De la discussion jaillit la lumière dit l'adage. Surtout quand celle-ci est ombrageuse aurait pu ajouter Hideo Kojima. Loin de la culture d'entreprise basée sur le culte absolu du consensus que l'on prête trop volontiers aux sociétés japonaises, le reportage du magazine Edge laisse entrevoir que les rapports de force entre créatifs sont fréquemment houleux. La collaboration entre deux studios stars farouchement jaloux de leur indépendance de décision a été émaillée de divers incidents.

 
"Le conflit a été permanent" souffle Yuji Korekado, producteur créatif de Metal Gear Rising : Revengeance. Kojima Productions et Platinum Games ont confronté leurs hypothèses et appréciations de la difficulté non sans accrochages parfois vifs entre deux têtes pensantes des deux studios : "Etsu Tamari auteur de l'histoire chez KojiPro et le directeur du jeu Kenji Saito travaillant pour Platinum Games ont été souvent en désaccords [...] nous les avons enfermés dans une pièce pendant trois jours [...] jusqu'à ce qu'ils deviennent les meilleurs amis du monde."



Ce type d'inimitié enfin rendue publique donne une coloration particulière au coopération soudaine et rarement souhaitée, faisant voler en éclat le vernis des conférences de presse durant lesquelles est mise en scène la fausse complicité entre les deux studios. Et les exemples de frictions ne manquent pas, celle du calage de l'histoire est visiblement le bras de fer qui aura marqué Koredako : "coincer Rising entre MGS2 et MGS4 était une mauvaise idée, nous avons fixé l'histoire en dehors de ces deux épisodes afin de nous donner plus de liberté de création".
 
Les impératifs commerciaux de l'éditeur Konami ou "les motivations des deux studios à offrir le meilleur produit" - c'est selon - ont permis à KojiPro et Platinum Games de dépasser leur égo et de départager leur pouvoir de décision respectif. Le périmètre de leur champ d'action délimité aura ainsi évité qu'un studio ne prenne l'ascendant sur l'autre afin de s'assurer d'avoir pris "la bonne direction à suivre."
 
L'enquête d'Edge offre un éclairage saisissant et réjouissant sur les dessous du monde du développement. Depuis plusieurs mois, le magazine traque avec talent les non-dits de cette belle industrie qui oublie parfois que derrière l'image d'Epinal se cache des intérêts et exigences despotiques.