes prédateur (à débloquer en récupérant des trophées et résolvant des énigmes pendant la campagne), ainsi qu'un nouveau mode dans lesquelles l'Homme-Mystère propose des campagnes : des successions de cartes (combat ou predator mélangées) avec des modificateurs corsant ou facilitant les choses, à activer de round en round comme on le souhaite (il faut en utiliser un minimum pour réussir la campgane). Suivant les résultats, on gagne donc plus ou moins de médailles. Reste aussi à mentionner l'ensemble des personnages modélisés et travaux préparatoires à débloquer. enfin, une fois la campagne solo finie, se débloque un mode Game+ plus difficile, dans lequel les adversaires ne portent plus les indications visuelles aidant aux contres, et pour lequel des statistiques de complétion séparées sont gérées au sein de la même sauvegarde.

Difficile d'exposer toute la valeur de Batman : Arkham City sans éventer tout le sel des nombreuses découvertes, chacune délicieusement amenée, que les développeurs réservent aux fans de Batman (le personnage comme le premier jeu). C'est du travail d'orfèvre, finelement ciselé, bien équilibré, riche et brillant. Un candidat incontestable au convoité titre de Game Of The Year, tout simplement.