Quelques années après le troisième épisode, le vrai/faux remake du premier Mafia a mis tout le monde d’accord et permis au studio de voir que les fans sont toujours au rendez-vous et qu’il y a même de nouveaux curieux prêts à découvrir la franchise. Mafia The Old Country porte donc tout cet héritage sur ses épaules, en plus d’être une nouvelle chance pour la licence de briller en faisant de l’inédit. On le sait, ce genre de situation est toujours difficile. Réussir à faire renaître une série qui a pris une balle dans le pied, satisfaire les fans tout en apportant assez de fraîcheur pour se renouveler, balayer les erreurs passées et séduire les nouveaux venus... Ce n’est jamais gagné d’avance. On a été faire un tour en Sicile, près d’un vignoble dominé par l'Etna, pour voir ce qu’il en est.

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Notre héros, Enzo ©KiKitoès pour Gameblog

La mafia avec un grand M

Hangar 13 s’éloigne grandement du vilain petit canard qu’est Mafia 3. On change complètement de continent et de genre, pour se rapprocher de ce qu’était le tout premier jeu de la franchise et c'est tant mieux ! Ce nouvel épisode n’a peut-être pas la prétention d’être un jeu d’auteur, mais il se vit comme son équivalent cinématographique. De sa bande-son à son grain, Mafia the Old Country transpire le cinéma. On peut y sentir un embrun de Scorsese, De Palma et Coppola de temps en temps, ceux qui auront marqué le genre et introduit des codes entrés définitivement dans l’imaginaire collectif. Mafia The Old Country ne déroge pas à la règle et les reprend absolument tous. Il n’y a qu’à voir Don Torrisi, le parrain local, qui en impose sérieusement. Rien que sa prestance et son grain de voix forcent le respect, comme Corleone en son temps sur grand écran. 

Tous les clichés du genre sont présents : le mentor droit dans ses bottes qui donnera tout pour la famille, la tête brûlée qui cherche le respect de ses pairs ou encore la fille du Don condamnée à vivre sous le joug de son père et qui rêve de liberté. Et puis il y a l'outsider débrouillard sorti du caniveau et qui grimpera les échelons. C’est notre héros, Enzo, abandonné par tous et qui trouvera refuge au sein de la famille pour y faire ses preuves et chercher une vie meilleure. Mafia The Old Country nous fait vivre cette ascension sur fond de traditions mafieuses et surtout d’histoire d'amour. C'est même la partie la plus réussie, bien que le traitement laisse à désirer. C’est un drame humain au sein d’une mafia en pleine expansion, à quelques années de l’explosion du grand banditisme, mais pas que… 

Du profil de ses personnages, au déroulement de sa trame, Mafia The Old Country tire toutes les ficelles, même les plus grossières, et finit par en être prévisible. On pourra même trouver ça quelque peu cliché parfois ou a minima forcé, comme pour cocher des cases. Je pense ici notamment à quelques séquences qui ne semblent exister que pour nous rappeler ce à quoi l’on joue. Ça contraste clairement avec le reste de la trame, traitée bien plus en finesse avec un certain naturel et une vraie patte cinématographique.

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On peut faire les trajets, ou les passer la plupart du temps ©KiKitoès pour Gameblog

Benvenuti in Sicilia

Mafia The Old Country aime prendre son temps et ce même s’il n’est pas bien long, ce qui pose problème puisque l’on perd en intensité, aussi bien en termes de narration que de gameplay. Le début du jeu est long, trop long. On nous apprend les bases sur plusieurs heures, les phases de gameplay sont bien trop courtes et espacées, et il ne se passe pas grand-chose. De tout son long, le jeu va nous imposer un rythme lent, pour ne pas dire mou, et dirigiste quitte à prendre à contrepied les tendances actuelles qui ont vite fait de toujours vouloir faire plus fort et plus grand. Ici, c’est presque du cinéma.

La caméra est lente, les plans sont contemplatifs, la tension est parfois carrément palpable et les dialogues traînent sous le son des instruments à cordes typiques de cette période. La mafia, la famille avec ses affaires et ses traditions… on se délecte de cette ambiance sicilienne des années 1900 comme d’un bon vin. Ca commence plutôt bien d’ailleurs, d’autant que planter son décor sur l’île italienne à cette période a de quoi vendre du rêve. u départ, la magie opère forcément, on est en terrain inconnu. Peu d'œuvres traitent du sujet, ou alors il faut regarder loin en arrière, et côté jeux vidéo c’est carrément le désert.

