Commençons d'abord par un rapide retour sur l'historique de la licence. Jagged Alliance est une série de jeux de stratégie au tour par tour mélangeant des éléments de jeu de rôle et de tactique. La série a été créée par Sir-Tech Canada et a été initialement publiée en 1994 avec le tout premier épisode. Dans ce jeu, les joueurs prennent le contrôle de mercenaires et c'est toujours le cas ici presque 30 ans plus tard. La recette est toujours la même malgré évidemment quelques changements entre temps.

Cette fois, le joueur gère des mercenaires en cherchant à renverser un seigneur de guerre violent, appelé le Major, qui a perturbé et terrorisé la nation africaine de Grand Chien (un curieux nom) en capturant son président. Sa fille veut que vous dirigiez un groupe de combattants pour renverser la situation façon Predators. Travaillant pour Adonis Corporation, vous allez devoir équilibrer les besoins stratégiques de votre équipe, payer ses frais, réparer son équipement et la maintenir formée tout en l'engageant dans des conflits violents avec diverses factions et groupes dans cette ancienne colonie française.

TEST Jagged Alliance 3

Un monde en constante évolution

A la manière de XCOM, le jeu se divise en deux parties : une carte du monde comprenant plus de 100 cases accessibles, chacune accompagnée de sa propre carte de combat 3D personnalisée pour des phases tactiques au tour par tour. Le monde de Jagged Alliance 3 évolue constamment, exigeant un équilibre permanent entre votre désir d'expansion et l'exploration de nouvelles zones, tout en étant soumis à diverses pressions génératrices de stress, semblables à XCOM 2. L'une de ces pressions majeures est l'envoi de raids par les forts adverses.

Plusieurs forteresses ennemies dispersées sur la carte donneront naissance à intervalles réguliers à des groupes de rebelles cherchant à reprendre des sites stratégiques (comme les forts eux-mêmes ou même des mines de diamants, sources de revenus). Bien que ces groupes ne rivalisent pas en puissance avec vos mercenaires, les vaincre n'est jamais aisé, et une défaite peut avoir des conséquences préjudiciables pour votre progression. La localisation et l'objectif des raids sont indiqués sur la carte, vous permettant de réagir en conséquence. En cas d'urgence, vous pouvez former des milices en dépensant argent et temps pour défendre les lieux stratégiques, offrant ainsi des contre-attaques possibles. Cela s'avère utile pour focaliser vos mercenaires sur les objectifs principaux.

La deuxième pression est bien évidemment financière. Peu de mercenaires travaillent gratuitement, et généralement, ceux avec des compétences puissantes et un haut niveau exigent un coût élevé. Ainsi, la première partie de la campagne est une jonglerie constante entre la nécessité de gagner de l'argent et celle de recruter des mercenaires, ce qui permet à son tour de gagner de l'argent. Un équilibre délicat typique des titres du genre. Bien que cette pression soit moins intense aux niveaux de difficulté inférieurs, elle perdure jusqu'à la fin de Jagged Alliance 3. Vous ne serez jamais complètement à l'aise financièrement. L'argent guide toute votre aventure et il est crucial pour atteindre les divers objectifs de libération du territoire africain. D'où l'importance de garder le contrôle des mines de diamants.

TEST Alliance 3

Le combat au tour par tour, brillant ?

Comme dans XCOM ou plus récemment Marvel Midnight Suns, les combats de Jagged Alliance 3 offrent une grande variété d'actions disponibles pour les joueurs, qui dépendent de l'équipement, des avantages et des armes de chaque mercenaire. Tous offrent diverses options et capacités. En parlant d'équipement, le jeu inclut tout l'arsenal qui a été utilisé pendant la Guerre Froide en termes d'armement, et la plupart des noms originaux sont conservés. Galil, AK-47, Steyr Aug, HK MP5, Beretta 92FS, Minimi... Tout est là pour vous plonger au cœur d'un conflit africain. Chaque arme possède cinq caractéristiques : dégâts, dégâts d'armure, chance de coup critique, portée et bonus de visée. Vous avez la liberté de choisir ce qui correspond le mieux à votre approche.

