Petit à petit le jeu vidéo fait son nid. Un nid qui deviens de plus en plus gros avec toute une série d'oisillons qui se remplument. A l'image d'autres médias, le jeu vidéo comporte désormais des courants, des branches, des mouvements. Prenez le foot par exemple. On peut y jouer de façon très occasionnelle, régulièrement en club, ou carrément en faire son métier. Ainsi le pro gaming se développe lui aussi.

Les exemples ne manquent pas, mais peu de supports offrent une assise suffisante pour proposer des gains substantiels. Les jeux de baston sont propices à diverses compétitions puisque leur principe d'opposition se prête très bien à cet exercice. De plus, ils sont visuellement très intéressants ce qui  donne un autre avantage important : On prends plaisir à regarder ces matchs. En effet, pour qu'un jeu puisse être candidat au panthéon de l'Esport il faut que le public soit assez nombreux pour que les annonceurs aient envie de mettre de l'argent sur l'évènement. Ainsi des compétitions d'envergure mondiale se tiennent dans des lieux aussi prestigieux que le palais des festivals de Cannes à l'image de la World Game Cup récemment couverte par Gameblog. Et lorsque l'évènement rassemble des Stars et propose 10 000 $ de cashprize et moult cadeaux grâce aux partenaires, les candidats et le public viennent en masse.

On peut donc aujourd'hui vivre du jeu vidéo quand on est joueur. En particulier lorsqu'on s'adonne à la Star des jeux du pro gaming : Starcraft second du nom. Ainsi Jeon Jong Hyeon (un coréen bien sûr) s'est assuré un confortable revenu de plus de 21 000 $ par mois l'année dernière. Nous sommes évidement ici sur le haut du panier. A noter qu'un petit français ne s'en sort pas trop mal. Avec 92 000 $ de gains Ilyes Satouri s'assure à 16 ans plus de 7500$ d'argent de poche mensuel. C'est tout de même le premier joueur européen en matière de gains sur Starcraft 2. Il y a donc de quoi gagner sa vie avec le jeu vidéo, mais pour combien de temps et à quel prix ?

On en a une petite idée de regardant ce long et très intéressant reportage en deux parties concernant Lim Yo-Hwan alias SlayerS BoxeR. Ce joueur légendaire de Starcraft (le premier cette fois) s'entraîne des journées durant et axe sa vie uniquement sur le jeu. Au point de ne plus s'occuper de rien d'autre. La définition même d'une activité professionnelle comme on peut la rencontrer dans d'autres sports. Lim Yo-Hwan génrère non seulement des revenus grâce à ses victoires, mais aussi maintenant grâce à des contrats de sponsoring comme n'importe quel footballeur (toutes proportions gardées bien sûr). SlayerS BoxeR, c'est 400 000$ de revenus annuels auquels s'ajoute donc un contrat de 90 000$. De quoi voir venir. La légende continue d'ailleurs aujourd'hui car le maître a fondé une équipe, les SlayerS qui a battu les membres de la Team Incredible Miracle. Celle dont fait partie Jeon Jong Hyeon en tête des gains cette saison.

D'autres choisissent de bifurquer vers un jeu qui semble demander les mêmes qualité que Starcraft , anticipation, bluff, optimisation, évaluation adaptation et surtout une certaine force mentale : Le poker. Ainsi Bertrand Grospellier, alias Elky a été joueur professionnel sur Starcraft pendant cinq ans avant de basculer dans le poker. Les gains sont sans commune mesure puisqu'Elky a engrangé depuis environ 7 millions de brouzoufs. De quoi se payer de petites vacances pour... Jouer à Starcraft 2.

Mais passer dans le monde professionnel a aussi ses contraintes. Celles qui sont décelables dans le reportage de BoxeR et qui sont évidentes ; une monomanie sur le jeu en question pour atteindre des sommets de performances. On passe ainsi à côté d'un certain nombre de choses de la vie. Mais c'est une caractéristique commune à toute activité de haut niveau. Ce qui me dérange plus, c'est l'esprit de compétition qui se développe. Alors certes il faudra édulcorer mon propos puisque selon le jeu, l'ambiance change très certainement.

