Il était une fois les Fables. Ceux-ci n'étaient autres que des personnages et créatures de contes... bien réels et quasiment immortels. Ils furent chassés de leurs royaumes par celui qu'ils nomment l'Adversaire. Ils s'installèrent, sans rien révéler de leur existence, parmi nous. Tandis que ceux ressemblant à des humains (appelés "mondains") fondèrent Fabletown à New York City, les bestioles furent placées dans un lieu baptisé la Ferme. A l'exception de celles ayant la capacité de prendre une allure "mondaine", par leur volonté où grâce au sort de Glamour. Aux côtés de Blanche Neige, de Barbe Bleue, du Prince Charmant ou encore de Cendrillon, on trouvait un certain... Grand Méchant Loup (soit Big Bad Wolf) ! Oui, celui-là même qui avait embêté le Petit Chaperon Rouge et les Trois Petits Cochons. Conservant une apparence d'homme, Bigby Wolf s'était racheté une conduite et intégré à la communauté. Au point de devenir le shérif de Fabletown. Il était une fois un personnage ô combien important et charismatique de l'univers de Fables que l'on allait incarner dans une sombre enquête prenant place une vingtaine d'années avant les premiers comics...

Bigby, zou !

Ce protagoniste principal au passé trouble va se révéler l'élément central de cet épisode initiateur. Forcément, lorsque les bases sont celles de The Walking Dead. Du choix des mots durant les dialogues ou du fait de privilégier un chemin plutôt qu'un autre découlera des conséquences parfois peu joyeuses, autant pour votre enquête que votre réputation. Et que voulez-vous que soit Bigby Wolf ? Avec lui, difficile de savoir sur quel pied danser. Si l'introduction montre un shérif déterminé à faire régner un semblant d'ordre, la suite, présentant d'autres figures des comics, va tout de même rappeler qu'il a été vilain. Et qu'il peut encore laisser parler son animalité, quitte à égratigner sa réputation. Il n'est pas Lee Everett, au tempérament vierge et devenant catalyseur d'émotions dictées par la simple envie d'aider une adorable petite fille nommée Clementine. On sait qui il a été, une bête qui a commis nombre de méfaits et effraie ses congénères. Mais qui veut-il être ? Un homme qui veut se racheter et accomplir son boulot de shérif en essayant de garder un semblant de contenance, ou quelqu'un qui veut toujours inspirer la peur en étant intraitable et violent ? Quoiqu'il en soit, vue la gueule de Fabletown, en proie aux mêmes maux que notre monde (problèmes d'argent, d'addiction, de mœurs légères), il ne faut pas s'étonner de rencontrer un peu de résistance. Et donc, de montrer les crocs quand c'est nécessaire.

Shérif, fais-moi peur

Si ce point'n click mise sur le dialogue et la recherche d'indice, bien encadrée, suite à un étrange meurtre, l'action surgit par moments sous forme de bastons ou de courses-poursuites. Comparé à The Walking Dead, on note une sacrée poussée d'adrénaline. On reste dans l'univers - maudit par certains - des QTE, avec des poussées de sticks, de boutons adéquats et le placement d'un réticule devant s'achever par la pression d'une gâchette (sur 360, version testée, tout du moins). Mais cela se révèle autrement plus rythmé et beaucoup mieux mis en scène. De quoi rendre les quelques bastons assez intenses, brutales. Pour en finir avec le jeu des comparaisons, sachez que la réalisation se montre un tantinet plus fine, distillant volontiers une ambiance polar de bon aloi, mais que les soucis techniques n'ont pas disparu. Entre des transitions encore hachées ou des chargements étonnamment longs entre deux scènes, il y a de quoi être un peu déçu. Surtout quand tout est travaillé, notamment l'ambiance sonore et l'acting vocal absolument divins, pour vous offrir une immersion sans faille. Dommage.

To be Continued...

Evidemment, maintenant que vous savez que c'est un joli jeu d'aventure, qu'il propose une fois de plus des dilemmes cornéliens et un héros haut en couleur, la question reste de savoir si l'on peut prédire son succès sur le long terme. Cet épisode d'exposition renferme en lui nombre de promesses. Ses dialogues, son écriture et son casting, ses personnages de contes parfois dépressifs (Crapaud de Du Vent dans les Saules, le bûcheron qui a sauvé le Petit Chaperon Rouge, Colin le cochon, Bufkin le singe ailé, etc.) sont savoureux. Ses révélations également. Quant à son cliffhanger, c'est tout à fait le genre d'événement qui fait hurler (surtout les connaisseurs). Et qui suggère pas mal d'émotions pour le volet suivant. Alors, en l'occurrence, on peut certainement parler de mission réussie pour Telltale... Mais le jeu demandera peut-être de la patience avant d'être adopté par les anglophobes : tout est en effet dans langue de Shakespeare.

Me retrouver dans une sorte de Mike Hammer (bien que Bigby tienne davantage, physiquement, de Kurt Russell) au cœur de Fabletown, comme le premier arc scénaristique du comic book le proposait, m'a profondément plu. Telltale a su trouver la façon d'aborder cette nouvelle licence, avec un cachet différent et une petite touche polar années 80 qui fonctionnent à merveille. Le système de choix semble affûté et je n'ai aucun doute concernant le fait que mes actes, différents de ceux d'autres joueurs avec lesquels je n'hésiterai pas à discuter, auront des répercussions très importantes par la suite. Suite que j'attends avec impatience tant cela s'annonce brillant.