ATTENTION : ce test contient des spoilers de l'oeuvre littéraire Le Trône de Fer de George R.R. Martin et de la série de HBO jusqu'à la saison 4. Vous êtes tellement prévenus que, si vous mouftez, on vous envoie Hodor.

Vous vous appelez Gared Tuttle. Fils de fermier et jeune écuyer, votre vie est faites de tâches ingrates. Mais cela va changer. Ce soir, sur le camp, on célèbre. Et, dans l'euphorie, votre seigneur a décidé de vous faire part d'une nouvelle importante. Vous serez bientôt chevalier. La joie vous envahit. Vous avez cependant l'impression que quelque chose cloche. Les noms familiers entendus au cours des différentes conversations vous mettent la puce à l'oreille. Vous êtes au pied du château des Frey. Cette nuit sera connue de toutes et de tous dans Westeros comme les Noces Pourpres (Red Wedding en V.O.). Vous en êtes un des rares survivants.

Le fond de l'air est Frey

S'appuyant sur cet événement majeur, ce premier volet vous permet d'incarner à tour de rôle plusieurs personnages liés à la maison Forrester, dont la loyauté envers les Stark marque le début d'une véritable descente aux enfers. Comme dans le feuilleton, dont le générique est d'ailleurs repris à la fin de la première séquence, vous aurez plusieurs destins à suivre. Et manipuler, selon la formule habituelle semi-point'nclick du studio californien, faite de dialogues à choix multiples et de phases d'action à l'aide de QTE qui fonctionnent assez bien. La présence d'un inventaire est anecdotique et l'idée-même de puzzles semble utopique dans cette nouvelle expérience narrative. L'important réside dans les décisions prises dans la hâte. Aucune ne sera jamais bonne. Vous décevrez forcément quelqu'un, vous mettrez en danger, en faisant preuve d'arrogance, de laxisme ou en plaçant votre confiance là où il ne faut pas. Bref, on n'est pas chez Mon Petit Poney. Vous pouvez préparer, outre un dico d'anglais, les médocs pour les noeuds à l'estomac.

Stark Academy

Outre Gared, qui a droit aux phases les plus mouvementées, on incarne Ethan, nouveau et très jeune seigneur des Forrester qui va devoir apprendre à diriger sa maison et composer avec la visite d'un personnage hostile, ainsi que Mira, la grande soeur devenue servante de Margaery Tyrell à Port-Réal et qui va, quant à elle, s'embourber dans des intrigues politiques l'obligeant à marcher sur des oeufs pour le bien des siens. Le ton change suivant le personnage incarné, la répartition des tâches semble naturelle, l'influence de chaque partie sur une autre se ressent un peu et le rythme se tient. Reste qu'on ne peut s'empêcher de penser, à mesure que l'histoire progresse et sachant que d'autres seront jouables par la suite, un développement identique à celui de la famille Stark. C'est d'ailleurs un des reproches que l'on peut adresser : si les Forrester sont "inédits", la composition fait déjà-vu. La mère dont le physique et la stature rappellent salement Catelyn, le "fils adoptif" qui doit se racheter en chevauchant vers le Mur, la frangine qui risque les mêmes humiliations que Sansa... Pas besoin de vous faire un dessin. Mais on pardonnera.

Démarre le Snow

Le fait est que cela s'avère suffisamment bien écrit et mis en scène pour que l'on plonge le sourire aux lèvres - enfin, quand on n'écarquille pas les yeux d'effroi. Cette impression de participer à un épisode télévisé de deux heures et quelques, dans lequel on aurait l'illusion que nos décisions comptent, est tenace. Il y a ce côté cru, sale, choquant, sans concession, que la direction artistique, bénéficiant d'une petite touche picturale, parvient presque à adoucir. Et puis un voice-acting époustouflant de la part de chaque protagoniste. Y compris des acteurs qui se sont prêté au jeu. Vous croisez bien Tyrion (Peter Dinklage) et Cercei (Lean Heady), Margaery (Natalie Dormer) et son petit nez tout mignon qui bouge quand elle parle, ainsi que le décidément fort détestable Ramsay Snow/Bolton, que le gallois Iwan Rheon campe avec un aplomb certain. On peut même dire qu'il vole le show. Et participe grandement à provoquer une réaction bien connue des fans du téléfilm et des bouquins : un torrent de larmes en attendant la suite.

On redoutait le coup de mou, mais encore une fois, force est de reconnaître que Telltale, qui n'a pas l'air de vouloir lâcher sa formule assez peu orientée jeu vidéo dans le sens "traditionnel", n'a pas perdu son talent pour s'approprier les licences. On est facilement happé dans l'histoire de cette famille qui semble destinée aux pires outrages et on sent un potentiel gigantesque pour le reste de la saison.