On apprécie donc d’autant plus que le jeu y aille tranquillement, qu’il nous présente ses personnages et nous allonge des dialogues et des scènes bien ficelées, souvent très cinématographiques. Ajoutons à ça des doublages de très bonnes factures que ce soit en anglais (que je vous conseille vivement pour le coup, ne serait-ce que pour le Don ou le personnage de Tino), en français ou en sicilien (qui vaut le détour). Les personnages sont incarnés, savent crever l'écran, et ils sont certainement aidés par des animations faciales convaincantes, même lorsque les plans sont rapprochés.

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Un vrai problème de rythme pour un jeu relativement court

Malheureusement, Mafia The Old Country va rapidement perdre le fil. Il finira par gaspiller son temps à ne pas trop savoir quoi nous raconter. Paradoxalement, il n’est pas suffisamment long pour se permettre d’être aussi lent à démarrer. Les deux premiers tiers paraissent alors bien plus longs qu’ils ne le sont réellement, pour se conclure avec une ultime ligne droite qui cédera aux sirènes du blockbuster et surtout que l’on voit venir à des kilomètres. Mais cette dernière partie sera étrangement la plus réussie grâce à sa tension narrative et son importance scénaristique. C’est aussi la plus maîtrisée en termes de rythme. Mais le soufflé retombe très vite puisque c’est court, très court. La fin est l’une des plus abruptes que j'ai pu voir depuis un moment.

Ce nouveau Mafia essaye peut-être d'en faire trop en peu de temps, ou au contraire il n’en fait pas assez et aurait mérité d’être un poil plus long.Comptez entre 10 et 15 heures (vraiment pour les plus lents) pour terminer le jeu, en sachant que l'exploration est réduite à son strict minimum. Il faut impérativement passer par une option spécifique pour explorer en toute liberté, car on est autrement interdit de s’éloigner des sentiers la plupart du temps pendant le scénario, comme dans les deux premiers jeux de la licence. De toute manière, fouiner n’est ni intéressant, ni utile puisqu’on ne récupérera que des collectibles parfaitement dispensables. Seuls les fans les plus hardcores seront certainement intéressés par la complétion.

On voit bien que le jeu n’a pas été conçu pour ça et ce n’est pas forcément un mal, mais on aurait dans ce cas préféré plus d'efforts sur le reste que cette vaine tentative de donner un intérêt à son open world. C'est d’autant plus dommage que c’est un plaisir de se promener dans cette région de la Sicile. Mafia The Old Country est d’une fidélité remarquable. Je ne suis pas historien et je n’ai jamais mis un pied sur l’île, mais avec ce jeu j’ai pu y voyager quelques heures et ça c’était génial. Les vignobles vallonnés, les champs de lavandes, un volcan, que l'on soupçonne être l'Etna, qui menace les ports de pêche et les villes à l’architecture typique et reconnaissable entre mille, c’est une franche réussite artistique.

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Le gameplay de Mafia The Old Country peine à convaincre

Si Mafia 1 et 2 arrivaient sans trop de mal à maintenir un intérêt tout du long, ce n'est pas vraiment le cas de The Old Country, à moins d’être solidement accroché à l’ambiance sicilienne. Malheureusement, ce qu’il se passe pendant une bonne partie du jeu ne passionne pas vraiment. Hormis une poignée de cinématiques, la mise en scène est plate, les objectifs peu engageants et l’on ne voit pas vraiment le fil rouge de tout ça avant plusieurs heures. Les chapitres s'enchaînent, sans vraiment nous embarquer complètement, l'histoire étant relativement prévisible en plus de ça. Le démarrage est fastidieux et si je peux comprendre la volonté de nous faire vivre tous les échelons de la mafia, ramasser des caisses en bois et faire des courses de chevaux n’a rien de grisant en termes de gameplay.

C’est d’autant plus difficile à avaler que l'on se rendra compte que, par la suite, le jeu n’a absolument aucun challenge (mode normal) et que ses mécaniques sont très classiques, pour ne pas dire basiques. Les courses par exemple, de chevaux ou de voitures, sont tellement permissives que l’IA va même jusqu’à nous attendre si l’on perd le fil. C’est tellement scripté qu’on sait d’office qu’on a gagné avant même que ce soit lancé. On pourra se rassurer en disant que c’est truqué si l’on veut, puisque c'est la mafia, mais dans tous les cas ce n’est pas passionnant. Pareil pour notre première sortie en tant que "vrai" mafieux, une séquence sous-exploitée et clairement pas marquante alors qu'elle est censée nous faire franchir un cap.

