The Walking Dead

(Ou comment le jeu story-driven prend ses marques)

 

(Alerte Spoil : cet article est susceptible de contenir des spoils sur le jeu The Walking Dead illustrant le propos, j’indiquerai les passages donc si vous n’avez pas fait le jeu ou que vous voulez garder comme souvenir votre propre expérience du jeu éviter ces parties)

The Walking Dead de Telltale est sans conteste un des jeux les plus marquants de ces dernières années. Il a marqué de nombreuse personnes grâce à son histoire, ses personnages, ses enjeux, sa fin.

Mais s'il réussit ce qu’il accompli, c’est parce que dans ce jeu plus que dans la plupart le joueur si retrouve vraiment investit en tant que personne et non en tant que simple joueur.

 

 A propos du comics

The Walking Dead est bien entendu tiré du comics du même nom duquel il tire son univers et quelques personnages (qui s’ils gardent leur personnalité leur change tout de même leur action).

Je n’ai pas regardé la série, mais concernant le comics,( je dois dire que c’est le seul comics que je suis), l’univers dépeint est vraiment intéressant et la progression des protagonistes vraiment forte, de plus les retournements de situations, notamment dû à la mort de certains personnages, sont à mes yeux parmi les plus forts que j’ai pu voir (oui je sais il y a le Trône de Fer aussi, mais les différences d’époques changent radicalement le contexte des morts).

 

Petite introduction sur le jeu

Le jeu quant à lui reste remarquable à bien des égards, il est tout de même perfectible sur de nombreux points comme une technique assez faible, une maniabilité pas toujours très pertinente ou de nombreux bugs/ralentissement. Cependant, ces problèmes ne ternissent que peu l’expérience de jeu qui elle est vraiment exceptionnelle. (Je précise tant qu’on y est que n’ayant pas de PS3, je n’ai pas pu m’adonner à Heavy rain, je ne pourrais donc pas comparer les 2.)

On y incarne Lee, un prof d’histoire qui à cause d’une affaire d’adultère se retrouve en route vers la prison, au large d’Atlanta, seulement c’est précisément ce jour-ci que le problème zombie rentre en jeu, Lee se retrouve ainsi seul, sur le bord de la route, encerclé par des morts-vivants. Il fera assez vite la connaissance de Clémentine, une petite fille de 8 ans que Lee s’efforcera de protéger au péril de sa vie. Leurs pérégrinations les amèneront à faire la connaissance de groupes de survivants avec qui Lee va tisser des liens rendant d’autant plus forts les évènements qui vont survenirs.

 

L’expérience story-driven

The Walking Dead est ce qu’on peut qualifier donc de jeu story-driven, c’est-à-dire qu’il se repose plus sur son scénario que son gameplay. Ce type de jeu est souvent comparé au cinéma (comme Heavy Rain justement), parfois même qualifié de « cinéma interactif ». Bonne chose pour revenir sur quelque chose que je ne peux que contester. Non, The Walking Dead n’est pas du cinéma interactif, on ne fait pas qu’appuyer sur un bouton quand la cinématique se fige pour relancer l’action. Selon moi, The Walking Dead est un vrai jeu de rôle (au sens propre, seulement incarné un personnage, pas du jeu de rôle papier et encore moins un RPG), comprenez par-là qu’on ne fait pas comme dans la plupart des jeux où on ne fait que jouer un personnage, ici on le vit (cette formulation est un peu osée mais au moins ça la rend plus compréhensive).

Car c’est ça qui fait la grande force de The Walking Dead et la raison pour laquelle il ne faut pas rejouer l’aventure. En effet, le fait d’avoir une histoire linéaire de la sorte rend les évènements uniques et c’est ici que l’on rentre dans la magie du titre. Ainsi, si on prend la peine de ne pas rejouer au jeu, on ne vivra les évènements qu’une fois, ce qui induit quelque chose que trouve magnifique dans un jeu, le remord.

*spoil* Pour illustrer ce remord possible, je vais prendre exemple de ma partie, au début du second épisode lorsque l’on fait une marche dans la forêt, au moment où l’on va rencontrer Ben, on est confronté au professeur pris blessé par un piège à loup, ce dernier est attaché avec une chaine à l’arbre proche. Lors de cette scène un groupe de marcheurs se dirige vers nous, nous n’avons donc pas beaucoup de temps et muni de notre hache on peut essayer de sortir le professeur du piège à loup. Personnellement, j’ai commencé par lui donner un coup de hache au niveau de la jambe, car ça me paraissait l’option la plus sensé pour sortir le vieillard de là, je n’ai pas persisté devant ces cris de douleur et à sa demande. J’ai donc ensuite attaquer la chaine, mais il était évident que c’était inutile, j’ai donc par désespoir entamé l’arbre, mais la réaction des autres mon bien fais comprendre l’absurdité de mon geste, c’est ainsi que la boule au coeur j’ai tenté de libérer l’homme en lui coupant le pied, malheureusement, il était trop tard, les marcheurs trop proches. Le groupe a donc dû s’enfuir laissant le pauvre hère avec sa jambe à moitié trancher à la merci de ces êtres sanguinaires. *fin du spoil*

