De grands espoirs

Suite à la sortie du médiocre WRC 4 en 2012, Bigben arrête son partenariat avec Milestone pour travailler avec Kylotonn sur WRC 5. Mais le studio italien n'abandonne pas le rallye pour autant et annonce rapidement son association avec le nonuple champion de la catégorie. Abstraction faite de la qualité de production de ce studio par le passé, on est donc en droit de rêver à une simulation sérieuse, surtout qu'il est question de pouvoir s'essayer aux grands moments vécus par le champion, qu'ils soient ou non issus du circuit officiel WRC. Et de ce côté là, Sebastien Loeb Rally Evo remplit plutôt bien son contrat.

Passons rapidement sur le mode "Partie Rapide", qui donne la possibilité d'essayer une ou plusieurs spéciales avec la voiture de son choix, comme de s'entraîner en Rally Cross ou sur Pikes Peak, pour se pencher plus sérieusement sur la carrière. Celle-ci se présente comme assez classique. Pas de véritable saison où s'enchaîneraient les spéciales lieu par lieu, mais un panel de niveaux, classés en gros par puissances et contenant chacun plusieurs catégories. Vous y trouverez soit des spéciales uniques, soit des rallyes complets avec pour objectif d'obtenir la médaille d'or globale, et parfois quelques épreuves d'adresse au volant. L'accès à une épreuve n'est d'ailleurs conditionné que par les bolides que vous possédez et il est même possible de louer une voiture pour une session, ce qui donne une grande liberté quant à votre évolution dans le jeu. Vous pouvez par exemple vous concentrer un moment sur les voitures anciennes, ou au contraire suivre une carrière plutôt moderne, sans forcément acheter tous les véhicules nécessaires.

Au sein de cette carrière, seule une catégorie d'événements organisés par Sébastien Loeb et rangés dans une zone spéciale nécessiteront de votre part un certain niveau de classement au rang mondial. En effet, en plus des crédits que vous apportent les différentes courses et qui vous permettent d'acquérir de nouvelles voitures, vous gagnez des points de réputation en fonction de vos résultats et des aides que vous utilisez. Ces points s'accumulent sur votre compte et augmentent de ce fait votre réputation, débloquant petit à petit les défis sélectionnées par le champion.

En plus de cette carrière, il faut ajouter la zone Loeb Expérience qui vous permet de participer à des événements particuliers ayant marqué la carrière du pilote. On y trouve ses débuts en Saxo Kit Car, son évolution en Xsara, en C4, en DS3, mais aussi les épreuves en X-Games ou sa montée de Pikes Peak en 2008. Là encore, pas de participation à un rallye complet, mais simplement un défi à remplir lors d'une ou de plusieurs courses données. Et chaque moment est introduit par un extrait d'interview en français où Sébastien Loeb raconte les conditions dans lesquelles il y a participé, ses impressions ou ses sentiments. Et il faut dire que cette sincérité ferait mouche si elle n'était pas simplement gâchée par un décalage de plus d'une seconde apparaissant parfois entre le son et l'image, même après plusieurs patchs. Quel dommage.

Les épreuves, quant à elles, sont plutôt agréables et permettent de goûter rapidement à différents types de voitures, de surface et de difficultés. Et là où la carrière devrait vous occuper pendant 10 à 20 heures, la Loeb Expérience ne vous proposera qu'un peu plus de 3 à 4 heures de sensations fortes. Dans l'ensemble, Sébastien Loeb Rally Evo offre un panel très large de types de conduites, tant par la diversité des véhicules qu'il propose, que par le choix des disciplines abordées: du rallye, évidemment, des épreuves spéciales, mais aussi du Rally Cross en circuit fermé avec des adversaires qui courent en simultané et l'apprentissage par étapes de la mythique montée de Pikes Peak. Bref, il y en a vraiment beaucoup à se mettre sous la dent.

Le mode multijoueur, bien que déserté rapidement, est stable et fonctionnel. Difficile de faire plus simple puisqu'il ne propose que deux choix, créer un salon ou en rejoindre un. Aucune fonction sociale n'est malheureusement disponible.

