Toujours bien décidé à se servir d'un casque pour dérouler une histoire loufoque à la troisième personne, le studio Squanch Games fondé par Justin Roiland nous propose une aventure inédite toute droit sortie du cerveau en fusion nucléaire du producteur déjà très largement récompensé.

Vers l'infini, etc...

Trevor Saves the Universe ne se moque pas de vous, du moins dans son titre, puisqu'à l'instar du bon vieux Port-Salut c'est comme qui dirait écrit dessus : aux commandes d'un Chairopian, vision dystopique de l'humanité qui vit désormais le postérieur vissé sur sa chaise volante, le joueur va rapidement faire la connaissance de l'éponyme Trover, un garçon extraterrestre violet possédant de drôles de bambins en guise de globes oculaires. Et il faut croire qu'il existe une sorte de fétichisme de l'orbite, puisqu'un méchant vraiment très méchant du nom de Glorkon s'est emparé de vos deux toutous pour les utiliser en lieu et place de ses yeux. De fil en aiguille, le Chairopian que vous êtes va finalement rester aux côtés de l'affable Trover pour, (jingle dramatique) sauver l'univers. Eh oui. Et parce que l'univers, c'est a priori assez vaste, vous allez visiter à bord de votre vaisseau plusieurs contrées éloignées à la recherche d'items vous permettant ainsi de bondir de planète en planète à la rencontre de nouveaux protagonistes tous plus barrés et relativement insupportables les uns que les autres.

Le jeu ne fait pas forcément preuve de beaucoup d'audace dans ses mécaniques : on retrouve les téléportations auxquelles la réalité virtuelle a déjà eu le temps de nous habituer, même si la perspective de surélever votre point de vue par deux fois permet une lecture un peu pus variée des différents mondes à explorer. En plus de parfois gagner en visibilité, cette prise de hauteur vous permettra également de dénicher des Power Babies, des collectibles permettant d'augmenter la barre de vie de Trevor. Certains d'entre eux nécessitent l'action de notre héros malgré lui, quand d'autres cachés dans les différents environnements s'offriront à vous après avoir une petite manipulation, offrant une chasse aux objets variée et plaisante, qui rappellera forcément de bons souvenirs aux joueurs d'Astro Bot : Rescue Mission.

In a pickle

La palette de mouvements s'enrichira également au fur et à mesure de l'aventure, permettant progressivement de déplacer puis de lancer des objets définis - rien de très folichon, mais sera à chaque fois prétexte à un quiproquo qui deviendra un running gag assez sympathique, sauf pour le pauvre Trover. Les différents environnements colorés à souhait ne font pour autant pas forcément preuve de beaucoup de folie, même si quelques puzzles viennent ici et là obliger à se creuser un peu la caboche. Le jeu s'amuse tout de même à bien combiner les différentes capacités débloquées au fur et à mesure pour donner lieu à des énigmes plus plaisantes sur la fin.

En ce qui concerne les combats, assez simples pour ne pas dire simplistes, ils se résument souvent à occire du mob en pagaille sans avoir besoin de penser à opter pour une stratégie particulière. La routine des ennemis est toujours visible à des kilomètres, et leur botter les fesses en se faisant copieusement insulter ne posera aucun problème.. Vous l'aurez compris : en termes de gameplay, Squanch Games se contente de réciter ses gammes sans grande prise de risque, et ce n'est donc certainement pas pour ses pures qualités ludiques qu'il faudra se pencher sur Trover Saves the Universe.

"La Trique des Clones"

Avec son nom gravé en lettres d'or sur l'écran d'accueil, c'est évidemment pour le style très particulier de Justin Roiland qu'il conviendra se plonger dans l'aventure. Mais même les fans de la délicieuse série Rick & Morty pourraient finir lassés par l'exercice. Si la série co-produite avec Dan Harmon fonctionne grâce à une brillante dualité mêlant des aventures spatio-temporelles loufoques avec un drame familial profond et permanent, Trover Saves the Universe se contente de tirer encore et encore sur la corde de l'absurde et du vulgaire, quitte à risquer de la rompre à force d'insister. Lourdement. Le jeu ne manque évidemment pas de bons mots, de blagues immondes qui raviront les amateurs d'humour noir ou de relations scatophiles entre co-locataires, mais le style volontairement bégayant et imparfait de Roiland, qui semble parfois se regarder le nombril. Pour quelques blagues méta tordantes ou absurdités volontaires de narration là, combien de blagues si prévisibles et redondantes ?

Ceux qui veulent du trash juste pour être transgressif seront servis, et même resservis, mais les autres finiront par se lasser du style, parfois odieusement bavard, et dont la portée n'atteint pas le sens de la série sus-cité. La version française uniquement sous-titrée fonctionne, malgré ses grands écarts et ses censures purement aléatoires, mais ne rend évidemment pas compte à l'écrit des bégaiements so Roiland. En revanche, elle cite Les Inconnus, et pour ça, on lui fait des bisous. Bien obligée de suivre le rythme intensif de cette logorrhée, sachez pour conclure que cette localisation offre donc logiquement une palanquée de textes à lire. Avis aux curieux.