Une révolution de palais serait-elle en train de gagner l'état-major de Nintendo ? Les propos peu amènes de Koichi Hayashida, responsable production de Super Mario 3D Land envers l'indéboulonnable Shigeru Miyamoto jettent une lumière crue sur la succession du maître à pensée.
 
Le vide créatif ne fait désormais plus peur. Miyamoto avait d'ailleurs lui-même allumé la mèche lorsqu'au détour d'une routinière entrevue accordée magazine Wired, l'illustre golden boy de Nintendo laissait supposer qu'une lassitude - quoi qu'embryonnaire - de travailler sur des productions à gros budget avait fini par le gagner avant que les experts en communication du constructeur ne viennent monter au créneau pour pointer l'inexactitude des propos traduits de Miyamoto.
 
Pourtant très encadré lors des entretiens marathons avec les médias, un passage promotionnel obligé qu'il n'affectionne visiblement pas, lui qui préfère s'exalter sur les plateaux de l'E3 en mimant ses créations (qui se souvient de celle de Zelda, gravée dans les mémoires de tout un chacun) -cette confession sur l'oreiller inhabituelle chez l'homme aura modifié l'atmosphère de travail au sein des locaux du numéro un mondial du jeu vidéo. Un peu poussé par sa frileuse hiérarchie, le génial créatif aura tout vite fait d'éteindre l'incendie lors d'une mise au point qu'il accordera au Wall Street Journal, l'action Nintendo avait en effet vivement réagit à la baisse (- 2%) ravivant les craintes d'une guerre de succession qu'entraînerait un retrait même partiel de ce puits de science ludique.
 
<< Bien entendu, M. Miyamoto n'a pas l'intention de se mettre en retrait dans un avenir proche et je dois dire que je m'attacherai à travailler sans relâche sur les productions actuelles et prochaines [...] Nintendo est viscéralement traversée par une myriade d'idées >> se signale Hayashida dans les colonnes du site Gamesradar avant de reconnaître que << beaucoup d'idées viennent tout de même de Miyamoto. >>
 
Néanmoins, ce game designer issue de la nouvelle garde générationnelle de Nintendo soufflera le chaud et le froid sur cette épineuse question. SM 3D Land aura presqu'à lui seul redressé les ventes moribondes de la 3DS. Un exploit qui donnera des ailes à Hayashida, libérant sa parole, façonnant son ambition. Il cherche manifestement à se placer auprès du cercle décisionnel très fermé formé par Iwata dont la brillante gestion de passation de pouvoir avec le président sortant Yamauchi est louée à travers ce commentaire à double sens : << le moteur de notre créativité émane du hardware, ce sont ses capacités techniques uniques qui orientent notre travail de conception des mécanismes inédits de gameplay, elles ont largement profité à Mario. >>
 
C'est sous l'impulsion d'Iwata que sont nées la Wii et la DS, deux ruptures de paradigme qui ont donné une seconde jeunesse aux franchises stars de Nintendo et propulsé le constructeur sur la première marche du podium international. Autrement dit, le talent de Miyamoto est conditionné par l'inventivité des consoles, preuve est faite par Super Mario 3D Land qui vient du moins effleurer sinon dépasser le fertil génie du fils prodigue de Nintendo.
 
Le fabricant oppose un silence absolu sur les jeux de pouvoir et d'influence qui traversent sans exception aucune toutes les sociétés (les turbulences de cette gouvernance sont même saines), cela rend difficile le décryptage de cette guerre larvée que l'âge avancée de Miyamoto et sa récente absolution médiatique réveillent. Pour Hayashida, travailler en tandem n'est peut être pas à l'ordre du jour, il questionne tout au plus la sagesse de Nintendo à organiser le passage de témoin qui s'impose à elle : << il s'agit de faire en sorte que la jeune génération de développeurs puisse s'approprier les nouvelles tendances, c'est un processus continu. >>