La belle histoire

De base, le jeu propose plus de 50 véhicules, répartis sur 16 constructeurs. On y trouve évidemment les deux marques françaises qui ont écrit les plus belles pages du rallye (chauvin va !), à savoir Citroën et Peugeot, mais aussi leurs plus emblématiques concurrents : Ford, Subaru, Lancia, Toyota, Abarth, etc., avec des modèles remontant des années 70 à nos jours. Ou presque, puisque les voitures les plus récentes sont celles de 2013, à l'exception des Hyundai Veloster et Toyota GT-86 de 2014. Pour faire clair, ce Sébastien Loeb Rally Evo comporte donc les véhicules qui ont fait l'histoire du rallye, quand WRC 5 propose ceux qui courent actuellement. Ce choix permet de proposer plus de conduites et de sensations différentes, l'écart de comportement et de motorisation entre une Alpine A110 et une 208 Pikes Peak étant, par exemple, simplement énorme.

Côté rallyes, on trouve 8 destinations différentes (contre 14 pour WRC 5) avec 8 spéciales par lieu. Ces circuits on été tracés selon les données GPS officielles mais sans forcément respecter les variations d'altitude ou les paysages réels. Et on remarque rapidement la réutilisation de tronçons d'un tracé à l'autre. En résulte une certaine monotonie visuelle quand on enchaîne les courses sans changer de pays, ce qui n'arrive pas très souvent lors de la carrière solo. Heureusement que les tracés sont plutôt intéressants à jouer et vous réservent pas mal de surprises, avec parfois des spéciales assez longues pour tester votre endurance sur plus de 10 km. La montée de Pikes Peak, disponible en tronçons ou en intégrale, mérite à elle seule votre attention tant sa technicité est élevée.

La technique du pauvre

Sébastien Loeb Rally Evo ne décolle pas les rétines... du moins pas dans le bon sens du terme. En effet, il souffre avant tout d'une animation instable et très désagréable pour les yeux. Le PC et la Xbox One sont particulièrement touchés, quand la PS4 réussit à s'en sortir presque honorablement. Dans le meilleur des cas, et même si vous jouez sur un PC de compétition, vous aurez du mal à atteindre les 30 fps constants. Ce défaut, qui impacte de façon évidente le confort de jeu, est omniprésent et semble à peine être lié à la complexité d'affichage des données. En effet, en plus d'être mal animé, Sébastien Loeb Rally Evo n'offre rien de bien impressionnant à l'image.

Les textures ne sont pas des plus détaillées, les effets de lumière sont moyennement réussis et le popping vient régulièrement en rajouter une couche. En clair : on est face à jeu qui rappelle grandement la génération précédente de consoles, avec un effet plastique généralisé et un manque global de détails. Surtout qu'on n'a le droit ni à une météo dynamique, ni même à des effets de pluie convaincants. Les véhicules sont d'ailleurs tout autant touchés que les paysages. Leurs modélisation est un peu anguleuse et les différents matériaux qui les composent n'ont rien de bien réaliste. De plus, on note une grande différence entre les plateformes : le PC et la PS4 se situent globalement au même niveau, plutôt acceptable mais sans briller, quand la Xbox One prend un sacré train de retard. Sur cette dernière, on a en plus droit à des textures baveuses, à des bugs réguliers et à des ombres qui clignotent.

On peut quand même accorder à Sébastien Loeb Rally Evo quelques réussites. D'abord, l'excellent rendu des différents reliefs, tant sur la piste que ses abords. Vous serez régulièrement coincé entre un mur de terre et une pente abrupte avec, pour peu que vous utilisiez la vue pare-choc, d'excellentes sensations de vertige. De même, les effets de poussières sont plutôt réussis, sachant qu'en Rally Cross vous aurez tout le loisir de les observer si vous ne vous trouvez pas en première place.

Niveau son, c'est une vraie déception. Si la vue arrière offre certes quelques pétarades bienvenues, le reste est aussi plat que possible. Les sonorités des moteurs manquent cruellement de mordant et n'ont quasiment aucune gestion spatiale, quand les différentes surfaces ne sont reproduites que par une boucle sonore amorphe. Les chocs, aussi violent soient ils, n'ont aucune dynamique et aucune crédibilité. De même, la vue intérieure ne reproduit nullement les crissements et grincements que toute bonne carcasse de voiture est censée produire. Bref, on est très loin du niveau offert par WRC 5, lequel reste la référence en la matière.