Un mercenaire armé d'une mitrailleuse sera nettement moins efficace à longue portée qu'avec un HK PSG1(sniper). En outre, l'élévation du terrain, la position du personnage (couché, accroupi, debout) et le décor environnant créent des dynamiques influençant le déroulement des combats. Le gameplay est alors fluide, agréable et particulièrement divertissant. Jagged Alliance 3 réussit même à surpasser son modèle XCOM en termes de plaisir. Il s'agit ensuite de logique pour tirer avantage de la topographie. Un tireur d'élite sur un bâtiment, une mitrailleuse derrière un muret, etc. Cependant, il est dommage que le système de suppression, si essentiel dans les fusillades modernes, ne soit pas assez développé. On ne peut pas vraiment exercer de pression avec une arme automatique, le jeu encourageant plutôt à éliminer directement l'adversaire. C'est un peu simpliste et cela rend les affrontements un peu trop rudimentaires.

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Parfois un peu pataud

Comme dans la plupart des jeux tactiques de ce genre, le combat inclut également des attaques au corps à corps, généralement une opportunité d'éliminer discrètement un adversaire. C'est d'autant plus utile pour économiser les points d'action, qui sont parfois nécessaires en grand nombre pour terminer une fusillade longue et laborieuse. Le problème c’est que les attaques à distance sont bien moins complexes et souvent plus faciles à gérer que les attaques furtives. Pourquoi s'embêter avec un couteau quand on peut faire une élimination silencieuse à distance avec un réducteur de son ? L'équilibre doit être revu, d'autant que Jagged Alliance 3 semble encourager les attaques au corps à corps, vu la variété d'armes disponibles (machettes, couteaux divers, etc.).

Dans l'ensemble, le principal défaut du jeu concerne l'équilibrage de l'arsenal. Les fusils dominent tout le reste et une arme de précision peut répondre à la plupart des besoins. Ce n'est ni réaliste ni logique. Comment un mercenaire pourrait-il mieux réussir à 50 mètres avec une arme de précision plutôt qu'avec un fusil d'assaut conçu spécifiquement pour ce genre de confrontation ? Dommage. Les développeurs semblent conscients de ce problème et travailleraient sur un correctif. C'est un peu décevant, car Jagged Alliance 3 propose une grande variété d'armes aux fonctions différentes, mais on se retrouve finalement à en utiliser seulement quelques-unes

Ce problème n'entache pas l'expérience de combat, mais parfois, on se sent obligé d'utiliser ce type d'armement pour garantir la victoire sans trop de complications. Cela semble être une solution de facilité et cela donne l'impression d'exploiter une faille du jeu. Malgré tout, les fusillades sont agréables, et c'est toujours exaltant de trouver un abri pour nos combattants sous une pluie de balles. D'autant que le design des niveaux est de qualité, offrant une grande variété d'environnements, des marais aux grottes en passant par les villages de guérilleros africains.

Chaque environnement possède ses spécificités et un gameplay adapté. La réactivité est cruciale dans une grotte, où il n'y a pas d'issue, tandis qu'une grande zone de savane conviendra mieux à une approche discrète et aux éliminations à longue portée. Au fur et à mesure, chaque mercenaire se spécialise en fonction de son armement et de son expérience, et diriger l'équipe devient un véritable plaisir, car chaque membre doit jouer son rôle pour le succès collectif. De plus, chaque mercenaire possède une personnalité distincte et un passé bien défini.

Une super ambiance

Les personnages, le contexte, l'arsenal et l'humour quelque peu “rustique” rendent hommage aux films d'action des années 80 et 90, tels que Predator. Mention spéciale pour les personnages critiquables, ouvertement misogynes, qui recréent cette ambiance un peu machiste de l'âge d'or du cinéma. On retrouve l'américain patriote réticent à coopérer avec les Russes, le commando xénophobe, le mercenaire chinois multipliant les clins d'œil aux films hongkongais des années 80... L'atmosphère est captivante et politiquement incorrecte. Le scénario de base, malgré sa critique acerbe de la situation, attire l'attention.

Des mercenaires, principalement occidentaux (à l'exception des Russes et des Chinois), combattent dans un pays africain pour s'enrichir grâce aux mines de diamants. C'est à la fois un hommage aux films cultes et une critique intelligente d'une partie de notre histoire. Malgré quelques problèmes d'équilibrage, c'est une expérience globalement réussie. Artistiquement et techniquement, le jeu est satisfaisant avec des environnements variés. L'immersion est au rendez-vous, et aucun souci technique n'est à signaler. Même si ce n'est pas le jeu de l'année, ces éléments sont tout à fait appropriés pour un jeu tactique au tour par tour de ce calibre. Une aventure enrichissante d'environ 40 heures, digne d'un bon film d'action avec Arnold Schwarzenegger.