The World Ends With You, le célèbre J-RPG de la Nintendo DS, revient donc sur Switch. Mais attention, le challenge est de taille : comment les développeurs ont ils réussi à retranscrire sur un seul écran un jeu dont l'action se déroulait sur deux, et qui se jouait beaucoup au stylet ? Bref, le résultat est-il en 2018 à la hauteur de l'émoi originel de 2007 ?

The Legend Never Dies

À l'époque de la première sortie, le moins que l'on puisse dire, c'est que le jeu avait vraiment tapé dans l'oeil de notre très cher RaHaN, qui lui avait attribué la note maximale, celle que l'on donne uniquement aux jeux les plus cultes. Il n'était pas le seul dans ce cas, le titre recevant un accueil critique dithyrambique de la part des journalistes et du public. The World Ends With You exploitait alors à merveille les capacités de la DS, en proposant une expérience qui est restée dans les mémoires. Si vous n'avez jamais touché au matériau d'origine, sachez que vous êtes en présence d'un titre avec une ambiance délirante, un peu comme si Persona dansait avec Jet Set Radio, le tout sous acide jusqu'au bout de la nuit, dans le célèbre quartier branché tokyoïte de Shibuya, le tout dans un style bien cartoonesque et avec une bande son chantée toujours super entraînante et dynamique, aux accents plus rock et hip-hop que ceux du jeu d'Atlus cité plus haut. Au design, on retrouve un certain Tetsuya Nomura, souvent raillé pour son travail asymétrique, notamment ici, dans notre chère communauté de blogueurs, mais force est de constater qu'avec The World Ends With You, le résultat était détonnant et ne laissait pas indifférent.

Sur Switch évidemment, on ne pourra plus compter sur les fonctionnalités de double lucarne de la DS, mais la petite dernière de nintendo à elle aussi du répondant en matière de façons de jouer alternatives. Elles vont bel et bien êtres mises à contribution dans The World Ends With You : Final Remix. Deux manières de contrôler le jeu sont disponibles : un mode portable, pour jouer dans le métro, avec des commandes exclusivement tactiles, et un mode posé, sur table ou sur la télé, qui nous rappellera les heures les plus sombres (ou les plus heureuses, à vous de voir de quel côté de la barrière vous êtes) du motion gaming façon Wii. Et puisqu'il est question de mains, sachez que vous n'en aurez besoin que d'une seule : à vous les joies du grignotage de chips en jouant ! Attention tout de même à bien penser à inclure 5 fruits et légumes par jour dans votre rotation culinaire. Et si par malheur vous êtes droitier, vous allez galérer pour prendre des captures d'écran.

The world is not enough

Joy-Con à la main, on utilise donc les boutons pour déclencher les attaques et les déplacements, mais aussi pour réinitialiser le curseur du viseur. En effet, c'est en pointant votre wiimo... euh pardon, votre Joy-Con vers l'écran que vous allez pouvoir déplacer votre personnage et cibler vos ennemis. Le stick pourra quand à lui être utilisé sur la carte pour les déplacements, mais pas en combat. Les commandes de visée répondent bien, mais attention aux grands écarts de poignet. Aussi, même si le bouton de réinitialisation reste plutôt efficace, on perd assez souvent son pointeur sur l'écran, sa position de base étant difficile à garder, et ce d'autant plus si notre télévision est grande. Clairement, nos propres mouvements et décalages créent une certaine imprécision bien agaçante, qui empêche de profiter du jeu dans des conditions optimales.

Du coup, cela s'avère plus facile en mode portable. Mais avec la Switch posée sur les genoux, on va vite ressentir une autre frustration : celle d'avoir à disposition tous ces boutons et de ne pas pouvoir s'en servir ! Le mode portable oblige d'utiliser des commandes exclusivement tactiles, et comme à l'époque de la 3DS, dans ce cas, on vous conseille l'utilisation d'un stylet plutôt que vos gros doigts qui vont venir cacher l'écran de façon assez constante et importune. Devant cette insatisfaction, j'ai tenté le coup et on peut jouer uniquement avec la tablette dans les mains, Joy-Cons détachés, avec les pouces, mais le contact des "rails" de chaque côté de la machine reste assez désagréable. Quant aux Joy-Con qui restent connectés puis provoquent une interruption du jeu lorsqu'ils entrent en veille... On peut décider de les laissés branchés, mais à moins d'avoir les mains de Shaquille O'Neal, les Joy-Con gênent et forcent à faire le grand écart avec les pouces. On aurait aimé pouvoir utiliser le stick en toutes circonstances, tout simplement. Bref, vous l'aurez compris, que ce soit en mode portable ou en mode table/télé, il va non seulement falloir sortir de votre zone de confort et laisser votre fidèle manette sur le bas-côté, mais aussi faire avec des commandes qui restent très douteuses en toutes circonstances. Sur DS en 2007, le jeu était au final bien plus confortable...