Parmi les sons essentiels en Rallye, on trouve le copilote. Dans Sébastien Loeb Rally Evo, il s'en sort plutôt bien. La voix, masculine exclusivement, est à la fois claire et crédible. Elle donne les informations avec assez d'avance pour anticiper les virages et si elle n'est pas dénuée de petits bugs, elle ne mène que rarement le joueur à la faute.

Sébastien, où es-tu?

Mais c'est évidemment sur le pilotage ou sur le moteur physique qu'on attend le plus Sébastien Loeb Rally Evo. Et il faut avouer que ce jeu ne manque ni de qualités, ni de défauts. Pour ce qui est de la gestion du grip ou des amortisseurs, il n'y a pas grand chose à reprocher. Les véhicules réagissent bien aux différents reliefs, comme aux surfaces variables, même si la boue comme la neige manquent de résistance. De même, les zones humides, les flaques, ne sont pas gérées aussi bien que dans Forza 6. Néanmoins, à part un léger effet d'axe central de rotation sur les modèles les moins puissants, tout bouge à la perfection. L'accélération, ainsi que les effets visuels qui vont avec, sont d'ailleurs parmi les plus réussis.

Evidemment, Sébastien Loeb Rally Evo offre tout un panel d'aides au pilotage, lesquelles permettront de faire varier la difficulté, mais aussi le comportement global des voitures. Ainsi, on oscille entre une conduite plutôt réaliste, et un modèle beaucoup plus accessible. D'ailleurs, une fois toutes les aides activées, le charme continue d'opérer et le jeu garde une certaine technicité de par sa nature à surprendre dans les tracés.

Les points qui fâchent au niveau de la conduite sont essentiellement concentrés sur la gestion du freinage. En effet, il étonnant de réaliser que faire tomber les rapports se révèle bien plus efficace que de freiner. Le blocage des roues est quasi systématique lorsqu'on écrase un peu trop la pédale de frein et le véhicule a une grosse tendance à virer aléatoirement à droite ou à gauche, même en ligne droite. Du coup, difficile d'avoir confiance lorsqu'on est à fond de sixième et que se profile au loin un virage un peu serré.

Le frein à main n'est d'ailleurs pas épargné par ce problème, mais il a en plus le culot d'en ajouter deux autres : la latence de réaction et l'absence de progressivité. Comptez un quart de seconde entre le moment ou vous enclenchez le frein à main et celui où il devient actif. Ça craint vraiment pour ceux qui maîtrisent les techniques (quasi essentielles en rallye) qui vont avec. De plus, avec ce frein, c'est du ON/OFF : actif ou non, sans la moindre possibilité de doser. Impossible donc avec ces deux défauts de véritablement doser le blocage des roues en sortie ou en entrée de virage. Et s'il n'est pas impossible d'utiliser le frein à main, il faut donc le réserver aux moments où il est inévitable, à savoir les épingles.

Au niveau des sensations, ça manque de vibrations, à la manette comme au volant. Si sur Xbox One, la gestion des gâchettes vibrantes est la bienvenue, le manque global de secousses impacte énormément le ressenti que l'on a de la piste. Sur ce point précis, WRC 5 fait un peu mieux. Cependant, les joueurs au volant apprécieront que tous les volants principaux du marché soient reconnus et parfaitement utilisables, avec un avantage certains pour ceux proposant une variation interne de l'angle de rotation (en gros, les Fanatec et les Thrustmaster). En effet, un volant réglé sur 540° quand le jeu pense en gérer 900° m'apparaît comme le meilleur réglage qui soit. Grosse déception néanmoins pour la gestion du frein à main, laquelle ne peut être attribuée à autre chose qu'un bouton. Ainsi, pas de gestion du frein à main Fanatec, ni d'aucun levier indépendant. Il faudra donc passer par un des boutons de façade, ce qui est clairement très difficile à gérer. Un gros avantage pour les joueurs à la manette donc.

Autre problème assez gênant : le passage des vitesses qui demande un minimum de temps entre deux rapports. Ainsi, appuyer plusieurs fois d'affilée pour rétrograder rapidement se résume souvent à se retrouver sur un rapport plus élevé qu'attendu. Autant dire que ce défaut tue carrément le jeu en mode manuel. En résumé, à part une conduite agréable et des réactions plutôt bien retranscrites, Sébastien Loeb Rally Evo souffre de tares qui l'écartent clairement des standards actuels. Si vous jouez en automatique et à la manette, ça se passe très bien, sinon oubliez.