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Il fallait bien que tout parte en sucette au bout d'un moment, mais ça arrive tard ©KiKitoes pour Gameblog

J’avais alors bon espoir concernant les sensations en combat, qui auraient pu relever le niveau d’autant qu’on nous promettait quelque chose de terre à terre et viscéral, mais il n’en est malheureusement rien. La visée est molle et les ennemis sont tellement idiots que l’on aura vite fait de les plomber tout en restant à couvert. Soit ils sortent la tête et restent figés en nous tirant dessus, soit ils vont carrément nous foncer dessus à découvert. Quand bien même ils sont en nombre, on s’en défait rapidement. 

D’ailleurs, si vous avez craqué pour l'édition deluxe, comportant les armes et véhicules bonus, vous allez complètement vous casser le jeu tant l’équipement fourni est surpuissant. Pistolet qui tue en une balle, couteau presque incassable… le concept selon lequel on est censé récupérer de quoi aiguiser notre lame et faire attention aux munitions perd totalement de son intérêt. Les simples mortels quant à eux devront faire un peu plus attention à leurs ressources au début du jeu, mais avec quelques Dinars en poche, un passage au receleur du coin suffira à s’équiper comme il faut pour ne plus faire attention à quoi que ce soit.

Les tirs manquent d’impact et de puissance et il n’y a aucune subtilité de gameplay ou ni d'interaction notable avec l’environnement pour nous réveiller. L’ambiance mafieuse si maîtrisée du jeu perd clairement de sa superbe. On aurait peut-être même aimé retrouver des sensations un peu plus « western spaghetti » avec ses fusillades où fusent la poudre, la poussière et les débris. 

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Etouffer, tuer, cacher les corps et jeter des bouteilles, l'infiltration fait le service minimum ©KiKitoes pour Gameblog

Les combats rapprochés et l'infiltration ne sont pas à la hauteur

Le corps à corps ne viendra pas relever la barre non plus puisque, hors des combats de boss, on se contentera de tabasser une touche pour planter son adversaire et souvent l'exécuter dans la foulée. Si les fameux affrontements en duel avaient de quoi intéresser sur le papier, ils sont eux aussi ratés. Le premier combat sera certainement amusant et rappellera les duels aux couteaux de nombreux films et une petite tension peut même s’installer, mais au bout de quatre, cinq, six combats identiques, la mayonnaise ne prend plus du tout. On fait toujours la même chose : on esquive, on pare ou on attaque selon l’ouverture pour faire baisser une barre de vie toujours plus grande. On voit bien que les développeurs ont tenté de rendre le tout cinématographique, notamment en dynamisant les affrontements par quelques scripts, mais ils deviennent aussi répétitifs que prévisibles.

Il n’y a pas de surprises, ni suffisamment de possibilités et de variété dans les mécaniques pour rendre les combats, armés ou au couteau, intéressants. Quant à l’infiltration, censée être l’autre partie majeure du gameplay, elle est elle aussi au ras des pâquerettes. Il y a un vrai problème de level design, qui est téléphoné au possible quitte à ne plus être crédible lorsqu’il veut systématiquement nous mettre de quoi nous planquer sur le chemin.

L’IA est une fois de plus bête à manger du foin. C’est là encore très basique : les ennemis ont tendance à bien tenir leur position, même parfois face à des murs, nous laissant un tracé bien visible pour passer incognito ou tuer tout le monde en silence. Il n’y a aucune surprise, pas de sensation de danger et là encore les possibilités sont limitées puisqu’on ne peut que glisser contre les parois ou jeter des objets pour faire quelques distractions. Au combat comme en infiltration, c’est donc le service minimum à tous les niveaux et ces séquences auront vite fait de devenir ennuyeuses, sauf vers la fin du jeu encore une fois.

Même quand il tente de nouvelles choses, comme les courses-poursuites, le jeu se prend les pieds dans le tapis et finit par répéter l’idée encore et encore. Courses-poursuites, phases d’infiltrations qui se terminent systématiquement en bain de sang, courses scriptées… on a très vite fait le tour et pourtant aurait bien pris du rab. Lorsqu’il fait bien les choses, Mafia The Old Country est suffisamment hors du temps pour piquer notre curiosité et nous donner envie de continuer. Heureusement d'ailleurs, puisque le dernier pan mérite clairement le détour malgré tout, mais il faut attendre plusieurs heures avant d'y arriver.

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Heureusement, le jeu se fait relativement bien mine de rien et surtout dans de bonnes conditions. Techniquement sur PC mis à part quelques ralentissement lors des transitions entre phase de jeu et cinématique, je n’ai pas rencontré de problèmes majeurs. Sur une config solide (RTX 5070 Ti, Ryzen 7 7800x3D, 32 Go Ram, SSD) le jeu tourne comme un charme et profite même des technologies comme le DLSS ou le FSR. Mafia The Old Country est donc plutôt solide et plaisant à jouer.