Test et paragraphe de la version PC commerciale réalisés par Cafeine.

Pourtant, il ne faudra pas s'attendre à une excellence aussi surprenante que celle de Red Dead Redemption cette fois. Rockstar a choisi de s'en tenir un minimum à la base de la licence, c'est-à-dire un shoot à la troisième personne dans la peau d'un Max Payne qui sert autant de héros que de narrateur désabusé de sa propre descente aux enfers. Ça a ses qualités, et ses défauts.

Monde de merde

On retrouve ainsi pendant la douzaine d'heures de la campagne solo un Max toujours au fond du trou, qui s'apitoie autant sur le sort du monde que sur le sien. Parfois à la limite du trop plein, d'ailleurs, puisque certains pourraient avoir plus envie de le cogner que de le plaindre, tant il déborde alternativement de cynisme et pessimisme. Mais c'est bien entendu l'aventure elle-même qui se chargera de lui en coller plein la gueule. Cette dernière use de flashbacks réguliers et efficaces pour faire découvrir au joueur les événements qui ont amené Max à fuir New York pour Sao Paulo, à faire la connaissance de Passos, celui qui l'accompagne dans son nouveau job de monsieur sécurité pour le compte d'une riche famille brésilienne. La narration, comme toujours chez Rockstar, se montrera soignée, l'écriture fine, les dialogues savoureux, et on suit ainsi les pérégrinations d'un Max qui va se retrouver, une fois encore, empêtré dans un truc qui le dépasse. Mais, cette fois, il finira par en hériter un (tout) petit côté John McLane assez rafraîchissant, qui lui donnera la force d'aller au bout de sa route, de mettre à jour une conspiration bien dégueulasse, et de prendre sa revanche avec un final dans un aéroport assez dantesque. La base reste donc la même, mais Rockstar se réapproprie le personnage efficacement. On regrettera quand même la disparition des cinématiques en bande-dessinée qui avaient tant de charme, même si elles sont remplacées par un multi-fenêtrage impeccablement réussi, agrémenté d'effets de distortion soutenant le ton sombre de l'ensemble alors que Max continue de s'empiffrer d'antalgiques et d'alcool. Signalons par ailleurs qu'elles masquent impeccablement tout chargement, pour permettre une aventure sans temps mort, régulièrement relancée par une intrigue qui progresse à un rythme soutenu.

Pas de boulette sur le bullet

Si côté univers, et narration, Rockstar s'est donc tout de même un tantinet éloigné de Max Payne 1 et Max Payne 2 en insufflant sa touche aux personnages et à l'histoire, restant plus ancré dans une réalité dure en évitant à Max (et aux joueurs) les délires hallucinatoires, côté gameplay, pas de grands changements à signaler. On reste toujours dans de l'action pure, à enchaîner les fusillades séquence après séquence en profitant du bullet-time caractéristique de la série. Ainsi, les grands principes restent là : pas de régénération automatique (on consomme des antalgiques pour restaurer sa jauge de vie), une jauge d'adrénaline qui se remplit quand on se fait tirer dessus et baisse quand on utilise le bullet-time qui ralentit l'action, et un arsenal réaliste qui permet à max d'utiliser une ou deux armes de poing, et/ou une arme d'épaule. Seul ajout notable : le système de couverture. Il utilise classiquement un bouton pour placer Max en couverture, se révèle efficace, mais surtout indispensable. Tout du moins, dans les modes de difficulté normaux et supérieurs, surtout si on opte pour une visée sans assistance. Les fans hardcore de shooting devront penser à le faire, d'ailleurs, sans quoi le jeu se révèlera trop facile pour eux. Les débutants y gagnent en revanche une accessibilité accrue. Il y a trois niveaux d'assistance du "lock" de visée : total, partiel, et désactivé. Les niveaux de difficulté, quant à eux, jouent sur le nombre de painkillers et de munitions disponibles, et la résistance de Max. On regrettera juste une IA qui se contente d'être efficace, mais sans surprises. Mais quoiqu'il arrive, il faudra faire bon usage des couvertures, du tir en esquive qui déclenche un bullet-time pendant que Max saute dans une direction à la John Woo, et du bullet-time classique qu'on active et désactive en cliquant sur le stick analogique droit. Enfin, une double pression sur le bouton "A" pendant une course déclenche une roulade qui permet d'éviter certains tirs.

