Si vous êtes un habitué de mes articles, vous devez déjà savoir que je suis un grand fan de Dragon Age : Origins. Parmi les moments qui m'ont fait le plus apprécier le jeu, il y a une marque de fabrique de Bioware devenue classique : les dilemmes scénaristiques, et en particulier les dilemmes amoureux. Pour être clair, lequel des PNJ devais-je choisir pour ma romance de long terme ? Devrais-je choisir la sexy mais tellement chieuse Morrigan ? Ou plutôt la gentille et pure Lelliana ? Ou encore devrais-je succomber aux avances délicieusement perverses de Zevran ?

Ah, c'est trop difficile de choisir !

A vrai dire, Bioware est un habitué puisqu'ils me proposaient déjà le même dilemme à l'époque des Baldur's Gate, et comme à l'époque, je refais la même chose : je suis chaque romance en parallèle jusqu'à ce que je sois absolument forcé de faire un choix (ah, Jaheira, peut-être aurais-je du te choisir toi !).

Pourquoi cette attitude ? (car je pense bien ne pas être le seul à avoir ce travers...)

Pourquoi d'ailleurs mets-je autant d'implication dans un choix finalement futile entre de simples, voire vulgaires personnages imaginaires - au point même de refuser de m'engager avec aucun d'entre eux ?

A priori, je répondrai simplement par de la psychologie de base : l'être humain aime avoir le choix. Ou plus exactement, nous n'aimons pas voir l'étendue de nos choix possibles se réduire, et c'est effectivement ce qui se passe quand on doit choisir entre Morrigan, Lelliana et Zevran. Comme dans la vraie vie.

En bref donc, on aime se garder une porte de sortie. Et surtout, on ne supporte pas l'idée de risquer de perdre cette porte.

Les illustrations pratiques de ce mécanisme psychologique sont nombreuses. Un gamin, qui ne témoignait jusque là aucun intérêt à un jouet, se met à le désirer dès qu'il voit un autre enfant jouer avec, craignant d'en perdre la possession. De même, une nouvelle interdiction quelconque provoque une prolifération des infractions testant cette interdiction, alors que tout le monde jusque là n'y montrait aucun intérêt.

Et dans les jeux vidéo, ce genre de dilemme est devenue une quasi habitude depuis que la plupart des jeux intègrent une composante de jeu de rôle, notamment dans la personnalisation et la progression des personnages : devrais-je mettre mes points en force ou en intelligence ? Choisir une spécialisation en fusil d'assaut ou en grenade ? Augmenter ma mobilité ou bien ma furtivité ?

Les possibilités tant en terme de scénario et de gameplay semblent infinies.

Du coup, on peut se dire que les développeurs n'ont peut-être pas encore tout expérimenté en matière de dilemme narratif. A vrai dire, je crois qu'à part Heavy Rain et les grands titres Bioware que sont Dragon Age et Mass Effect, peu de gros titres récents finalement jouent le jeu de cette construction scénaristique - l'habitude est encore trop au scénario linéaire (à la Final Fantasy, oserais-je ricaner).

De ce point de vue, proposer des choix qui vont tuer le personnage-joueur n'ont finalement que peu de conséquences alors que l'on peut toujours recharger la partie. Par contre, forcer le joueur à sacrifier un personnage ou un autre de son équipe peut déboucher sur un véritable traumatisme : souvenez vous du choix à faire entre Ashley et Kaiden dans Mass Effect...

La tension du choix sera alors d'autant plus grande qu'un jeu peut nous forcer à allouer (d'aucuns diraient "gaspiller") des ressources du jeu pour maintenir ouverts les différents choix possibles aussi longtemp que possible. Autre exemple à exploiter : forcer le joueur entre améliorer ses capacités ou la possibilité d'accéder à un autre pan de l'histoire (souvenez-vous de Bioshock et des Little Sisters).

Ce genre de mécanisme peut se révéler très intéressant : les dilemmes dynamisent fortement une construction scénaristique, et les designers de jeu ont encore beaucoup de possibilités devant eux - il n'y a plus qu'à les mettre en oeuvre. Et vous, quels étaient les choix qui vous ont été les plus difficiles ?