Le scénario de Far Cry 2 se veut réaliste et est amené durant tout le jeu par touches plus ou moins subtiles. Version courte : vous êtes chargé de descendre le Chacal, un trafiquant d'arme spécialisé pour balancer de l'huile sur le feu de tous les conflits de la planète. Son truc à lui : armer les deux camps et encaisser les chèques. Un job d'avenir à mon avis. Mais ce n'est pas le débat...

Des débuts difficiles

À cause d'un didacticiel qui ne dit son nom qu'à la fin de quelques missions, les premiers pas dans l'Afrique de Far Cry 2 sont assez pénibles. On vous oblige à suivre l'ordre des missions à la lettre, avec des surprises stupides à la clé. Vous voulez aller au bar ? Niet ! La porte est fermée tant que vous n'aurez pas visité l'armurerie. Qui vous fait le coup de la vente d'armes forcée, sous peine de ne pas remplir vos objectifs. Suivez les flèches on vous dit ! Pénible. Tout aussi artificiel, la présentation de vos compères. Qualifiés de "partenaires préférés", vous ne les connaissez pas et eux non plus. Mais ils sont déjà prêts à donner leur vie pour vous... Pour le scénario prenant et réaliste, on repassera. Résultat : j'ai eu un mal de chien à me plonger dans l'aventure, surtout que j'ai trouvé les interactions avec les NPC passablement ratées. Ça ne s'arrangera malheureusement pas après : les motivations de notre héros sont parfois bien obscures, et on navigue entre les factions uniquement parce que certaines d'entre elles arrêteront de vous fournir en jobs, sans plus d'explications.

Les bases de la guerre

Le concept de ce FPS est donc de vous plonger dans un monde ouvert de 50 Km², puis de remplir vos missions comme un brave petit. Le temps passe, les journées voient défiler toutes les teintes (c'est du reste superbe) et pour vous, c'est la course permanente d'un indique à l'autre pour trouver des boulots et vous faire un nom dans le coin. Téléphone portable, bars locaux et QG des forces en présence seront des sources inépuisables de tâches à accomplir. Généralement du massacre de base, mais après tout, vous n'êtes pas là pour leur apprendre la dentelle. On se heurte du coup passablement vite au problème de base de ce FC2 : c'est répétitif et chiant. Oui, oui : chiant. "GTA dans la jungle", l'idée est séduisante, mais la mise en application est loin d'être parfaite. Prendre une bagnole, rouler, défoncer les camps qui bloquent certains passages (et qui seront là, flambant neuf, à votre prochain passage) pour aller se battre 5 minutes de l'autre côté de la carte, ce n'est pas ma définition d'un titre au gameplay pensé correctement. Surtout que si vous explosez votre caisse, il faudra terminer la route à pied. C'est la jungle, pas New York ! Far Cry 2, première simulation de marche forcée ?

Map.google.com

C'est d'autant plus frustrant que la taille du monde exploitable est gigantesque, les missions variées et souvent très fun, mais ces incessants va-et-vient sont un véritable "tue l'action". J'ai été encore plus découragé de voir certaines zones de mission que de devoir prendre mon scooter sous la pluie pour un rendez-vous de l'autre côté de Paris. Quand un jeu vidéo ressemble à une corvée, il y a comme un problème... Le pire dans l'histoire, c'est qu'on pourrait imaginer passer furtivement à côté d'un camp, éviter des patrouilles, etc., mais non : les ennemis, généralement proches de la trisomie quand il s'agit d'avoir une réaction un peu logique en combat rapproché, sont en revanche capables de vous repérer à des distances dignes de Steve Austin ! Et ils vous tireront directement dessus... aucune chance que vous soyez un pote égaré... ils ne doivent pas avoir d'amis. Et plus on avance, pire c'est : des camions kamikazes débarquent sur vous comme la misère sur le CAC40, ça canarde de partout et on aura depuis longtemps abandonné l'idée d'être en face d'autre chose qu'un FPS basique, au joli moteur 3D mais bêtement bourrin. Heureusement, un système de bus vient un peu alléger la douleur, pour permettre des trajets rapides et sans embûches. La question reste : pourquoi seulement 5 arrêts ? Pourquoi compliquer la vie du joueur pour rien ?