Le propos du jeu vidéo, c'est de se divertir et de s'amuser. Dès lors, commencer à le considérer comme une activité sérieuse qui peut faire gagner de l'argent et donc sa vie sonne un peu faux. On arrive ainsi à une sorte de tension entre ceux qui ont envie de s'y amuser tout en étant performants et les autres qui semblent parfois jouer leur vie sur un évènement. Je vais prendre l'exemple que je connais le mieux avec Forza 4. Attention, je ne suis pas en train de comparer Forza et Starcraft hein :) . Dans Forza Motorsport 4, le côté communauté a été développé et amélioré par rapport aux autres opus pour renforcer les liens dans des équipes. A l'image de ce qui se pratique dans les FPS on peut donc avoir un tag devant son nom pour signifier son appartenance à une équipe. On finit par rouler souvent avec les membres et à profiter des compétences de chacun pour avoir de chouettes peintures, des réglages aux petits oignons et les meilleures voitures pour chaque tracé. Dans le championnat de France, cela s'en ressent, puisqu'une équipe organisée va optimiser ses performances.

Les transferts pour récupérer les meilleurs joueurs vont bon train et on sent très bien la recherche de prestige qui émane de certaines entités. Bien sûr, il faut essayer d'obtenir les meilleurs résultats dans les leaderboards et dans les courses. Bien sûr, on essaie de faire connaître l'équipe en montant des "projets" pour attirer le chaland sur ses propres sites et forums ou... l'inscription est obligatoire pour parvenir à lire les infos. Un signe qui titille lorsque ces mêmes équipes prônent l'ouverture et le partage.

Sur la piste, c'est un peu pareil. Respect, esprit sportif et tout ça. Seulement voilà, dès que les premiers tours de roue ont commencé les commentaires vont bon train. Il est normal de se chambrer gentiment et de plaisanter avec les autres coureurs dans une ambiance bon enfant, mais on sent très bien que pour certains le concurrent qui serait un peu moins rapide sans laisser passer ses adversaires n'aurait pas sa place dans la course. Or la course, c'est justement composer avec les autres qu'ils soient plus ou moins rapides. Lorsqu'il y a un accrochage, la moindre remarque prends des proportions énormes et les sanctions sont toujours discutées. Sur la précédente édition du championnat, j'ai pu entendre des choses comme "Vous vous rendez pas compte, la pression est énorme alors forcément on cherche à être très performants et on coupe des virages". Comme si le haut niveau de la compétition justifiait les excès au nom de la performance. La présence de lots, toujours sympa pour mettre du piment semblait tellement hâtiser les convoitises que les participants en oubliaient que le but de la manifestation était de pouvoir rouler en sessions pleines et d'étoffer sa liste d'amis. Cette année, les lots n'ont pas été révélés publiquement. Il y aura beaucoup de choses sympa, mais rien que le fait d'occulter ce listing change déjà un peu la donne.

Évidement Forza n'est pas un exemple qui puisse assoir toute une théorie sur l'ambiance qui change dans le pro gaming. J'ai l'impression que les manifestations de versus fighting gardent justement une ambiance très déconne et bon enfant malgré tout. Mais la professionnalisation du média va aussi avec ses inconvénients. Exclusivités, droits à l'image, licences... L'esprit sportif en prends un coup. Heureusement que le jeu enr réseau qui a révolutionné notre façon de jouer est présent ! C'est le gage de pouvoir toujours trouver des adversaires qui vont proposer un haut niveau de challenge et du jeu intéressant.

Nous sommes en train d'assister (sans nous en rendre compte) aux prémices d'un nouveau monde pour le jeu vidéo. Qui sait, dans une dizaine d'années nous aurons peut être des soirées télé pour regarder un match de foot... sur FIFA, une finale mondiale de Starcraft 3 et une manche de championnat de course de voitures. Allez on va taper la balle cet après midi et ce soir on regarde la finale de Rolland Garros... sur Top Spin ;)

En attendant, vous pouvez toujours jeter un oeil sur les gains des meilleurs joueurs de Starcraft 2 ;)