Vous savez, j'ai beau y penser, je les aime, mes jeux de casu. Je veux dire, tous ces jeux que je garde constamment avec moi dans ma DS, ou sur mon téléphone, je les aime, sincèrement.

C'est peut-être le fait d'être devenu un Parisien en quelques années qui a altéré ma personnalité mais si je suis quelqu'un de nature plutôt joviale à la base, adorant faire la fête et sortir*, la capitale m'a aussi appris à fuir certaines occasions de socialisation forcée comme la peste, jusqu'aux frontière de la misanthropie parfois.

Des situations telle que le métro, par exemple.

Pour ceux d'entre vous qui ne connaissent pas l'enfer des transports en commun parisiens, dîtes-vous que vous avez beaucoup de chance. Tant de gens dans un espace extrêmement confiné, et condamnés à se supporter de longues minutes (voire heures !) jusqu'à leur destination - un enfer du quotidien vécu à répétition chaque matin et chaque soir. Ca pue, tout le monde transpire, forcément on a tous chaud, et on doit subir les bavardages de pies bavardes suspendues à leur téléphone.

Mais comment est-ce que je fais pour supporter cela, me demanderez-vous ?

Eh bien, c'est là qu'interviennent mes chers jeux de casu.

Quand je grimpe dans le métro, mon premier réflexe est toujours d'essayer de m'adosser contre une paroi afin de pouvoir m'y appuyer pour ensuite profiter tranquillement de mon dernier titre du moment (et en ce moment, c'est Puzzle Quest 2).

On peut dire que je sors l'artillerie lourde : je lance Puzzle Quest, serre bien les oreillettes et je me mets à tapoter frénétiquement sur l'écran lumineux de ma DS, ignorant complètement et absolument tout ce qui m'entoure, avec la joie et la concentration d'un enfant de huit ans. Les tocs-tocs-tocs de mon stylet assortis de mon expression vide accentué d'un regard intensément concentré véhiculent un message clair : "Ne me touchez pas, ne me regardez pas, laissez-moi tranquille et n'espérez même pas m'adresser la parole."

Grâce à ma DS, le voyage passe comme une petite brise.

Et le pire, voyez-vous, c'est que j'ai commencé à faire ça à chaque fois que je me retrouve dans une situation où l'opportunité de socialiser m'ennuie - jusqu'à me faire tirer les oreilles par ma moitié quand j'ose sortir la DS dans la voiture au lieu de blablater avec tout le monde...

C'est là que je me rends compte que les nouvelles plateformes de jeux portables sont les instruments de défense parfaits contre toute interaction sociale non-désirée. Ce colporteur vous ennuie ? Hop, sortez la DS, et ignorez-le. Un discours vous ennuit ? Un petit tour sur Plants VS Zombies sur Iphone, et voilà !

Alors que tout le monde n'a pas encore réalisé l'incroyable valeur de ces supports en tant que blindage anti-socialisation, je me rends déjà compte que je ne suis pas seul. Plus d'une fois en montant dans le métro, je vois des frères et soeurs gamers en train de s'isoler tranquillement dans leur petite bulle avec leur DS, Iphone ou PSP. Un bonheur paradoxal : nous partageons un mode de vie qui hélas, implique notre séparation les uns les autres dans nos sphères respectives.

En bref, et pour résumer : les jeux de casu sur support portable sont la solution idéale pour tous les misanthropes de la planète. Plus besoin de devoir supporter les autres, on peut partout être tranquille avec soi-même.

Pire, si j'étais développeur sur ce genre de support, je crois que ce serait mon public prioritaire. Je sortirais des tetris-like pour permettre aux gens d'éviter les conversations ennuyeuses avec leur belle-mère. J'inventerais des puzzle quests pour vraiment rigoler pendant qu'un vieil oncle radoteur raconte son énième blague vaseuse. Je développerais des jeux permettant d'éviter de subir la conversation des vieilles dames dans le bus (l'horreur !). Mieux encore, une appli que je pourrais lancer dès qu'un gamin viendrait me harceler dans l'avion en me demandant : "A quoi que tu joues ?" Et je répondrais alors, le plus sérieusement du monde : "Je contrôle le plan de vol de l'avion, laisse-moi tranquille ou on va s'écraser !"

Ben quoi, pourquoi vous me regardez comme ça ? Qu'est-ce que j'ai dit, encore ?
Je suis sûr que le gaming vous sert aussi à vous isoler, avouez-le !

* * *

* Bon, ok, fut une époque, je faisais aussi ça :

Je le refais d'ailleurs, parfois. Très rarement. Enfin bon.