L'approche des débuts de saison vient réveiller ma passion d'enfant pour le sport. Et parmi toutes les disciplines, le football américain me relie au gamin que j'ai toujours été. Ce garnement qui se levait en douce au beau milieu de la nuit pour mater cette télé-réalité avant l'heure, comprenant son lot de rebondissements, d'aventures humaines, de plaquages musclés et de cheerleaders dénudées. Ce gosse hyperactif qui faisait mille caprices auprès de son oncle globe-trotter pour qu'il rapporte de ses excursions à New York une casquette ou un maillot XXL des Giants. Cet enfant réservé qui se rêvait quarterback pour rallier dans son camp camarades de classe et belles gosses du lycée. Un enthousiasme débordant qui a bien du mal à s'exporter dans notre pays, et ce malgré les efforts d'ouverture de la ligue et l'impact de la licence Madden NFL, à la qualité unanimement louée.

Une série et des hommes

Ce nouvel épisode ne vient pas entraver cette jolie réputation, s'appuyant sur les desideratas de sa grosse communauté et les essais réussis par les éclaireurs FIFA et NBA 2K. Tous les aficionados de foot US souhaitaient vivre une aventure à la Friday Night Lights, série TV culte, mais passée inaperçue en France car difficile d'accès et trop ancrée dans la réalité politique et juridique américaine. Un fantasme enfin exaucé puisque Madden NFL 18 est le second titre de la gamme EA Sports à profiter d'un mode histoire, le dénommé "The Longshot". Il ne s'agit plus d'aligner les matches les uns après les autres, selon la formule consacrée, mais de suivre un feuilleton ultra scénarisé, où des dilemmes moraux influeront votre carrière professionnelle et votre parcours d'homme.

On y incarne Devin Wade, une ancienne étoile déchue qui revient après trois ans d'absence des terrains, bien décidée à rattraper le temps perdu et à prendre part à la prochaine Draft. Sans atteindre la qualité de l'exceptionnel show de NBC, cette fiction reste sympathique, parfois captivante, bien que trop narrative. Les séquences de jeu sont en effet aussi rares que les défaites des Patriots de Tom Brady, le curseur étant pointé sur les relations humaines et les émotions. Une écriture qui permet de mieux appréhender la culture du sport américain, et cet univers impitoyable où les jeunes talents du pays sont baladés entre moments d'espoirs et périodes de doute.

Elle a néanmoins été approuvée par la NFL herself, qui ne s'est opposée à aucune option de destiné, preuve de la versatilité des décisions prises par votre avatar. Un scénario dont il est difficile de s'écarter, sauf pour s'octroyer des pauses récréatives, comme des parties de football 7v7, ou pour revivre des séquences flashbacks. Une expérience rafraichissante, interprétée par des acteurs de renom, courte mais différente des modes traditionnels (Franchise, Ultimate Team, etc.) qui sert surtout à introduire les nouveaux éléments de gameplay et un moteur graphique flambant neuf. Car Madden est désormais porté par le Frostbite Engine.

Moteur, action, ça retourne !

Pour se hisser à la hauteur des meilleures simulations du genre, il fallait en effet que cette licence passe un cap en terme d'immersion, façon nouveau riche. Transformation réussie grâce à une réalisation plus fine, appréciable et appréciée notamment sur les cinématiques et les présentations des équipes. Les protagonistes sont mieux modélisés, gagnent en humanité et en précisions de traits, et l'ambiance visuelle/sonore ressemble plus à celle des gigantesques enceintes de la ligue avec son jeu de lumière et sa vue d'ensemble depuis les tribunes. Sur le rectangle vert, ces progrès technologiques se ressentent surtout dans la gestion des collisions, avec des "sacks" impressionnants de réalisme. Revers de la médaille : l'ambition du studio californien se heurte encore à la complexité du Frostbite, n'échappant ni à sa cascade de bugs graphiques et de ralentissements, ni à ses temps de chargement longuets.

Pas de quoi refroidir l'ardeur des férus de ballon ovale, ni la curiosité des débutants qui souhaiteraient s'adonner aux plaisirs des touchdowns, car les développeurs proposent un gameplay plus instinctif, et donc à leur portée. Madden NFL 18 s'occupe de tout, vous ne vous occupez de rien. Mise à part choisir votre style de jeu, selon votre degré d'appréhension de la discipline, entre jouabilité arcade (fautes plus permissives), simulation (authenticité des épisodes précédents) et compétitif (expérience ultime). C'est le titre qui s'adapte à votre niveau, et non le contraire. Une volonté de donner plus de contrôle aux joueurs qui prend toute son envergure dans la gestion des passes. Cuir en main, toutes les tentatives de "Spin moves", "Juke moves" et "Hurdle moves" sont désormais plus rapides et efficaces. Plusieurs corrections ont également été apportées sur les réceptions et les fumbles (pertes du ballon) dans ce même souci d'accessibilité. Et pour ceux dont ces anglicismes donneraient envie de fouetter Mia Frye et George Eddy, il faudra s'y habituer, puisque le titre est uniquement proposé dans la langue de Shakespeare. En décalage complet avec les intentions d'ouverture et d'internationalisation de cet excellent cru 2018...