Une belle histoire que celle de ce Shiness The Lightning Kingdom. Développé par le petit studio lillois Enigami, le jeu à tout d'abord mené une très belle campagne Kickstarter avant que l'éditeur parisien Focus s'intéresse de près à ce projet pour lui apporter son soutien. Mais au delà, c'est aussi le destin de cet univers qui est beau. Imaginé par Samir Rebib, le directeur créatif, alors qu'il était âgé de sept ans, il lui à d'abord donné vie en manga avant que ce soit au tour de la petite équipe d'Enigami d'adapter ce projet transmédia en jeu vidéo. Et Shiness prend donc la forme d'un Action-RPG qui vient marcher sur les pas et rendre hommage à des jeux d'Aventure tels que les premiers Zelda en 3D... Pour un résultat à la hauteur de nos attentes ?

Un univers féerique

Shiness nous raconte donc l'histoire de Chado, une créature anthropomorphique qui effectue un voyage dans les iles célestes, en bateau volant et avec son pote Poky. Malheureusement, très vite pris dans une tempête, leur vaisseau d'infortune se crache sur l'île de Gendys, une des plus dangereuses de la région. Très vite, nos deux amis vont se retrouver pris au milieu de luttes de pouvoirs entre les différentes factions en place, et ils vont essayer de faire leur petit bonhomme de chemin tout en aidant leurs nouveaux camarades et en faisant la lumière sur le sombre destin qui se dessine pour les habitants de l'île, à cause de menaces de plus en plus grandes qui vont surgir les unes après les autres... Si le scénario ne brille pas par son originalité, ni par son écriture assez basique - mais jamais déplaisante pour autant - et que la lecture du Manga sera recommandée pour en savoir plus sur la destinée de nos jeunes héros, l'ensemble se montre très cohérent, en abordant des thèmes parfois sombres qui prennent aux tripes.

Mais au delà de son histoire, c'est surtout avec son univers que Shiness montrera le plus son potentiel de séduction. L'univers des îles célestes se montre enchanteur, avec sa propre faune et sa propre flore, et il faudra l'explorer dans des décors grandioses, magiques et colorés, tels que des cités volantes, des forêts magiques ou des arbres géants. Le background n'est pas en reste puisque le jeu nous offre un monde d'une grande richesse, habité par moult races plus ou moins belliqueuses et une galerie de personnages secondaires aux destins intriguants et hauts en couleurs. Le design adopté, qui reprend celui du manga, avec énormément de créatures à mi-chemin entre l'homme et la bête, ne sera pas sans rappeler à notre bon soutenir d'autres univers tels que celui de Dragon Ball, où la terre est peuplée d'un grand nombre de races humanoïdes différentes. Le design global est véritablement enchanteur et pourra plaire aux petits comme aux grands, même si comme nous le verrons plus loin, la jouabilité se destine tout de même à des joueurs confirmés, le PEGI 12 ne faisant que confirmer le fait que vous ne pourrez peut-être pas faire découvrir Shiness à vos enfants avant un certain âge...

Un vrai jeu d'aventure

L'une des autres réussites de Shiness se trouve dans ses méthodes de narration . En plus de très classiques mais plutôt rares cinématiques en 3D doublées, une grande majorité de l'histoire est contée via des fenêtres de texte, sans voix, où quelques choix moraux - définis par des émojis - font leur intervention pour mener la quête de différentes façons. Mais c'est surtout ces magnifiques passages sous forme de BD légèrement animées qui vont venir flatter la rétine de tout joueur normalement constitué, le procédé n'étant pas sans rappeler celui utilisé sur Gravity Rush... mais en mieux ! Les musiques se montrent du même acabit, avec des mélodies qui collent parfaitement à l'univers et dont certaines évoqueront sans détour les aventures d'un petit bonhomme vert dans les plaines d'Hyrule... Et si la technique n'est clairement pas à la hauteur d'un Horizon Zero Dawn sur la version PS4 que j'ai pu tester, toutes les qualités esthétiques cités précédemment vous feront rapidement oublier cet élément.

Aussi, dans Shiness, c'est un véritable petit monde ouvert qui s'offre à vous. Si ce dernier va se déverrouiller petit à petit, il se montre assez riche. Au fil de votre avancée dans le jeu, vous allez aussi être amené à explorer plusieurs donjons, à la manière d'un Zelda. Et si le début de l'aventure se montre ultra linéaire, avec des cavernes que l'on traverse presque en ligne droite et ou les énigmes sont évidentes et peu corsées (on croirait presque voir un jeu pour enfant de ce point de vue), dès le second temple, les choses se complexifient pour le plus grand plaisir des amateurs du genre. Les lieux deviennent alors de respectables labyrinthes, où il faudra tâtonner, explorer et bénéficier du résultat de ses actions pour avancer. Les énigmes y deviennent alors très intéressantes, puisqu'il faudra combiner les pouvoirs des membres de votre équipe pour parvenir à en voir le bout. En effet, entre Chado qui peut faire apparaître des menhirs pour détruire ou appuyer sur un interrupteur, ou Poky qui peut transporter de l'énergie d'un endroit à un autre, vos autres compagnons pourront user de télékinésie, ou encore d'un fouet pour attraper les objets lointains. Il faudra vraiment se creuser les méninges pour venir à bout de certains puzzles ! Je le cite encore, désolé, mais on se retrouve vraiment à explorer des repaires de vilains à la Zelda, ce qui reste un bel hommage et devrait faire plaisir à pas mal de joueurs.

