Après avoir emmené le plus célèbre duo de Gaulois à la recherche du Menhir de Cristal avant de lifter le premier épisode d'Astérix et Obélix XXL dans une version Romastered, les lyonnais d'Osome Studio continuent d'explorer les vieilles licences de la bande-dessinée franco-belge en déclinant les célèbres Schtroumpfs dans une nouvelle aventure : Mission Malfeuille, un platformer 3D qui a tout du jeu rétro... sans le vouloir ?

Du salsepareille au même

Oubliez les adaptations cinématographiques hollywoodiennes désastreuses qui tentent de justifier la présence des créatures médiévales dans les rues de New-York. Dans Mission Malfeuille, c'est au cœur de leur paisible forêt que les Schtroumpfs doivent faire face à une nouvelle menace à mettre au crédit du vil Gargamel. Le sorcier maladroit est parvenu à empoisonner une partie de la flore locale, et ainsi semer le trouble dans la vie bien rangée de ceux qui n'ont pourtant aucun problème à vivre dans des champignons. Heureusement pour eux, le Schtroumpf Bricoleur vient juste de mettre au point le Vaporisaschtroumpf, un dispositif qui permet d'asperger n'importe quelle substance, et qui combiné à la bonne plante permettra de résorber la Malfeuille, et d'assurer la quiétude du village. À l'instar d'un Luigi's Mansion 3 inversé, il faudra donc parcourir la célèbre forêt pour faire reculer la menace, et sauver les pauvres Schtroumpfs prisonniers de la Malfeuille par la même occasion.

Johan et pirouettes

Aux commandes des Schtroumpfs Costaud, à lunettes, Cuisinier et de la Schtroumpfette, Osome Studio propose donc un périple résolument écolo aux airs de platformer 3D d'un classicisme certain. Au travers de cinq environnements toujours verdoyants, il faudra donc sauver la nature en aspergeant à tout va un substrat de la plante immunitaire locale, en enchaînant les sauts... pas forcément millimétrés. Derrière son propos naïf bien dans le ton de la bande-dessinée de Peyo, Les Schtroumpfs Mission Malfeuille a tout du jeu destiné aux tout, tout petits : des premières minutes de l'aventure à sa conclusion, l'aventure n'a de cesse de prendre le joueur par la main, à travers une infinie succession de marqueurs qui frôle p̶a̶r̶f̶o̶i̶s̶ souvent le ridicule. Les défis sont pourtant simples, pour ne pas dire basiques : on saute, on grimpe, on vaporise à tout va, au sein d'environnements resserrés, mais les développeurs semblent avoir été pris de panique à l'idée qu'une tête plus ou moins blonde n'ait a chercher son chemin, ne serait-ce que durant quelques secondes.

Que l'on opte ou non pour le niveau de "difficulté" supérieur, il est presque impossible de ne pas mécaniquement triompher des phases de plate-forme très sages qui se multiplient durant la demi-douzaine d'heures que dure l'aventure, quitte à basculer dans l'absurde avec les premiers phases de saut planés à enchaîner dans le vide, alors que l'indicateur de quête se déplace d'un bumper à l'autre... À croire que les enfants sont devenus incapables de regarder plus loin que le bout de leur nez ? Entre ce marquage maladif et les solutions explicités par nos héros, ils n'auront que peu d'occasions de s'interroger.

Ça passe ou ça Cracoucass

Les quelques phases de combat font preuve de la même sagesse scolaire, puisque les rares déclinaisons de malbêtes réutilisées ad nauseam par les lyonnais nécessitent là aussi de vaporiser et de rebondir à tout va, quand elles ne décident pas de tout simplement se suicider devant vos yeux ébahis. Véridique. La recette est simple : chaque ennemi nécessite d’employer l'une des fonctionnalités du Vaporisachtroumpf (sauf, course ou aspiration), la liste est donc assez courte, d'autant plus qu'aucun boss ne vient apporter un peu de variété. Les très, très nombreux checkpoints achèvent d'ailleurs d'anéantir toute forme de challenge en assurant de ne jamais repartir de trop loin. Gare à celui qui oserait profiter d'une palette de mouvements allant croissant pour sortir d'un parcours toujours balisé : les murs invisibles que l'on pensait restés coincés dans les années 1990 achèveront de réduire à néant leurs envies de liberté, tout comme les innombrables cut scenes qui se déclenchent sans crier gare, quitte à couper l'action ou l'échange en cours. Les années 1990 on vous dit..

Il y a pourtant de quoi faire dans Mission Malfeuille : chaque zone affiche un pourcentage de nettoyage qui ne pourra atteindre le score de 100% qu'en effectuant quelques aller-retours une fois en pleine possession de ses moyens, alors que l'attaque rodéo ou les vols planés achèvent de cocher toutes les cases du platformer (trop) sage et (trop) calibré. Les plus persévérants collecteront les items à peine cachés de chaque zone pour débloquer quelques améliorations chez le Schtroumpf Bricoleur, le seul moyen de maîtriser un peu mieux la simili-course (qui n'arrive qu'après deux bonnes heures de jeu) ou augmenter la portée de l'attaque rodéo.

Schtroumpfonie en ut

Le tableau n'est pourtant pas aussi sombre que la toute première aventure des petites créatures : en plus d'afficher des environnements verdoyants et de délivrer un message visant à préserver cette pauvre nature de la folie des hommes, Les Schtroumpfs Mission Malfeuille fait preuve d'une écriture aussi référencée que sympathique, qui n'hésite pas à jouer sur tous les tableaux en citant pêlemêle Toy Story aux côtés de Serge Gainsbourg ou... Plastic Bertrand. La version française sonne sans doute un peu cliché, mais entendre la Schtroumpfette rabattre le caquet de ses lourdaux de congénères est un vrai régal.

La bande-son n'est pas en reste, puisque les mélodies inspirées participent grandement à créer un univers féérique bien dans le ton, grâce à des orchestrations ambitieuses qui ont pour le coup la bonne idée de ne pas seulement viser un très jeune public. Dommage que le même soin n'est pas été apporté à la plastique très sage du jeu, qui peine à afficher toutes les textures lors des travellings cinématiques, ou même gérer plusieurs objectifs à la fois : il suffit en effet de prendre les développeurs de vitesse pour casser l'indicateur, et ainsi piffer pour déclencher la prochaine zone trigger. Apprendre aux minots qu'une phase de debug est toujours indispensable, voilà qui est sage, mais diablement osé...