Ainsi, après cette scène on rentre tout chambouler au camp avec la boule au coeur et encore des tâches difficiles à faire. Cependant, ce remord dû à des situations que l’on n’a pas su gérer ou une décision que l’on regrette n’est possible que dans le cas de la partie unique, car si l’on refait la scène en réagissant de manière différente on casse la « magie » en voyant les autres options et on se dédouane de nos agissements en cassant par la même occasion le lien qui nous lie à Lee (oui ce jeu de mot est pourri). Car, de cette  façon on admet finalement qu'on est le joueur tout puissant pouvant vivre cette aventure sous différents angles et ayant un nombre infini de vies. Alors que dans le cas de la partie unique, nous sommes réellement Lee, ces doutes sont nos doutes, ces regrets nos regrets dû à des actions dont nous sommes responsables, ainsi Lee a une vie unique tout comme nous et de cette façon nous l’incarnons pleinement. Un élément qui me laisse penser que c’est la façon de jouer que les développeurs encourage concerne les succès du jeu, en effet tous les succès (à 2 exceptions minimes prêt) sont des succès que je qualifierai de progressions, c’est-à-dire qu’ils s’obtiennent uniquement en progressant dans le jeu et pas en réalisant des actions spécifiques, ainsi pas besoin de refaire le jeu pour le finir à 100% (excepté 2 succès, mais ils s’obtiennent dans le chapitre annexe 400 Days).

De plus ces regrets sont encore accentués par l’une des dernières rencontres du jeu qui va nous mettre en face de nos erreurs (façon de parler bien sûr), en nous montrant que malgré nos efforts on reste un humain faillible et non-maître de la situation malgré nos efforts. Malgré cela on n’est jamais vraiment stigmatisé par ses « erreurs », on a toujours plus ou moins moyen de se justifier quant à nos actes et de s'en dédouaner. Pour conclure sur cette partie j’ajouterais que The Walking Dead est vraiment un jeu à faire, pour ce qu’il apporte au média mais également car c’est un bon exemple de jeu non-fun qui reste cependant un des gros succès critique et commercial de 2012.

 

Les courbes d’intérêt

Maintenant que la majeure partie de l’article est terminé, c’est une occasion pour moi de revenir sur un élément de The Walking Dead particulièrement réussi et qui est un des moteurs majeurs de son succès.

Les courbes d’intérêt (comme vous le savez si vous avez lu le titre) est un élément présent dans la plupart des oeuvres créées et je ne parle pas uniquement de jeu, cette mécanique est également présente dans tout ce qui est films, série, BD, roman, etc. Cela consiste grossièrement en courbe pouvant être représenté sur un graphique, cette courbe représente l’intérêt du joueur pour le jeu (ou le film, etc.), plus la courbe est haute plus le joueur est tenu en haleine par le titre, le schéma classique consiste à faire monter l’intérêt dès le début puis ensuite de faire varier l’intérêt afin de maintenir le joueur intéressé par le jeu, jusqu’à finir par une dernière apothéose et un dernier relâchement.

(Sur ce schéma, les chiffres correspondent à différents moments précis, bien sûr ce graphique est absolument non représentatif et a uniquement pour but d’illustrer.)

 

The Walking Dead exploite ainsi avec brio ce concept, en mettant le joueur sous tension au début de chaque épisode par exemple, puis en alternant des phases de relâchement dans le camp où on peut discuter avec les protagonistes de manière plus posée, en alternant ainsi la tension et la détente jusqu’à un final toujours marquant. (Je tiens à préciser que ce genre de courbe est fractal, c’est-à-dire qu’on la retrouvera globalement à tous les niveaux, ainsi chaque épisode est construit avec ce principe, mais également chaque séquence de jeu et même la saison entière)

Ces courbes d’intérêt ne sont bien sûr pas une nécessité dans chaque jeu ou oeuvre, mais si vous cherchez un peu vous vous rendrez compte que cela reste un schéma de progression très utilisé, en particulier dans le jeu vidéo.

 

Et la suite

Cette article touche maintenant à sa fin et il vient pour moi le temps d’aborder la suite de The Walking Dead, en effet la saison est comme vous le savez en cours de production, le premier épisode étant sorti le 17 décembre dernier, je me suis personnellement jeté dessus (malgré l’absence de patch français pour le moment) et l’ai fini d’une traite, même si on ne perçoit pas tant que ça les choix de la saison précédente (en particulier ceux de 400 Days), on reste scotcher par la narration et cette épisode possède ces moments marquants en partie dû au changement partiel de contexte. J’ai hâte de me plonger dans la suite, ce premier épisode m’ayant plongé dans une mélancolie et surtout une nostalgie que je n’aurais pas imaginée.

Sur ce, il me reste à vous souhaiter une bonne journée et j’aimerais bien sûr savoir quelle relation vous avez eu à propos du jeu et vos expériences personnelles (en limitant le spoil bien entendu).