Menant une vie de miséreux et entouré de faux amis qui ne lui veulent rien de bien, Rufus ne rêve que d'une chose : s'envoler loin de la décharge Deponia afin de regagner l'Elysium, cité suspendue où régneraient le luxe, la volupté... bref, le farniente. Sa route croise par hasard celle d'une jeune et belle Elyséenne, une certaine Goal, tombée malencontreusement du croiseur dans lequel elle se trouvait.

On ira tous à l'Elysium

A la lecture des précédentes lignes, nous reviennent forcément en tête quelques références de la science-fiction, tels que les Metropolis de Fritz Lang et de Rintaro, le Gunnm de Yukito Kishiro, Final Fantasy VII ou encore le plus hollywoodien Elysium (tiens, tiens) du trop rare Neil Blomkamp. Toutes ces oeuvres ont en effet pour point commun de dépeindre une société ou une mégalopole dans lesquelles subsistent un apartheid social, avec les plus fortunés vivant séjournant dans les hautes sphères (littéralement parfois) et les plus démunis tentant tant bien que mal de subsister dans les bas-fonds insalubres de la cité.

Mais là où Deponia se démarque, c'est dans son écriture résolument plus légère que celle des oeuvres précitées. Ici, les personnages sont des caricatures, à commencer par l'ami Rufus, désespérément imbu de lui-même mais fainéant comme pas possible. Les dialogues mettent en lumière les tares des personnages ou les couacs de communication entre Rufus et les autres. Par ailleurs, s'ils sont dans l'ensemble plutôt bien écrits et s'ils bénéficient, comme sur PC, d'une localisation dans la langue de Balzac (le doublage n'étant disponible qu'en anglais, allemand, espagnol et italien), on peut constater une certaine redondance parfois dans ces dialogues.

La direction artistique ne manque pas de panache, avec ses tableaux style cartoon bigarrés et qui fourmillent de détails plus farfelus les uns que les autres. Quant à la musique, elle rend compte de l'ambiance du titre, grâce notamment à ses percussions qui semblent faites de bric et de broc lorsque l'on traverse la décharge.

Everything in its right place

Côté gameplay, on est dans du point and click tout ce qu'il y a de plus classique, avec son exploration sur un plan 2D, ses interactions multiples et son inventaire fourni. Lorsqu'il s'approche d'un item avec lequel il peut interagir, Rufus dispose de trois actions : faire un commentaire souvent caustique, parfois instructif dessus ; s'emparer, si c'est possible, du dit item ; et utiliser un objet déjà présent dans l'inventaire sur l'item. Ainsi, le personnage se trouvera souvent empêché dans sa progression par un obstacle plus ou moins important, et ce sera à lui d'opérer les meilleures combinaisons d'actions et associations d'items afin d'avancer dans l'aventure.

Si l'écriture permet de tenir en haleine le joueur, on peut noter une certaine répétitivité dans le gameplay puisque l'on se contente finalement d'opérer de nombreux allers-retours dans les différents tableaux et d'essayer toutes les interactions. Le jeu met également la patience du joueur à l'épreuve car si certaines énigmes sont assez évidentes (prendre des gants pour ramasser du piment, se servir d'une perceuse pour creuser des trous...), certaines associations sont totalement capillotractées, et ce dès le début de l'aventure. C'est aussi ce qui fait le sel du titre, et on se prend à se demander comment les développeurs ont pu dégoter de telles idées.

Un vrai dépotoir

Si je m'arrêtais là, je conclurais en écrivant que Deponia demeure un titre fort sympathique, même sept ans après sa première sortie. Hélas, quelques ombres viennent sérieusement ternir le tableau. Concernant la technique, les animations ne souffrent d'aucun ralentissement et les temps de chargement sont plutôt corrects. Néanmoins, le titre souffre de quelques bugs d'affichage, avec un personnage qui clignote de temps à autre ; mais surtout, durant ma partie, j'ai été soumis à un bug bloquant m'obligeant à recommencer ma partie quasi intégralement. Particulièrement rageant.

Et enfin, comment ne pas pester sur la politique tarifaire proprement ahurissante sur cette version Switch ? 40 euros pour un titre que l'on peut trouver en ce moment sur Steam pour moins d'1 euro ! Peut-être une trop subtile métaphore des disparités sociales évoquées dans le jeu ? Plus sérieusement, à ce prix-là, pourquoi ne pas avoir proposé, a minima, la compilation Deponia : The Complete Journey qui regroupe les trois premiers épisodes de la série ? Compilation qui, soit dit en passant, était accessible gratuitement il y a peu...