Toujours adeptes des beaux objets, les italiens de Putiferio reviennent à la surface après un Ate Ate Ate tortueux et virevoltant, bourré d'imagination et de variations en tout genre. Le très logiquement nommé Lovlovlov fait donc suite aujourd'hui et il se trouve qu'il a une tripotée d'arguments sonores à transmettre à la jeunesse lui aussi, le bougre.

Les mêmes inspirations viennent en tête à l'écoute de ce témoignage d'amour incandescent, à savoir The Ex, Neurosis, Dead Elephant ou Oxbow, mais aussi un peu d'Ephel Duath dans l'approche créative. Des guitares qui s'emballent et s'entêtent à tour de rôle ou bien en simultané, une assise rythmique plus ample et plus posée qu'auparavant, une voix schizophrène soit hallucinée, soit aérienne, lointaine, soit incertaine, en équilibre sur l'hypnotique Can't Stop The Dance, You Chicken. Ici s'introduit une boîte à rythmes fulgurante et un synthé kitch à souhait, glissant plutôt bien dans l'oreille étrangement. Putiferio s'efforce à ne ressembler à aucun autre en injectant une bonne dose de lignes mélodiques et rythmiques parfois fluides et précises, parfois bringuebalantes et maladives, mais la plupart du temps celles-ci se croisent, se décroisent, se déconstruisent, se reconstruisent avec aisance. Comme une évidence.

Les bonhommes ralentissent la cadence quelquefois, profitant de l'ouverture temporelle pour introduire certains beats electro crasseux et bien agencés (Loss Loss Loss et son passage vocal à la Thom Yorke), s'éloignant du noise rock pour lorgner allègrement vers des contrées post-hardcore (Hopileptic!, True Evil Black Medal), via des guitares vénéneuses, spongieuses, frappées d'un psychédélisme ambiant. Une idée s'avérant belle après un léger (minuscule) effort d'écoute. La profondeur du son - lui-même suffisamment clair et équilibré - participe à cette orgie de feeling, où les détails fourmillent ; où la batterie semble léviter tout en martelant dans les règles ; où les guitares se meuvent et se cassent la gueule avec grâce, nonchalance et puissance ; où la voix, fragile et joliment approximative, nous pénètre le cœur par son timbre particulièrement intense et texturé (My Pitch Black Heart). Sans omettre les quelques infiltrations électroniques sur la fin de l'objet, renforçant l'aspect grinçant et parfois tribal des compositions.

Lovlovlov est l'une des plus généreuses déclarations faites à ce jour au noise rock, voire également au post-[...], voire (osons) à la musique de manière globale. Rares sont les groupes énervés maniant autant d'éléments, d'ambiances, d'instruments ou de sonorités tout en conservant une telle cohérence sur la totalité d'un album. La scène transalpine a décidément toujours un bon stock d'amour bruyant à partager.


Tracklist :

  1. Void Void Void
  2. Amazing Disgrace
  3. Hopileptic!
  4. Can'T Stop The Dance, You Chicken
  5. Now The Knife Is My Shrink
  6. My Pitch Black Heart
  7. Loss Loss Loss
  8. True Evil Black Medal

 

Ce disque s'écoute amoureusement sur le bandcamp du groupe.