RPG et baston, un bon mélange ?

Et ce d'autant plus que Shiness se montre être un bon RPG, très complet. S'il tombe parfois dans l'écueil de la "quête FedEx", ou du moins nous le fait croire puisqu'en fonction de vos choix de dialogues et vos actions, il y aura plusieurs façons de résoudre un problème donné, le jeu se permet un petit troll des familles bien placé à ce sujet ! Mais sinon, que ce soit en termes de personnalisation ou de préparation avant les combats, vous aurez de quoi passer du temps dans les menus. À commencer par la magie et son système d'apprentissage, qui rappellera celui de Lost Odyssey avec des parchemins que vos héros doivent équiper le temps d'apprendre une nouvelle compétence. On pourra donc les faire tourner entre les différents membres pour leur offrir un panel de coup de plus en plus développé et propice à répondre à toutes les situations. Il en va de même pour le système des coups spéciaux au corps à corps, qui doivent être travaillés en combat pour être acquis. Le système de soutien se montre lui aussi très complet, puisque vous pourrez décider dans quelles conditions l'IA de vos partenaires devra venir à votre rescousse avec un sort de soin ou une augmentation de l'attaque. Tous ces aspects se montrent décisifs dans la réussite de vos duels, car comme nous allons le voir par la suite, le jeu n'est vraiment pas si facile que ça...

En effet, les combats vont vous donner pas mal de fil à retordre, et à cause de quelques défauts, vous pourrez parfois avoir droit au Game Over sans avoir véritablement compris ce qui s'était passé. S'inspirant fortement de ce qui se fait dans la série des Naruto Shippuden Ultimate Ninja Storm, vous aurez donc un véritable mélange de jeu d'aventure et de jeu de baston. A votre disposition, deux coups : pied et poing, mais aussi une garde, qui peut se transformer en garde précise avec le bon timing, ce qui permet de lancer une contre-attaque. Et c'est surtout le contre qui va nécessiter une bonne dose d'apprentissage, ce dernier étant un élément essentiel pour la victoire, à la manière de la téléportation d'un Naruto SUNS ou d'un DBZ Budokai. La jauge de tension étant mise à contribution pour cette mécanique essentielle, il faudra bien gérer entre la défense et l'envie d'attaquer avec l'Ultra, qui consomme l'intégralité de cette barre, pour ne pas se retrouver à poil, sans défense face aux féroces combos de votre adversaire, qui peuvent généralement tuer un de vos compagnons en deux temps trois mouvements si vous n'êtes pas assez attentifs. Ajoutez à cela l'utilisation des magies et des coups spéciaux dont je vous parlais plus haut, un système de "pierre-feuille-ciseau" pour la balance entre l'attaque, la défense et le contre, et vous obtenez une alchimie plus que complète sur le papier.

Malheureusement, sur ce point, et c'est peut être la seule faiblesse de ce Shiness - même s'il faut avouer qu'elle fait bien tâche - les combats se montrent vraiment rigides, longs, et très difficiles ! Les boss sont de véritables sacs à PV, leur comportement est parfois très difficile à prévoir, relève souvent du véritable poison, et certaines attaques peuvent vous tuer en un coup si vous ne prenez pas garde à les esquiver. Et avec l'absence de checkpoint (sauf contre les boss, pensez à sauvegarder dès que vous le pouvez!), je peux vous dire que le jeu m'a fait rager plusieurs fois ! Bizarre pour un amateur de Dark Souls comme moi, me direz-vous... Pas vraiment, car cette frustration, elle ne vient pas que du gameplay. En préparant bien ses combats via l'aspect RPG, on peut triompher d'un affrontement de boss qui nous semblait si long et impossible. En fait, c'est vraiment la caméra qui déconne à plein pot, se plaçant régulièrement dans des endroits incongrus, comme un élément du décor, ou alignant votre combattant et son adversaire avec votre écran de télé, ce qui n'est pas du tout pratique pour observer les patterns d'une menace qui devient, pour le coup, totalement masquée... Il convient néanmoins de souligner que l'intention était audacieuse et ambitieuse, même si le résultat escompté n'est pas aussi bon que ce que l'on aurait pu croire au départ... C'est dommage, car avec un peu plus de travail sur cet aspect, Shiness : The Lightning Kingdom aurait véritablement pu frôler l'excellence...