Deuxième partie de cette histoire un peu longue certes, mais quand même assez intéressante je trouve. Je mettrai les liens vers les articles essentiels à la fin. Si vous n'avez pas lu le post de blog précédent, je vous préviens, vous ne comprendrez rien. Donc il faut le lire, hop hop.

 

Dans cet épisode, la tension monte dans le petit monde de la presse vidéoludique britannique, maintenant que le site Eurogamer.net a publié une tribune de Robert Laurence, prenant à bras le corps la question de l'indépendance d'esprit des journalistes.

 

Que faire ? Voilà la question qui se pose pour les trois journalistes que Robert Florence a cité en exemple dans sa tribune, non pour les accuser de corruption, mais comme des personnes ayant un comportement propre à attiser la suspicion quant à leur capacité à maintenir un minimum de distance avec l'industrie qu'ils commentent et jugent.

 

Les lecteurs de l'article précédent se demandent sans doute si Lauren Wainwright s'est démultipliée : je ne parlais que d'elle et maintenant voilà trois journalistes « mis en cause ».

 

Pourquoi ne pas les citer, les deux autres ? Parce que leur gestion de la situation, justement, a été très différente de celle de la demoiselle et qu'en conséquence leurs noms passent un peu à l'arrière-plan. L'un s'appelle Dave Cooke et il a choisi aussitôt d'entamer un dialogue dans les commentaires de la tribune, sur le site d'Eurogamer, pour s'expliquer et répondre aux critiques. C'était sans doute un choix risqué mais visiblement ça a bien fonctionné : plus personne ne le critique vivement aujourd'hui. L'autre, dont j'ai oublié le nom, n'a tout simplement rien fait et personne ne parle de lui non plus, une semaine après.

 

Lauren par contre ... Non, elle n'a pas choisi la 3ème option, l'option journalistique, celle qui aurait consisté à faire son métier et à exercer son droit de réponse auprès d'Eurogamer sous la forme d'une réponse publiée sur le site.

Non, elle a préféré monter sur ses grands chevaux et menacer le site d'une poursuite en diffamation, soutenue semble-t-il par ses patrons de chez MCV, voire de chez Intent Publishing, la maison mère (qui organise aussi ces merveilleux MDA Awards), pour obtenir une rétractation d'Eurogamer. Une journaliste a donc choisi de faire censurer un autre journaliste, qui n'avait fait que citer ses propos publics.

Cette photo n'a vraiment rien à voir avec l'article mais Super Hexagon est un jeu extraordinaire et je peux vous assurer que Terry Cavanagh ne m'a pas payé pour dire ça !

Tout le problème est qu'en Angleterre, un procès en diffamation, c'est apparemment très sérieux, très coûteux et pas évident à gagner. C'est du moins ce qu'ont expliqué les avocats consultés par Eurogamer, conseillant au site de céder à la menace juridique en retirant de l'article le passage citant Loren Wainwright. Le rédacteur en chef du site, Tom Bramwell, a obtempéré, tout en expliquant publiquement qu'il ne s'agissait aucunement d'une rétractation mais d'une modification au scalpel, sous la menace.

Tout cela se passe en quelques heures. On imagine la situation de l'auteur de la tribune partiellement censurée, commençant par ailleurs à tomber sous le feu de nombreuses « critiques » de ses - désormais anciens - amis dans l'industrie du JV. Il a donc démissionné, mettant fin à sa collaboration avec Eurogamer et à ses tribunes hebdomadaires.

 

Victoire totale de la censure ? Lauren Wainwright, qui s'était le matin même félicité sur Tweeter d'avoir suivi des cours de droits des médias, a certes fait effacé quelques lignes la concernant et forcé l'auteur d'un article trop critique à la démission.

 

Mais quiconque lui a conseillé de faire cela ne devrait être écouté par personne, en tout cas dès qu'internet entre en jeu. Car oui, surprise, faire censurer l'article s'est révélé contre productif, en donnant infiniment plus de résonance au texte que s'il était resté intact. Et si beaucoup de journalistes et de commentateurs de ce petit microcosme se sont empressés de faire front autour de la jeune journaliste, beaucoup d'internautes l'ont eu mauvaise. Mais alors très mauvaise. Non seulement le passage de l'article s'est reproduit de forum en forum mais les gens se sont mis à fouiller, à fouiner et sans aller bien loin, ils ont trouvé pas mal de choses : Robert Florence avait eu le nez creux ...