The War Of The World Ends With You

De plus, il fallait s'en douter, la mise en scène est parfois moins efficace sur un seul écran, et quelques effets visuels passent forcément à la trappe. Les dessins créés pour le jeu perdent énormément en verticalité, et même sans faire de comparatif, on se rend compte que la découpe de certaines illustration paraît abusive. Et si l'on compare, on constate qu'on à perdu la moitié de quelques dessins durant l'opération. Toujours au niveau de la mise en scène, pour les avancées dans le scénario, on reste fidèle à ce qui se faisait il y a 10 ans, avec des textes en français, même si cela fonctionne un peu moins bien à cause des petits soucis d'écran évoqués juste avant. Mais par rapport à des productions plus récentes, en termes de visual novel, on est clairement un cran en arrière, avec très peu de doublages. Qui restent encore une fois en Anglais. Le déroulement de l'intrigue demeure de toutes façons assez minimaliste, parfois cryptique, et avec malgré tout quelques longueurs. En fait, ça tombe bien, The Worlds Ends With You est un RPG, pas un roman visuel. Et de ce côté là, pas de souci à se faire.

On y incarne toujours Neku, qui se retrouve malgré lui entraîné dans un jeu mortel, dans lequel il faudra collectionner des badges et des fringues pour s'en sortir. 10 ans après, The World Ends With You demeure un très bon J-RPG, même s'il va proposer un contenu un peu différent. Pour ce que est de la collection, on reste sur du classique et on continue à partir à la chasse aux loots en tâtonnant et en jouant sur les difficultés, pour trouver de nouveaux badges qui ouvriront les portes de la suite de l'aventure, et on pourra aussi en utiliser certains pour gagner de nouvelles capacités en combat. Attention à bien choisir ceux qui sont adaptés à son prochain affrontement ! Et il faudra aussi faire attention aux fringues que l'on équipe comme accessoire : chaque zone possède sa propre mode à suivre, et porter les vêtements les plus hypes vous conférera des bonus non négligeables. Pour qui aime finir ses jeux à 100%, il y a du travail avec The World Ends With You, et vous pourrez en plus bénéficier d'un chapitre bonus inédit à cette version Switch, avec de nouveaux personnages, quand vous serez parvenus à la fin du jeu. La formule fonctionnait déjà il y a dix ans, et c'est toujours le cas aujourd'hui.

Bien évidemment, là où le jeu montre beaucoup différences avec l'original, on s'en serait douté, c'est au niveau des combats, qui changent clairement pas mal à cause du simple écran. Si l'on garde ce système demandant de balayer, frotter ou appuyer sur l'écran, d'un coup de stylet ou de Joy-Con, pour les coéquipiers, désormais c'est bien différent : ces derniers se gèrent un peu tout seuls, et viennent de temps en temps vous filer un coup de main sur votre écran, un peu comme les badges de pouvoir, en fait. C'est un peu décevant compte du tenu du gameplay asymétrique que proposait le jeu il y a 10 ans, mais au final, ça fonctionne toujours et les combats restent bien rythmés et doivent toujours êtres bien préparés et gérés si l'on ne veut pas se retrouver à cours de solutions rapidement. Et pour les nostalgiques, on retrouve parfois un clin d'oeil au mode deux écrans, avec notre partenaire seul, sur une autre partie de l'arène. De plus, cerise sur le gâteau, un mode deux joueurs à été implémenté en mode table ou télé, dans lequel chaque joueur dirige un des personnage avec son Joy-Con pendant les combats. Un ajout sympathique, qui fonctionne bien et qui ajoute un peu de valeur à un portage qui en a bien besoin pour justifier son achat aujourd'hui.

Portage déception

En effet, le changement de machine et le fait que le jeu ne soit désormais plus jouable que sur un seul écran implique un travail de refonte graphique assez titanesque : quasiment toutes les phases de narration ont dû être retravaillées, en superposant désormais les informations contenues sur deux écrans dans un seul. Et sincèrement, au vu de la qualité globale de l'ensemble, on ne doute pas un instant que Square est une entreprise très responsable qui a clairement gardé au chaud tous les assets artistiques de son jeu 10 ans durant pour les retravailler avec les outils plus puissants d'aujourd'hui. Pas comme Konami et sa compilation Silent Hill, quoi.

Tous les sprites et illustrations, pourtant de très basse résolution sur DS, ont étés retravaillés pour pouvoir être affichés correctement sur l'écran de la Swicth, et le résultat est assez bluffant que soit en mode portable ou sur la télé. L'ensemble est magnifique, même 10 ans après, et l'identité visuelle du titre est encore très forte. Clairement, là dessus, The World Ends With You : Final Remix fait vraiment plaisir à voir. Mais en revanche, on pourra clairement trouver à redire dans tout ça : ce travail, il avait en fait déjà été fait pour la version mobile dite "Solo Remix", sortie en 2014 sur iOS et Android. Que ce soit au niveau des graphismes, mais aussi des commandes tactiles et des combats. Donc franchement, alors que le jeu est vendu quasiment plein pot sur Switch et plus de deux fois moins cher sur smartphones et tablettes, on peut décemment râler de toutes nos forces, même si cette version Switch apporte en effet un chapitre bonus, du motion gaming moisi et un mode deux joueurs.