Voyez notre planète, notre civilisation, nos
populations. Ces milliards d'êtres humains qui vont et qui viennent
comme des fourmis travaillant inexorablement de la même façon de la
vie jusqu'à la mort, répétant les mêmes gestes encore et encore
et creusant de plus en plus la tombe de notre mère la Terre.
Imaginez qu'une vengeance s'abatte sur ces êtres, une épée de
Damoclès qui ne tenait que par un bien fragile bout de ficelle
depuis déjà des siècles. Imaginez que tout s'arrête, en un
instant dérisoire, à peine le temps de se rendre compte que tous
les gens autour de nous crachent et vomissent leurs poumons jusqu'à
en crever, pour finalement laisser la place à tout le reste. Aux
autres. La faune, la flore, et un soupçon d'espoir.

Si vous êtes de ceux qui êtes touchés par ce
genre de scénario,
vous êtes tombés sur le bon bouquin. On a tous
rêvé, un jour ou l'autre, durant notre enfance (ou même encore
aujourd'hui, mais peut-être suis-je le seul ?) que l'on était seul
sur Terre. Vraiment seul. Je ne parle pas du Dernier Homme sur Terre
entouré de milliards de zombies, vampires ou autres saloperies, non,
je parle d'une véritable solitude. Un monde qui nous appartiendrait,
du moins en apparence tant la végétation et la faune auraient
repris leur droit, faisant fi du joug de l'homme pour conquérir de
nouveaux territoires. Territoires que l'on pensait acquis, il n'y
avait encore que quelques années.
Moi j'en ai rêvé, c'est
pourquoi ce livre m'a énormément touché.

Il m'a touché car les héros n'en sont pas, ils
sont vous, moi, lui.
Ils sont elle, ils sont humains, ils sont
faibles, minoritaires et, surtout, ils sont en voie de disparition.
Après une épidémie foudroyante ayant laissé en vie environ une
personne sur 1200 et quelques, la civilisation n'est plus. Nous
suivrons, durant les longs chapitres du livre, ce qu'une dizaine de
ces personnages deviendront. Tantôt dans les rues désertées d'un
Paris retourné a l'état sauvage, envahi par des bêtes de tous
poils, tantôt dans la campagne française à suivre un vieux
cavalier solitaire ayant pour but de revoir la mer avant sa mort,
rencontrant ça et là de rares survivants aussi vieux que lui,
tantôt dans une arche créée par l'armée américaine dont le
dernier survivant sortira 45 ans après la grande extinction, tantôt
dans l'espace, ou un équipage d'une navette se retrouve coincée et
sans aucun contact avec la Terre, tantôt avec une femme essayant
tant bien que mal de mettre un enfant au monde, malgré la stérilité
générale, conséquence du terrible virus.

Ne cherchez donc pas d'intrigue, il n'y en a point.Du moins, elle ne relie pas vraiment tous ces personnages, mais ne
concerne à chaque fois que l'un d'eux, tandis qu'il tente de
survivre dans cet environnement devenu hostile. Par contre, vous
serez véritablement happé par l'ambiance qui se dégage de chacun
des mots de Jean-Pierre Andrevon*. C'est simple, c'est de la poésie,
ni plus ni moins. Vous vous retrouverez littéralement transporté
dans cette France (lieu principal du récit) retournée à la verdure.
Et c'est là la grande force du livre. Au delà du message, au delà
de l'attachement à ces personnages condamnés à la solitude, il y a
ce rêve de gosse, celui d'être seul au monde, sans personne bien
sûr, mais également sans tout ce qui fait de notre monde
aujourd'hui un endroit parfois horrible. Faites le test vous verrez.
Lisez quelque pages, le soir avant de dormir. Si, entre le moment ou
vous placez le marque page et celui ou vous vous endormez vous ne
vous êtes pas imaginés dans un monde vide d'humains, c'est que vous
n'avez plus d'âme d'enfant, et j'en suis triste pour vous...

Je vous l'ai dit plus haut, ce livre est un
véritable poème.
Dans le fond. Un poème sur ce que nous sommes,
sur ce que nous vivons, ce que nous avons vécu, une histoire d'amour
également. Ou plutôt quatre, les survivants, au fur et à mesure,
se retrouvant avec leur âme sœur, comme si quelque chose les liait
depuis toujours. Et quand bien même, malgré ces couples, l'espoir
de voir d'autres êtres humains ne serait pas envisageable, la
métaphore est là. Puissante. C'est aussi pourquoi nous nous
attachons aux personnages, car ils se trouvent, arrivent à vivre
dans ce nouveau monde tout en sachant pertinemment qu'ils seront les
derniers, que rien ne pourra jamais rien y changer. Après eux,
l'être humain ne sera plus qu'un souvenir, lointain, dont les
vestiges sont étouffés sous une nature devenue plus abondante que
jamais.

Bon, je vous accorde que ma petite critique est un
peu confuse. C'est du au fait que c'est complètement spontané et
non relu, car je pense que c'est de cette façon que les émotions
passent le mieux, la plupart du temps. Quoiqu'il en soit, je vous
conseille fortement ce livre qui, je n'ai pas pu m'empêcher d'y
penser tout au long de ma lecture, m'a vraiment fait penser aux
meilleurs écrits de René Barjavel. Un gage de qualité. Un énorme
gage d'une qualité irréprochable, même. Un auteur à suivre. J'en
relirai d'autres, sans aucun doute, et je vous en reparlerai.

Sans aucun doute.

Gaulois (encore dans ses nuages virevoltant
au dessus d'un monde vide d'hommes)

* Non content d'être un écrivain maniant les mots comme un véritable poète, le bougre est aussi peintre, dessinateur, cinéaste, auteur-compositeur-interpète... Je ne connais pour l'instant de lui que l'écrivain, mais je vais voir ce qu'il peut faire dans les autres domaines.