Frénétique plus que subtil

Si quelques séquences spectaculaires aux ralentis automatiques, et à bord de véhicules ou en glissade prolongée varient un peu la donne, l'ensemble de l'aventure consiste malgré tout à enchaîner les fusillades. Il y a bien ça et là, quelques trucs dans le décor à utiliser, comme des barils explosifs bien sûr, ou, plus subtilement, des cales retenant une voiture stationnée en pente ou des mécanismes pneumatiques pour abattre un bus suspendu sur des adversaires, mais l'ensemble reste à l'avenant des précédents épisodes : direct, et violent. Abattre le dernier ennemi d'une vague déclenche un ralenti sur la balle qui l'achève, tandis qu'on usera du moment de calme qui suivra pour finir d'explorer les environs afin de ne pas rater les antalgiques d'une part, et d'autre part des indices sur l'enquête approfondissant l'histoire, et des morceaux d'armes en or à collecter pour débloquer ces armes dorées. Reste également le mode Arcade, qui permet de revisiter les chapitres de la campagne avec l'ajout d'une notion de score ou de temps limité. Au final, le solo se boucle avec grand plaisir, sans qu'il ne soit ni trop long ni trop court, avec une progression dramatique très soignée et un portrait particulièrement dur de la pauvreté des favellas, de la corruption des forces de polices, à peine entrecoupé de quelques traits d'humour bien noirâtres. On est assez loin des GTA : on nage dans le sombre, presqu'à en suffoquer, et Rockstar n'a pas cherché à épargner au joueur ces ténèbres contemporaines à aucun moment, si ce n'est pour ceux qui chercheront assez, les différents moments où on croise un autre flic américain à la retraite, bedonnant et bredouillant, au travers de séquences cinématiques optionnelles qui donnent un tantinet dans le surréalisme. Et peut-être les deux ou trois programmes TV qu'on pourra visionner, qui rappellent un peu ceux de GTA, mais en moins débiles. Le tout avec un graphisme de toute beauté, des animations particulièrement bluffantes, et une réalisation générale de très grande envergure : splendide.

Plus on est de fous furieux...

Mais la véritable surprise de ce Max Payne 3, c'est son multijoueurs. Il s'avère redoutablement efficace. Je ne vais pas revenir dans le détail de tout ce qui le constitue niveau modes de jeu, mécaniques de progression, etc. (pour en savoir plus à ce sujet, n'hésitez pas à consulter nos impressions multijoueurs sur Max Payne 3 qui rentrent dans le détail). Mais il me faut néanmoins insister sur ce point : c'est véritablement à mon sens l'un des tous meilleurs TPS multijoueurs qu'il m'ait été donné d'expérimenter. Non seulement il reprend les mécaniques du solo avec efficacité, mais au travers de deux ou trois très bonnes idées, il rend l'ensemble bien plus équilibré et intéressant que bon nombre de ses pairs. Par exemple, il y a les notions de vitesse de régénération de la vie et de poids du personnage qui sont influencées par son équipement. Plus on trimballe d'armes, d'accessoires, et de capacités spéciales, moins on regagne vite de la vie au calme, et moins on se déplace vite. Ca permet de casser l'avantage injuste que pourraient avoir certains joueurs ayant tout débloqué sur d'autres, tout en renforçant le côté stratégique des "loadouts" (les classes personnalisées qu'on se constitue). Il y a aussi la possibilité de fouiller les cadavres pour récupérer des munitions ou des antalgiques qui peuvent donner un avantage décisif... mais au risque de se faire tirer comme un lapin pendant la fouille. Il est également tout aussi complet que d'autres, avec ses niveaux à passer, ses défis à compléter pour de l'XP supplémentaire, son arsenal à débloquer, ses maps particulièrement pensées pour limiter la campe (en plus, elles changent de dimension dynamiquement en fonction du nombre de joueurs dans la partie). En ajoutant à cela la refonte réussie du Rockstar Social Club avec ses "bandes", les équipes de joueurs, qui déclenchent des défis supplémentaires entre bandes rivales, Max Payne 3 s'impose probablement comme le titre le plus abouti en matière de multijoueurs jamais produit par Rockstar.

NextGen

La bonne nouvelle de ce Max Payne 3 pour les possesseurs de PC, c'est que c'est le titre le mieux optimisé sorti de chez Rockstar depuis, depuis... toujours ? Non seulement il est disponible facilement sur Steam (avec des promos de précommandes qui ont dû en faire craquer plus d'un, genre L.A. Noire en cadeau), mais franchement, voir le jeu tourner en 2560x1440 sans ramer fait plus que plaisir. On a encore en mémoire le fiasco du portage PC de GTA IV... Alors que cette fois, même un PC modeste fera tourner notre bon Max sans problème. Dans une résolution résolument bourgeoise (oui, bon, pardon) et même en pleine grosse scène d'action, ça ne rame pas. La configuration en question commence en plus à vieillir un poil : i7 3GHz "old gen", 12 Go de RAM (vu les prix hein, upgradez) et une Nvidia GeForce GTX 480 qui n'est plus vraiment le top du top aujourd'hui. Et pourtant, 2560x1440 !!! En prime, les textures supportent parfaitement ces résolutions, avec une finesse bluffante. Du beau boulot. De quoi espérer le meilleur pour GTA V...

L'autre excellente nouvelle sur PC c'est que le mode multi ne manque pas de joueurs et garde toute la saveur de la version console. Si je voulais troller, je dirais qu'avec le combo souris / clavier, Max Payne 3 prend vraiment toute sa dimension. Mais je ne suis pas comme ça. Je ne dirai pas que jouer à ce jeu au pad c'est comme conduire une F1 avec une barre de caddy. Nope. Je ne le dirai pas.

Bref, Max Payne 3 respecte les standards de qualité auxquels Rockstar nous a habitués. Si son solo reste classique, mais efficace, il ravit surtout côté multijoueur - une surprise pour une série qui a fait sa réputation sur l'action solo. Alors ce n'est certes pas un chef-d'oeuvre de la trempe d'un Red Dead Redemption, mais ce ne sera pas encore cette fois qu'on pourra dire de Rockstar qu'ils nous ont fait un mauvais jeu. Loin de là.