Les saisons se suivent et se ressemblent pour la saga Pro Evolution Soccer et en soi, c'est une bonne nouvelle. C'est la première impression dégagée, la première vérité qui s'impose après quelques matches d'eFootball PES 2020, un nom à rallonge, que l'on raccourcira certainement très vite dans les prochains jours - si ce n'est pas déjà fait - mais qui dénote de la politique globale de l'éditeur-développeur japonais Konami pour son poulain en short et en crampons : faire évoluer la licence, tout en gardant, approfondissant et bonifiant les fondamentaux placés avec conviction il y a deux ans désormais, avec PES 2018 pour ne pas le citer.

Les saisons se suivent et se ressemblent car le fond de jeu est le même, finalement. Pourquoi prendre le risque de saborder une recette de plus en plus goutûe saison après saison alors qu'il suffit de la touiller de temps en temps, en écoutant les avis des chefs les plus réputés - à savoir les joueurs, ceux en première ligne - pour améliorer ce qui peut et doit l'être ? On a reproché à PES 2019 un jeu trop vite porté vers l'avant, très offensif et, surtout, beaucoup trop aérien, avec une propension à défier les airs pour marquer et faire marquer, là où l'appel de la terre et de la bonne vieille pelouse semblaient plus adéquats. Des reproches qui ne sont pas tombés dans l'oreille d'un sourd. Si Konami n'a pas toujours répondu favorablement aux demandes de sa communauté, il semble que les développeurs aient pris en compte bon nombre des remarques postées ici et là ces derniers mois.

Il faudra construire, plus que l'année dernière. Être précis, encore plus que l'opus précédent

Il faut dire que le volet eSport et l'uniformisation des compétitions (eFootball.Pro et eFootball Open) ont forcément joué là-dedans. Et le résultat est à la hauteur des espérances de mai et des promesses disséminées en juin et juillet dernier. eFootball PES 2020 est un jeu posé, dans lequel il faut rapidement imprimer la donne suivante : en raison de leur inertie, toute la gestuelle des joueurs est lente, lourde (au début), ce qui n'est pas le cas de leur environnement, à savoir la vitesse de sortie du ballon sur leur frappe, les centres, les changements de jeu, et les passes en profondeur, disons-le tout de suite, armes de destruction massives de ce volet, ce qui nous renvoie forcément quelques années en arrière, quand le fameux "triangle" des familles pouvait briser, à raison d'une et unique fois parfois, les plus grands murs défensifs. En clair, il faudra construire, plus que l'année dernière, être précis, encore plus que le titre de l'an dernier, car jouer les remontées de balle rapides, les "une-deux" dynamiques et le rythme à outrance déclencheront quasi de facto une perte de balle, un contrôle trop long ou un geste parasite malvenu dans le dernier geste. Et na !

Le réapprentissage du jeu pour certains et le baptême du feu pour les autres est d'autant plus corsé que la défense est à revoir, également. Si les défenseurs font preuve d'une agressivité bien venue, il va falloir vite comprendre le nouveau système de pressing et faire preuve d'un sens aigu de l'anticipation pour ne pas se faire trop vite déborder. On l'a dit plus haut, les passes en profondeur sont meurtrières cette saison et la ligne défensive a parfois du mal à bien couvrir ses arrières. On vous laisse deviner l'issue... sans compter que parfois, le curseur (même en manuel, fonction qui vous permet de diriger vous-même votre défense, rappelons-le) peut vous jouer un vilain tour (une récurrence sur PES, hélas) au moment de vous lancer à l'assaut du ballon.

Il vous faudra donc privilégier le super cancel (R1+R2), cette annulation d'une course demandée ou automatiquement déclenchée (type pressing) pour vous sortir de ce mauvais pas. Le menu s'annonce copieux donc, et il faudra vite l'assimiler : malgré des gardiens de but bien plus fiables et plus énergiques sur leur ligne (moins dans les airs et dans l'anticipation, aie, aie, aie), le score peut vite gonfler et nos premiers matches en ligne (y compris ceux disputés avec notre Gianni national lors de notre LIVE) n'ont fait que confirmer cette tendance.

Une modélisation toujours au poil, une technique qui l'est un peu moins

Il va donc falloir être patient ou très patient, selon votre degré d'affinité avec la licence, pour maîtriser les arcanes d'eFootball PES 2020. On pense d'ailleurs à ce niveau au "Finesse Dribble", nouveauté portée par le maître du double contact Andrès Iniesta, qui est aussi jouissif à placer qu'agréable à regarder, notamment lorsqu'on se défait de deux joueurs dans un trou de souris. Il faudra juger sur la longueur, hein, si certains gestes ne finiront pas dans la case "craqué" mais pour le moment, et après bon nombre de matches tout de même, ce n'était pas (encore ?) le cas. En revanche, les efforts apportés à la gestuelle des joueurs et à leurs nouvelles animations est appréciable, tout comme leur esthétique. Soyons francs, en termes de modélisation, on a du mal à faire mieux que PES ces dernières années, même si la concurrence a bossé son sujet depuis. Les stades des clubs partenaires sont bluffants de réalisme en tous points et de sacrés efforts ont été apportés à l'ambiance, même si le gap parait encore conséquent à ce niveau.

