C’est devenu une tradition, pour sa rentrée Shigeru Miyamoto choisit Edge, publication internationalement reconnue pour sa rigueur éditoriale. Le créatif à la tête du puissant pôle EAD parle stratégie produit, gymnastique oculaire et revient sur sa précédente sortie à l’E3 qui visiblement continue à faire des vagues. Des thèmes abordés habituellement chasse gardée du PDG Satoru Iwata dont la convalescence prolongée profite à un profil pétillant qui a toujours fui les responsabilités purement exécutives. Mais la vacance provisoire du pouvoir lui ordonne de prendre les accents d’un dirigeant d’entreprise...
 
Miyamoto aurait pu se contenter d’être le porte-voix du président de Nintendo, et reprendre à la virgule près son récital lénifiant sur le « momentum », ce fameux déclic de marché destiné à remettre en ordre de marche la Wii U. Vous pensez au segment “grand public” ? Raté ! « C’est une catégorie de personnes qui pourrait aussi bien aller voir un film que de se rendre à Disneyland », fustige-t-il. Partir à la reconquête de cette frange de la population sujette à cette disposition « passive » au divertissement, Miyamoto ne veut plus en entendre parler. Il s’agace de ce comportement de consommation opportuniste jusqu’à le qualifier de « pathétique ». Ce pan de marché reste en effet sourd aux expériences ludiques « plus évoluées », vidant de sa substance la force des jeux vidéo.
 
C’est avec cette autorité nouvelle que le truculent créatif confortablement installé dans le fauteuil de responsable d’une branche qui a propulsé Iwata aux commandes de Nintendo aborde la dernière ligne droite qui clos cette difficile année fiscale. D’aucuns prédisent que l’actuel président ne survivra pas à une énième déroute commerciale de la console vedette du fabricant. Une situation dont pourrait profiter le game designer de génie. Reste à assimiler les codes de gouvernance d’entreprise à un âge où l’homme aspire à une paisible retraite.