Mission : FAILED

Rater une mission, c'est une chose. Rater une mission parce qu'un coup de fil vient "d'écraser" la précédente qu'on a pas eu le temps faire, c'en est une autre... D'une manière générale, l'interface de FC2 est mal pensée. La gestion des missions, l'accès à la carte, son utilisation, l'exploitation des jumelles pour le marquage de cibles, tout est lent et fastidieux. Quand ce n'est pas complètement raté. La faute à des erreurs de design basiques et des animations jolies, mais juste pénibles au bout de quelques heures de jeu. Certaines idées comme le fait que votre héros soit atteint de la malaria et ait besoin de pilules pour voir clair viennent alourdir un gameplay déjà pas très digeste, tout en justifiant des missions annexes (trouver les fameux médocs). Idem pour les armes de vos ennemis, qui s'enrayent comme ce n'est pas permis (sauf quand eux les utilisent). Bref : certains choix ressemblent plus à un amalgame d'idées pour forcer un côté réaliste, que les développeurs ont massacré par ailleurs.

Effet tunnel

On continue avec les désagréments en parlant rapidement du fait que même en écran large, FC2 offre une vue réduite à 70°. On ne voit rien sur les côtés, l'impression d'être handicapé est assez flagrante et vu les performances du moteur 3D, difficile d'expliquer ce choix qui, pour le coup, nuit à l'immersion. En plus on ne profite pas autant du paysage, ce qui est bien dommage. Car oui : Far Cry 2 est un jeu magnifique. Les paysages sont somptueux, les objets et décors très bien modélisés et on reste effectivement béat devant le feu qui se propage après un lancer de cocktail Molotov ou un génocide au lance-flamme... Pyromane, un métier, une passion ! L'ambiance sonore est tout aussi bluffante, et permet de passer outre les erreurs grossières du game design, les ennemis qui se relèvent après 12 balles pour éléphants et autres incohérences du scénario.

Call of Duty Jungle

Côté multijoueur, on retrouve le système de Call of Duty 4, avec armes verrouillées et points d'expérience à accumuler pour y accéder. Les modes de jeux sont classiques et vont du (team) Deathmatch à une course aux diamants, en passant par le contrôle de zones. L'interface est là encore largement perfectible et cette partie souffre du même feeling un peu mou des armes. Tout ça manque de punch. Ça manque aussi de munitions du reste ! Et c'est très pénible sur les cartes de contrôle justement... Cela dit, le potentiel est là, grâce aux véhicules et possibilités offertes par les cartes. Le nombre de ces dernières devrait du reste exploser grâce à la communauté : Ubi livre avec le jeu l'éditeur de maps, qui semble puissant et relativement facile à mettre en oeuvre. L'avenir nous dira si ça sera suffisant pour se faire une place dans le monde impitoyable des FPS online.

Brouillon à mettre au propre

Pour profiter de ce titre, il faut clairement faire abstraction de beaucoup de défauts, ce qui est loin d'être évident. Mais sous cette couche de maladresse et de choix douteux, on sent que le concept général est bon, que c'est une direction à creuser. Cela dit, la liste de points à améliorer est longue, et pas évidente à réaliser. En l'état, Far Cry 2 est donc un titre décevant. Et si mon test se montre dur envers lui, c'est aussi parce que j'en attendais beaucoup plus. Plus d'action, plus de maîtrise, plus d'émotions... Ça n'empêche pas de prendre du plaisir, voire de s'éclater dans certaines séquences, mais le tout manque trop de cohérence à mon goût. J'espère que nous aurons droit à un Far Cry 3 grandiose pour oublier tout ça !