Il en va de même de la technique pure de ce eFootball PES 2020. Les animations ? On l'a dit : plus saisissantes, plus réalistes donc, moins saccadées, plus fluides et dans le rythme naturel du joueur. Mais certaines d'entre elles posent problème. On pense ici aux collisions entre joueurs, qui accouchent de situations parfois ridicules mais aussi très, très, frustrantes et crispantes aux abords de votre surface. On pense aussi à certains gestes défensifs, qui devraient au moins écarter le danger et ne pas le prolonger (vous savez, ces interventions où le joueur s'arrête mais où le ballon, lui, continue à rouler). Des soucis traditionnels ces dernières années, qui s'accentuent hélas dans les modes en ligne, où les conditions de jeu - dépendantes de la connexion des uns et des autres - sont parfois aléatoires. Amorcé en 2015, le virage du Fox Engine - le moteur physique actuel de la saga - touche sérieusement à sa fin. Le résultat est certes au rendez-vous mais ses limites sont atteintes. On a désormais hâte de savoir ce que Konami nous réserve pour la prochaine génération de consoles.

"Robert, va falloir me muscler ton contenu ! Sinon..."

Bref, il y a du très, très bon dans cette version et du moins bon. Du très bon comme cette protection de balle intuitive, instinctive et régie par les lois de la physique, celle de votre joueur, de son positionnement et de son premier contact avec le défenseur adverse. Du très bon toujours avec une physique de balle encore en nette amélioration, avec des effets saisissants (parfois trop mais ne vaut-il pas mieux en avoir trop que pas assez ?). Et... du bon, niveau contenu. Bon vous avez compris, c'est là que le bât blesse. Certes portée par des licences en grand nombre et de grand standing, probablement d'ailleurs ce qu'elle a eu de mieux dans son histoire, avec une Juventus de Turin exclusive, le retour du Bayern Munich, la Serie A, l'Euro 2020 au printemps prochain et une nouvelle bordée de championnats moins prestigieux mais agréables à jouer, la licence eFootball PES 2020 pêche par un manque de fonds criant, là où sa forme n'est finalement pas loin du sans-faute.

On attendait des grosses nouveautés sur MyClub, le pendant konamien de FUT de FIFA, avec des coaches moins bornés sur leur schéma tactique et un défi plus relevé dans l'acquisition des joueurs. On espérait voir fleurir de nouveaux modules d'entraînement. Ou encore un nouveau mode inédit, pour sortir du carcan habituel que nous propose "Vers une Légende" et la "Ligue des Masters", qui aura eu droit à un lifting bienvenu. On n'a finalement rien eu de tout ça et c'est bien un défaut important que l'on ne peut pas ignorer. On a un peu le sentiment avec ce volet que Konami a soigné l'allure mais pas suffisamment bossé la démarche, avec des idées, et des bonnes, mais pas abouties, au moment de "vendre" son produit et de le rendre plus attractif.

On jugera "MatchDay" sur la durée

Oui, on aime les nouveaux menus mais une fois dans le détail, le tout manque de vie, de visuels supplémentaires. On aime la nouvelle Ligue des Masters mais on n'aime pas son manque d'ergonomie et ses sous-menus mauves donc mais impersonnels. Reste le mode MatchDay, ce nouveau coup d'envoi en ligne censé doper la durée de vie du produit en ligne, avec des matches déterminés (type grosses affiches, derbies ou, comme c'était le cas au moment de notre test, des éliminatoires du prochain Euro). Séduisant finalement - les joueurs choisissent de défendre une équipe à domicile ou à l'extérieur et le meilleur dispute une finale avec des récompenses à la clé -, il demandera un renouvellement perpétuel de la part des équipes pour le rester sur la durée.

Vient l'heure du verdict. Faut-il se ruer sur eFootball PES 2020 ? Oui, car l'expérience de jeu en vaut la chandelle, l'exigence de jeu vaut le challenge et la sensation manette en main, malgré les scories techniques énoncées plus haut, est bonne. Séduisante. On déplorera surtout et avant tout cette année un contenu beaucoup trop chiche et on le fera d'autant plus vivement le 27 septembre, au moment de la sortie du rival de toujours et de sa dernière levée. C'est désormais là, en plus d'une technique à parfaire, que l'on attend désormais la saga. Et c'est là que passera son prochain défi, pour continuer à (re)fidéliser toujours plus de monde.