Bien connu des amateurs de jeux d'aventure à l'ancienne, la série Syberia a toujours eu un peu de mal à trouver son positionnement, situé quelque part entre les point and click traditionnels et les jeux immersifs à la Myst. À sa sortie, certains l'on décrié, voire vilipendé, pour son côté trop simpliste ou trop éloigné des ténors du genre (Maniac Mansion, Monkey Island et compagnie), tandis que d'autres ont loué son ambiance et son efficacité narrative. Si vous n'avez jamais eu l'occasion de poser vos mains sur un PC vers l'an de grâce 2002, vous avez donc probablement raté ce qui était à l'époque, quoiqu'il en soit, une curiosité du jeu d'aventure.

Kate Croft ?

Dans Syberia, on dirige Kate Walker, une avocate aussi coincée que son jean, qui est envoyée par son client dans un trou perdu pour acheter une fabrique de jouets. Le jeu commence donc dans une bourgade mystérieuse, mais les choses vont rapidement se compliquer et rien ne va se passer comme prévu. L'aventure sera bien évidemment jonchée d'objets en tout genre à ramasser, de mécanismes à enclencher, d'énigmes à résoudre et de paysages à observer. Si certaines énigmes sont parfois un peu ardues, l'ensemble de la progression se fait assez naturellement et l'histoire s'avère suffisamment bien écrite pour rester prenante.

Droit dans le mur

Ce portage PS3/Xbox 360 ne révolutionne rien et se contente, globalement, d'adapter le jeu d'antan sur les supports concernés. Bien entendu, un peu comme à l'époque sur les versions PS2 ou Xbox première du nom, le gameplay a été adapté au pad. Et de ce côté-là, c'est plutôt convaincant. Notre héroïne se dirige avec les sticks analogiques et une icône apparait à l'écran dès qu'on se trouve à proximité d'un objet ou d'un élément de décors interactif. En gros, manette en main, je dirais que le feeling est très proche des premiers Resident Evil en termes de maniabilité, avec tous les écueils un peu désuets qu'on avait à l'époque (personnage qui continue de courir contre un mur, difficulté à se tourner et se retourner dans la bonne direction, et j'en passe). Ce n'est pas pour jouer les esprits chagrins, mais on peut tout de même regretter que les développeurs se soient contentés de porter le jeu sans essayer d'en profiter pour gommer les défauts les plus crispants. D'un autre côté, les amoureux d'authenticité seront ravis de constater que le titre est intact et qu'il a été porté tel quel, ou presque.

Carte postale

Une des grandes particularités de Syberia est d'offrir une succession de paysages et de décors, avec une direction artistique toute particulière qui ne plaira pas à tout le monde. L'ambiance à la fois mélancolique, presque poétique, voire même un peu inquiétante qui s'en dégage avait marqué son époque et le design de Benoît Sokal donne au titre une réelle personnalité. Malgré tout, certains détails, ou plutôt leur absence, trahissent le grand âge du jeu : les décors sont constitués d'arrière-plans fixes sur lesquels les personnages ont été intégrés en 3D polygonale, intégration d'une qualité franchement inégale. Ensuite, certains passages gâchent un peu la fête : il n'est pas rare de traverser un grand court d'eau parfaitement figé, ou de marcher dans une flaque sans créer la moindre éclaboussure. À moins d'être un amoureux inconditionnel du rétrogaming, ça fait un peu tâche par les temps qui courent et c'est là qu'on s'aperçoit que le jeu a assez mal vieilli, surtout d'un point de vue technique.

Accrochage

Enfin, d'autres éléments s'avèrent nettement plus problématiques et j'avoue avoir eu du mal à passer outre : par exemple, lors de nos déplacements, on est régulièrement accroché à des petits bouts de pixels invisibles qui nous empêchent tout simplement d'avancer et qui nous obligent à tourner sur nous-même pendant plusieurs secondes afin de nous dégager. Dans le même genre, j'avoue avoir eu beaucoup de mal à me repérer et à me déplacer dans les décors, la faute à ces fichus angles de caméra fixe pas toujours bien placés et qui datent d'un autre âge. Notez tout de même que la version iPhone et iPad bénéficie d'une maniabilité étonnamment convaincante et qu'une partie de ces reproches s'adressent surtout aux moutures consoles. Malgré ça, Syberia reste un jeu d'aventure doté d'un scénario bien écrit, de dialogues intéressants et plutôt bien doublés, mais surtout d'une ambiance captivante, pour peu que vous ne soyez pas trop du genre impatient. Car attention, le moins que l'on puisse dire, c'est que le rythme est posé... parfois trop. Le jeu prend son temps et cela risque d'agacer bien des joueurs.